mardi 28 juin 2016

Le gouvernement français privatise le domaine public

source : Sana à Priori

1/-Le gouvernement français privatise le domaine public et menace la connaissance libre

2/-Privatisation du domaine public : avec la loi création, on a touché le fond !

3/-[Interview] Wikimédia France dénonce la « privatisation du domaine public »

2016.06.28 Château_de_Chambord_barré_d'une_croix_rouge

1/- Le gouvernement français privatise le domaine public et menace la connaissance libre

Des mesures graves sont prises depuis quelques semaines en 2016 par les politiques français, dont certaines représentent même un retour en arrière pour l’écosystème de nos projets.
Il s’agit de :
  • la création d’un droit patrimonial sur les domaines nationaux

Outre la liberté de panorama, qui a été adoptée avec une restriction commerciale (dans le projet de loi français « Pour une république numérique »), ce qui la rend inopérante, une nouvelle loi, « Création et patrimoine », va encore plus loin dans l’absurdité et la négation des usages actuels.

Au moyen d’un amendement, une mesure a été proposée concernant les domaines nationaux : ces bâtiments sont depuis très longtemps dans le domaine public et propriété de l’État français et ont un fort lien culturel et historique avec l’histoire de France. Il s’agit par exemple du château de Chambord, du château de Versailles, etc.

Alors que ces édifices ne sont plus soumis au droit d’auteur, il a été créé un nouveau droit patrimonial à destination des gestionnaires de ces domaines. Il faudra à présent avoir leur accord pour publier des photos, et éventuellement payer pour le faire. Cette disposition a donc des répercussions sur l’illustration des articles Wikipédia concernés et sur Wikimedia Commons, car nos projets sont incompatibles avec une quelconque restriction commerciale.
  • la taxe sur les moteurs de recherche qui rend inopérantes les licences libres

Les moteurs de recherche devront, désormais, payer pour la totalité des images qu’ils indexent dans leurs résultats. Les images sous licences Creative Commons ainsi que les images illicites sont concernées, et parmi celles-ci même les images « orphelines » (sans auteur identifié).
Concrètement cela signifie que les sociétés d’ayants droit vont se partager de nouveaux profits même lorsque les auteurs n’ont pas fait le choix de s’affilier à l’une d’entre elles.
  • D’une part, cela remet grandement en question la réalité juridique des licences libres (les moteurs de recherche vont devoir payer pour afficher des photos qui ont ce statut juridique !)
  • et d’autre part, les moteurs de recherche n’ayant pas encore été clairement définis, on peut craindre que Wikimedia Commons ne soit considéré comme l’un d’entre eux prochainement.
Appel à l’action :
  • Contactez vos députés et sénateurs pour leur faire part de ces problématiques.
  • Relayez cette information auprès de vos contacts médias (n’hésitez pas à nous solliciter si vous avez besoin de ressources).
  • Déployez toutes actions que vous jugerez nécessaires sur les projets.
Pour en savoir plus sur :
Nathalie Martin (directrice exécutive) et Émeric Vallespi (président), pour Wikimédia France.

source/https://meta.wikimedia.org/wiki/Le_gouvernement_fran%C3%A7ais_privatise_le_domaine_public

2/- Privatisation du domaine public : avec la loi création, on a touché le fond !



