Genève, correspondance. C'est désormais acté : l'un des retardateurs de flamme les plus utilisés au monde, l'hexabromocyclododécane (HBCD), sera la 23e substance inscrite sur la liste des polluants organiques persistants (POP) que la convention de Stockholm s'est fixée pour objectif d'éliminer ou de restreindre.

Lors de la sixième réunion de la conférence des parties, qui se tenait à Genève du 28 avril au 10 mai, les 152 Etats signataires de la convention de Stokhholm ont suivi les recommandations du comité d'études des polluants organiques persistants, qui préconisait d'interdire la commercialisation du HBCD "pour protéger la santé humaine et l'environnement".

Depuis les années 1980, ce retardateur de flamme est surtout présent dans l'industrie du bâtiment, en tant qu'additif dans des mousses de polystyrène servant à fabriquer des panneaux isolants. Il est aussi utilisé comme ignifugeant dans de nombreux revêtements (rideaux d'hôpitaux, toiles à matelas, draperies, rembourrage des sièges de voiture ou d'avion, etc.). On le trouve aussi dans les boîtiers de pièces électriques et électroniques, dans les fils et les câbles.

UNE SUBSTANCE QUI S'ACCUMULE DANS LES TISSUS VIVANTS

En octobre 2012, les experts du comité d'études des POP, se basant sur de nombreuses études et répondant à une demande de la Norvège déposée en 2008, avaient conclu que le HBCD possédait toutes les caractéristiques d'un polluant organique persistant : une substance chimique qui s'accumule dans les tissus vivants, difficilement dégradable et dont l'impact est nuisible pour la santé humaine et animale, ainsi que pour l'environnement.

Il a été démontré que le HBCD, très toxique pour les organismes aquatiques, a des effets négatifs sur la reproduction et le développement des mammifères.

Chez l'homme, le risque le plus important concerne les enfants en bas âge ou à naître, en raison de la nocivité avérée du HBCD pour le système neuroendocrinien. Il agirait aussi comme un perturbateur des hormones thyroïdiennes.

Comment ce produit est-il ingéré et inhalé ? En France, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail expliquait, dans un avis rendu en septembre 2012, que "les sources d'émission potentielles sont les usines de synthèse ou d'incorporation du composé mais également les procédés d'usage ou de destruction de ces matériaux ; ces sources peuvent être diffuses ou localisées".

CONCENTRATIONS ÉLEVÉES DANS LES POUSSIÈRES DOMESTIQUES

L'alimentation constitue le "vecteur majoritaire de contamination pour la population générale". Parmi les aliments susceptibles d'être contaminés : le poisson, la charcuterie, les crustacés et la viande. Des concentrations élevées de HBCD ont aussi été retrouvées dans les poussières domestiques.

Selon le comité d'étude des POP, 11 580 tonnes ont été utilisées au sein de l'Union européenne (UE) en 2006, sur quelque 21 500 tonnes écoulées sur le marché mondial. En tête des pays producteurs viennent les Etats-Unis, qui n'ont pas ratifié la convention de Stockholm, puis l'Europe (dont la France) et l'Asie (Japon). "Les chiffres dont nous disposons manquent de précision, car cela dépend de ce que nous transmettent les Etats", explique Melisa Lim, membre du secrétariat de la convention de Stockholm. La Chine n'a, par exemple, communiqué aucune information sur les quantités d'HBCD qu'elle produit ou importe.

Le HBCD sera inscrit à l'annexe A de la convention qui rassemble les POP dont l'utilisation et la production doivent être éliminées. Le temps de trouver des produits de substitution, des dérogations de cinq ans pourront être accordées aux Etats qui en feront la demande. Renouvelables une fois, elles ne concerneront que le polystyrène expansé ou extrudé. L'UE prévoit d'interdire le HBCD à partir de 2015 dans le cadre du règlement Reach.