Tout comme en Libye, le conflit actuel au Venezuela dépasse de loin une crise humanitaire puiqu’il est, en fait, assis sur des montagnes d’or et de pétrole.
Par Matt Agorist
La passion des États-Unis pour le Venezuela, qui dure depuis des décennies, a atteint son paroxysme mercredi lorsque les États-Unis, le Canada, le Brésil et d’autres ont tous déclaré un homme qui ne s’est jamais présenté à la présidence et, encore moins, jamais été élu à ce poste, comme président du Venezuela.
Mercredi, Juan Gerardo Guaidó Márquez a publiquement juré et prêté serment en tant que Président du Venezuela. Il assumait cette fonction sans aucun processus démocratique – devenant, de ce fait, un dictateur – et a été immédiatement considéré comme légitime par Washington.
Cette décision de Washington de reconnaître Guaidó comme président officiel est une nouvelle page du livre qui a servi à détruire, au cours des deux dernières décennies, des pays comme l’Irak, la Libye et la Syrie. C’est exactement la même rhétorique des bellicistes bipartisans de Washington qui est de nouveau mise en avant alors que des bonimenteurs tels que Marco Rubio lance des menaces de guerre totale. Tout à coup, les détracteurs de Trump se rassemblent par solidarité, crachant leur bave belliciste sur la possibilité d’un conflit vénézuélien.
Venezuela or 20190126Pour ceux qui ne s’en souviennent pas, les mêmes tactiques ont été utilisées juste avant l’invasion de la Libye par les Etats-Unis et ont transformé ce bastion de l’espoir en Afrique en un État infesté de terroristes où des esclaves humains sont ouvertement vendus en public.
De la même manière que Guaidó s’est autoproclamé président et a été reconnu par les Etats-Unis, en Libye, le chef du Conseil national de transition libyen, Mustafa Abdul Jalil a annoncé des tueries massives si l’Occident n’intervenait pas et ne prenait pas rapidement le contrôle de la situation. Quelques jours plus tard, le CNT libyen a été officiellement reconnu comme le gouvernement légitime libyen et le régime de Kadhafi a été évincé. Quelques jours plus tard, les puissances de l’OTAN, dirigées par les États-Unis, ont transformé la Libye en un enfer ravagé par la guerre.
Dans les prochains jours, vous pouvez vous attendre à ce que cette décision des États-Unis alimente le potentiel d’une guerre civile au Venezuela qui attirerait d’autres pays comme Cuba et le Brésil. Le résultat de cette guerre civile potentielle serait tout à fait catastrophique.
Le ministère russe des Affaires étrangères a répondu jeudi à la reconnaissance de Guaido comme président par Washington, notant que cela  » vise à approfondir la division dans la société vénézuélienne, à augmenter le conflit dans les rues, à déstabiliser fortement le système politique interne et à aggraver le conflit « . Le ministère a ensuite réitéré les mises en gardes qu’il avait faites juste avant que les Etats-Unis n’envahissent la Syrie et la Libye, et a déclaré qu’une action similaire au Venezuela serait « lourde de conséquences catastrophiques« .
L’initiative de Washington et d’autres a même suscité une réponse de Poutine lui-même jeudi dernier, qui a déclaré, selon le journal russe RT, que « l’ingérence étrangère dans les affaires intérieures du Venezuela viole de manière flagrante le droit international« .
À ceux qui pensent qu’il s’agit de Nicolás Maduro, détrompez-vous. Personne ici ne prétend que Maduro est un ange. Personne ici ne dit que son élection n’a pas été entourée de controverse. Et personne ici ne prétend que le peuple vénézuélien n’a pas le droit de contester sa présidence. Mais il serait incroyablement naïf d’ignorer l’ingérence de chaque président américain dans le pays depuis George W. Bush, et la volonté farouche des États-Unis de renverser Hugo Chavez durant toute une décennie avant les évènements d’aujourd’hui.
Le TFTP a longtemps rendu compte des crimes commis par le gouvernement contre le peuple vénézuélien. Nous avons signalé des massacres de citoyens par la police, des loyalistes armés face à l’opposition désarmée, et l’inquiétante transformation du pays en état policier. Mais la situation actuelle au Venezuela ressemblerait à un paradis par rapport à ce qui pourrait arriver après l’intervention occidentale.
