dimanche 27 mai 2018

Vie privée, Elon Musk, STASI... C'était Zuckerberg à VivaTech
Mathilde Simon source : Usbek et Rica
Pourtant en terrain conquis, c’est avec une grande prudence que Mark Zuckerberg s’est présenté ce jeudi 24 mai sur la scène principale de VivaTech, le salon dédié aux start-up et à l'innovation numérique. Il y avait pourtant peu de craintes à avoir tant son interlocuteur, Maurice Lévy, ancien président du directoire de Publicis Groupe et co-créateur du forum, s'est montré clément à son égard. Le patron de Facebook est resté frileux, récitant son discours tel un bon élève qui a bien appris sa leçon. Mais était-ce ce à quoi s'attendaient les milliers de start-upeurs venus l'écouter ?
 Maurice Lévy s’excuse auprès de son invité : vraiment, il n’avait « pas envie de couvrir » le sujet du scandale Cambridge Analytica qui a frappé le créateur de Facebook en avril dernier. « Mais il le faut », admettent en choeur les deux hommes. Le passage de Zuckerberg à VivaTech fait effectivement suite à son audition du mardi 22 mai devant les parlementaires européens, auxquels il a exposé deux jours plus tôt sa position quant à la protection des données personnelles des utilisateurs de Facebook. 

Le patron du Facebook n’a pourtant pas cherché à échapper aux sujets polémiques, bien au contraire, se saisissant de chaque occasion pour rappeler combien il était conscient de ses « responsabilités », un mot qu'il n'a cessé de répéter au cours des 40 minutes d'entretien. Il était loin, en 2004, d’imaginer porter un jour la casquette de protecteur de l'intégrité des élections à travers le monde, a-t-il encore assuré, en promettant au public de VivaTech qu’il assumerait ce rôle « avec soin ». 

Vie privée vs pubs ciblées 

Ce 24 mai, nous sommes à la veille de l'entrée en vigueur du fameux RGPD (Réglement Général sur la Protection des Données). Une mauvaise nouvelle pour Facebook ? Zuckerberg semble peu inquiet. A plusieurs reprises, il salue l'initiative européenne, et affirme même qu'il va en étendre les principes fondamentaux à tous les utilisateurs du réseau à travers le monde.
Malgré tout, il compte sur le désintérêt de ses utilisateurs pour la question. Il en est convaincu, « la grande majorité des gens choisissent délibérément de faire en sorte que l’on puisse utiliser les données venant des applications ou des sites qu’ils utilisent pour améliorer la pertinence des publicités ciblées qu'ils reçoivent» 
Autrement dit, la protection de la vie privée, c’est bien, mais il s’agirait de ne pas oublier ce qui importe vraiment. Ainsi, pas question de remettre en question le modèle économique de Facebook. Il répète son mantra : « le principe de la gratuité, c’est qu’en contrepartie, il y a de la publicité ».  
Impossible ici de ne pas citer son analyse toute personnelle sur l'attachement des Européens à la question de la protection des données : Zuckerberg était sur scène depuis dix minutes à peine quand il glisse qu'il « comprend que la question de la protection des données soit plus sensible en Europe, par exemple pour un Allemand qui a connu la STASI ». Magnifique dérapage, que n'ont pas manqué de relever les médias allemands. 

Oui, mais il y a l'IA 

Zuckerberg poursuit en expliquant qu'il mettra tout en oeuvre pour contrer la diffusion des fake news, les discours haineux et les « abus des Russes »… grâce à l’intelligence artificielle. On en avait presque oublié qu’on était à VivaTech. Et comme beaucoup dans ce salon, Mark Zuckerberg est « très optimiste quant à l’avenir de l’IA ». Tellement optimiste qu’il compte doubler le budget destiné à la recherche liée à IA en France. 

 Difficile d'évoquer l'IA sans rebondir sur ses différends avec Elon Musk (qui évoquait en juillet la compréhension « limitée » du patron de Facebook sur le sujet), ce que ne se prive pas de faire Maurice Lévy. Zuckerberg associe le scepticisme d’Elon Musk sur l'IA aux leçons que ce dernier aurait tiré des incidents auxquels ont fait face les voitures autonomes. Mais, philosophe Zuckerberg, « il ne faut pas s'arrêter à ses échecs, et poursuivre sa quête du progrès et du bien commun ». Il se dit malgré tout « très optimiste quant au futur de l’intelligence artificielle », bien qu’il faille « se préoccuper de ses effets négatifs ». 

 Mais est-ce vraiment cela que les jeunes entrepreneurs français, venus par milliers écouter son expertise sur le développement d’entreprises, étaient venus chercher ?  « Il faut concentrer son énergie sur quelque chose qui marche », voici peut-être le conseil le plus précieux qu'ait donné le dirigeant de Facebook. Ou encore, « concentrez-vous sur un seul problème à la fois ». On oublie la prise de risque, alors ? Pas sûr que cela soit avec un tel discours qu’on  « fera de Paris le coeur de la planète numérique » - pour reprendre la formule de Maurice Lévy lors de son discours d'introduction, mais contexte post-scandale Cambridge Analytica oblige, mieux valait rassurer les utilisateurs que faire vibrer la start-up nation. 
 SUR LE MÊME SUJET : 
(Ils conçoivent l'Intelligence artificielle comme un outil de contrôle, de quoi, de notre libre arbitre ? Parce qu'après, les algorithmes, clés de voûte du contrôle de nos opinions et nos comportements, il leur reste à orienter notre libre arbitre. note de rené)

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