domaine public plus si public

Mercredi (15.06.2016) dernier a eu lieu la Commission Mixte Paritaire dans le cadre du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, les parlementaires ont frappé particulièrement fort avec deux mesures notablement absurdes et scandaleuses.
La première concerne la privatisation de l’image des domaines nationaux qui a été entérinée. Nous vous expliquions cette affaire, en détails, dans un précédent article de blogDemain, Wikipédia va donc se retrouver privée d’illustrations pour des articles emblématiques de l’histoire et de la culture française tels que : le Château de Chambord, le Château de Versailles, le Château de Saint Germain en Laye… Alors même que ces bâtiments sont tombés dans le Domaine public, les parlementaires ont créé un droit inédit pour leurs gestionnaires, afin de susciter de nouveaux revenus liés à l’utilisation des images.
La deuxième mesure concerne la mise en place d’une redevance obligatoire liée à l’indexation des moteurs de recherche. Ces derniers vont devoir payer pour avoir le droit d’indexer des photos et illustrations et les présenter dans les résultats. Voici l’objectif affiché mais ce qui est intéressant c’est la stratégie déployée pour y parvenir !
Toutes les images qui vont être publiées sur le web (réseaux sociaux, blog ou site personnel, forums, etc) vont être automatiquement mises en gestion auprès des différentes sociétés d’ayants-droit. Cette affiliation d’autorité ne permettant pas d’identifier les auteurs, ni le statut juridique des contenus, les sommes vont êtres versées directement par les moteurs de recherche à ces sociétés de perception et de répartition des droits, sans que les auteurs touchent quoi que ce soit.

C’est tout simplement une spoliation des œuvres réalisées, avec la complicité de l’Assemblée Nationale et du Sénat, qui au-delà de l’aspect du gain illégitime pose d’autres questions :

– les licences Creative Commons sont tout simplement niées donc rendues inopérantes,

– les images illicites vont générer des revenus similaires aux images licites.


On se demande vraiment comment les parlementaires ont pu cautionner à la fois ce non-respect du droit des auteurs et à la fois ce mépris éhonté de la légalité d’une image.

Ces régressions sont d’autant plus douloureuses qu’au même moment, nos voisins belges ont su faire preuve de plus de discernement en adoptant le jeudi 16 juin dernier la liberté de panorama, sans restriction commerciale. Ils viennent grossir les rangs des pays européens qui s’engagent en faveur du partage de la connaissance et d’un droit correspondant à la réalité des usages.

Pendant ce temps-là la France, quant à elle, n’a jamais fait autant d’efforts pour privatiser les biens communs…

par Nathalie Martin

source /http://blog.wikimedia.fr/privatisation-du-domaine-public-avec-la-loi-creation-on-a-touche-le-fond-9234

3/-[Interview] Wikimédia France dénonce la « privatisation du domaine public »

Ancien Régime 2.0 46
image dediée
Crédits : Marc Rees (CC-By-SA 2.0) –Loi
Elle n’est pas vraiment contente, Nathalie Martin. La directrice exécutive de Wikimédia France juge scandaleuse l’arrivée d’une redevance sur les moteurs d’images. Après les restrictions sur la liberté de panorama, puis celles sur les monuments nationaux, c’est la goutte de trop.

Comment analysez-vous la redevance sur les moteurs d’images ajoutée au projet de loi Création ?

C’est scandaleux, c’est fou ! Nous sommes au summum de ce qu’on pouvait faire en termes de privatisation du domaine public, avec la complicité des parlementaires. Les sociétés de perception et de répartition des droits sont arrivées à annihiler complètement ce que pouvaient permettre les licences Creative Commons. Désormais, toute image apportera quelque chose à ces sociétés, sans même respecter le désir et le droit de l’auteur de décider de l’utilisation de son image.

Les partisans de la redevance sur les moteurs jugent anormal que les moteurs puissent exploiter sans contrepartie ces créations

C’est une autre question qu’il faut plutôt poser aux moteurs de recherches. Ce qui a été choisi pour répondre à cette problématique permet selon moi d’atteindre d’autres objectifs cachés et latents.

C’est-à-dire ?

Les licences CC sont décriées depuis belle lurette par les sociétés de gestion collective. Armées de l’épouvantail Google, elles vont en réalité pouvoir œuvrer beaucoup plus largement puisque grâce à cette disposition, quiconque mettra une image sur Internet enrichira les SPRD alors même qu’il souhaitait le partage et la réutilisation.

Peut-on anticiper une réaction épidermique des moteurs à l’instar de l’Espagne ?