Venezuela or  2 20190126
Le Venezuela n’est pas une autocratie tyrannique et sa crise n’est PAS organique ; c’est une société profondément divisée et polarisée, que les Etats-Unis exploitent pour des intérêts particuliers.
Et non, le socialisme à lui seul n’a pas créé l’horrible sort du peuple vénézuélien. Des décennies de sanctions et d’ingérence se sont avérées incroyablement efficaces pour jeter leur économie dans un chaos sans nom, causer l’effondrement de leur monnaie, les couper du reste du monde, et les affamer littéralement à mort.
Venezuela or 3 20190126
Ne vous y trompez pas, c’était probablement cela le plan depuis longtemps. Comme George Galloway, ancien membre du Parlement britannique depuis 30 ans, l’a fait remarquer,  » avant de lâcher les bombes, ils lâchent d’abord le récit, bien sûr. Et le bombardement de la désinformation au Venezuela a été l’un des plus longs bombardements de l’histoire. D’énormes sommes d’argent américain ont été dépensées pour la falsification médiatique, la subversion, le sabotage, les coups d’État militaires et les menaces d’invasion tout au long de l’ère Chavez-Maduro. »
Pour ceux qui ne le savent peut-être pas, les réserves prouvées de pétrole du Venezuela sont connues pour être les plus importantes au monde, totalisant 297 milliards de barils. En décembre, Caracas et Moscou ont signé un accord d’investissement de 5 milliards de dollars pour augmenter la production pétrolière du Venezuela d’un million de barils par jour. Cette mesure a été prise pour contrer les effets des sanctions américaines qui ont paralysé le pays et cela a fait sourciller de nombreux néoconservateurs.
De plus, en plus de ses gisements prouvés de pétrole, le Venezuela est également connu pour ses gisements d’or extrêmement riches. Toujours en décembre, Caracas a donné le feu vert à la Russie pour commencer à extraire de l’or dans son pays.
« En ce qui concerne la participation de la Russie à l’exploitation aurifère ou à d’autres projets miniers, le Venezuela a formulé toute une série de propositions intéressantes qui sont actuellement examinées par les opérateurs russes intéressés », a déclaré l’ambassadeur.
En raison de leurs riches gisements et de la nécessité de contourner les sanctions américaines et un dollar américain transformé en arme, le Venezuela est devenu le 25ème plus grand détenteur d’or au monde, ce qui en fait une menace directe pour le système bancaire mondial.
Penser que les intérêts américains au Venezuela sont purement humanitaires n’est pas seulement stupide, mais c’est ignorer aveuglément des décennies d’interventionnisme américain qui prouvent le contraire, surtout si l’on considère les événements en Libye.
Comme TFTP l’avait déjà signalé le 20 octobre 2011, l’Occident avait décidé d’utiliser l’OTAN pour renverser Kadhafi, non pas pour faire face à une menace humanitaire pour les civils, comme cela avait été répété à maintes reprises et qui l’est encore aujourd’hui pour justifier le coup d’État au Venezuela, mais parce que le lancement prévu d’une nouvelle monnaie utilisable dans toute l’Afrique constituait une menace existentielle palpable pour les banques centrales, au cœur du système financier et politique occidental.
En fait, avant l’approbation de Guaido par Washington, le Venezuela menait un plan similaire. Le président Recep Tayyip Erdogan a récemment lancé un commerce d’or avec Maduro. Mais il ne s’agissait pas simplement de déplacer l’or d’un endroit à un autre. Maduro a annoncé qu’il transférait l’ensemble de ses activités de raffinage directement en Turquie dans le cadre d’une action directe contre les sanctions monétaires contrôlées par l’Occident.
Maintenant, nous nous trouvons au bord du précipice d’une invasion totale de leur pays. Allez comprendre.
Alors que les sanctions initiées par les Etats-Unis continuent de se retourner contre eux en raison d’une coalition de plus en plus nombreuse de pays se mobilisant pour les combattre, le complexe industriel militaire américain n’aura d’autre choix que la guerre pour se protéger lui-même. Quel que soit votre sentiment personnel sur ce qui se passe avec le peuple vénézuélien et son gouvernement, le fait de gober une nouvelle série de mensonges utilisés pour l’interventionnisme occidental sur un autre pays qui « a besoin de liberté » (un de plus), sera un désastre certain, et 100 pour cent des situations similaires récentes le prouvent.
Traduction Avic – Réseau International