Les autorités iraniennes ont confirmé ce 25 mars l’annulation “complète” de la mission de l’ONG Médecins sans frontières (MSF) à Ispahan pour aider les personnels de santé iraniens dans leur riposte contre l’épidémie de Covid-19, écrit le siteRadio Farda.
Ce dernier cite notamment le gouverneur d’Ispahan, Abbas Rezai, qui a justifié cette décision par “la capacité suffisante des hôpitaux appartenant aux forces armées dans la province d’Ispahan”. Ceci, rappelle Radio Farda“alors que le président iranien, Hassan Rohani, avait, il y a une semaine, annoncé que l’Iran serait prêt à accepter l’aide de tous les pays” dans sa lutte contre le coronavirus.
MSF, qui était censée déployer son équipe d’urgence et sa structure gonflable de 50 lits en Iran, a exprimé dans un communiqué son “incompréhension face à cette soudaine annulation” par les autorités iraniennes.
On ignore de quelle façon l’autorisation d’exercer avait été accordée en premier lieu à MSF pour sa mission en République islamique. Mais l’agence d’information iranienne Isna affirmait, le 24 mars, que MSF avait obtenu “l’accord total du ministère du Renseignement” iranien, dépendant du président Rohani. Ce dernier prône toujours une ouverture envers l’Occident.

“Guerre biologique”

L’agence Isna avait également relaté que la valeur des équipements qui devaient être déployés par MSF en Iran s’élevait à 970 000 euros, un montant beaucoup plus élevé que celui évoqué par les conservateurs iraniens. Cette information a été retirée du site d’Isna peu de temps après sa publication.
Selon Radio Farda“l’annulation de la mission de MSF est survenue après que le guide suprême, Ali Khamenei, a évoqué une ‘guerre biologique’ contre son pays. Une façon d’accuser à demi-mot les États-Unis d’avoir fabriqué et volontairement diffusé le virus responsable de la pandémie de Covid-19.
Le projet de la mission de MSF en Iran avait provoqué les critiques d’une partie des conservateurs iraniens et des médias proches des Gardiens de la révolution, l’armée idéologique du régime, contrôlée par les plus “durs” des responsables iraniens, qui rejettent toute ouverture envers l’Occident.

Complots américains

Au sein cette aile dure figure le rédacteur en chef du quotidien ultraconservateur Kayhan, Hossein Shariatmadari, choisi par le guide suprême en personne. Dans un entretien accordé à l’agence iranienne Fars, l’homme a mentionné l’animosité de la France envers l’Iran, notamment le soutien de Paris à l’ancien président irakien Saddam Hussein lors de sa guerre contre l’Iran, et le fait que la France joue le jeu des États-Unis :
L’Amérique sait qu’elle n’a aucune place en Iran et que sa présence est impossible. Mais la France n’a-t-elle pas toujours accompagné les complots américains contre l’Iran islamique ? Est-ce que [Emmanuel] Macron n’a pas explicitement annoncé qu’il soutiendrait tous les plans américains contre notre pays ?”
Aujourd’hui, l’annulation de la mission de MSF en Iran, alors que ce pays constitue l’un des épicentres de la pandémie (2 077 morts et plus de 27 000 malades, selon les chiffres officiels), est ainsi le dernier épisode d’une lutte de pouvoir féroce engagée au sommet du régime iranien, entre les plus durs qui rejettent tout rapprochement entre l’Iran et l’Occident, et les plus modérés, menés par le président Rohani.
Sur les réseaux sociaux, certains Iraniens se demandent pourquoi leur pays a rejeté cette aide alors qu’il multiplie les appels à ce que les sanctions américaines contre lui soient levées. De nombreux internautes ont réagi sur Twitter pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une hypocrisie :
Ils n’ont pas laissé Médecins sans frontières dépister les plus démunis ? Peut-être que [le ministre des Affaires étrangères iranien] Mohammad Javad Zarif va bientôt tweeter : ‘Le peuple iranien mourra sauf si vous nous envoyez 200 millions d’euros en espèce chaque semaine’.”
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