Je n’ai aucune idée de ce qui va se passer de leur niveau. Au niveau de la communauté, nous allons publier une information, compte tenu des implications pour Wikipédia Commons. Entre ça, les domaines publics nationaux et la liberté de panorama, nous avons vraiment le sentiment d’être dans une régression totale par rapport à nos valeurs.

Avez-vous été auditionnée d’une manière ou d’une autre par les parlementaires en amont du PJL Création ?

Pas du tout. C’est un silence radio sur cette affaire-là, nous avons donc l’impression d’un jeu en sous-marin. Autant, on nous auditionne sur tous les sujets possibles et imaginables, mais sur ce projet de loi Création, tout le monde a bien pris soin de ne rien nous communiquer.

Dans un récent communiqué (cf lien 1), vous considérez aussi que le projet de loi Création organise un copyfraud sur les domaines nationaux, pourquoi ?

On vise ici des domaines ayant un fort lien historique avec la France et jusqu’alors dans le domaine public. Pour une affaire de « fric » entre le domaine de Chambord et une marque de bière, le texte donne au gestionnaire un « droit d’autoriser » et de facturer complètement séparé du droit d’auteur. Si cette loi est entérinée dans quelques jours, ce qui a de fortes chances d’arriver, les contributeurs seront obligés de retirer toutes les photos en question, notamment celles des fiches du Château de Versailles ou de Chambord. C’est tout de même incroyable pour des monuments aussi représentatifs de la culture française !
On a milité des mois pour faire advenir la liberté de panorama qui déjà, nous semblait correspondre aux usages, cette fois, on retombe dans l’Ancien régime !

Ses partisans pourront cette fois répondre que ce droit vise seulement l’utilisation commerciale des images de ces immeubles, non Wikipédia…

Sur Internet, 90% des espaces sont considérés comme commerciaux. Les licences sous Wikipédia permettent le libre partage par rapport à cette réalité où tout est considéré comme commercial, du fait de la publicité, des réseaux sociaux, etc.
Comme les projets permettent la libre réutilisation, il n’est pas possible de mettre en danger les contributeurs. Si demain quelqu’un met une photo du Château de Chambord sur Wikimédia Commons et qu’une autre personne la réutilise sur les réseaux sociaux, et si pour X raisons, elle fait le buzz, cette réutilisation commerciale entraînera une insécurité juridique.

Êtes-vous malgré tout satisfaite de la liberté de panorama tel qu’envisagée par le projet de loi d’Axelle Lemaire ?

Absolument pas. Le texte exclut l’usage « à caractère directement ou indirectement commercial » tout en réservant cette liberté aux particuliers. Même constat donc : c’est une méconnaissance absolue d’Internet.
C’est certes une grande victoire politique puisqu’on en a beaucoup parlé, du coup le grand public a pu mieux appréhender cette notion. C’est aussi une victoire médiatique compte tenu des retombées. Mais au niveau pratique, cela ne change absolument rien à nos projets qui ne peuvent participer au partage de la connaissance. En outre, les particuliers ne peuvent toujours pas poster sur les réseaux sociaux. Ils ne sont absolument pas protégés.

Avez-vous eu des échanges avec Axelle Lemaire ?

Sur Twitter, dernièrement, la secrétaire d’État a expliqué qu’on pourra utiliser ces photos si elles ne finissent pas sur une carte postale, un t-shirt, ou un logo. Voilà une compréhension très limitée de ce qui est commercial, oubliant la nature d’Internet. Ces régressions perpétuelles sont ridicules pour le numérique et la diffusion de la culture même à l’international !
2016.06.28 Château_de_Chambord_barré_d'une_croix_rouge.jpg

Publiée le 21/06/2016 à 17:47
lien 1/http://blog.wikimedia.fr/copyfraud-sur-les-domaines-nationaux-9172
source/http://www.nextinpact.com/news/100349-interview-wikimedia-france-denonce-privatisation-domaine-public.htm

(Bientôt, hollande nous fera payer le droit de respirer. Sommes-nous encore en France ou dans une colonie américaine ? note de rené)

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