mardi 21 août 2018

Donald Trump s'attaque à l'euro

Paris Match ||Mis à jour le 
Donald Trump, lundi à la Maison Blanche.MANDEL NGAN / AFP
Le président des Etats-Unis estime que la monnaie unique européenne est «manipulée».
Le manque de sympathie de Donald Trump à l'égard de l'Europe n'est pas un secret. Le président des Etats-Unis avait même classé, mi-juillet, l'Union européenne au rang des «ennemis» de l'Amérique. Dans une interview à l'agence Reuters, lundi, le milliardaire a ajouté à ses multiples accusations concernant le commerce des reproches sur l'euro, la monnaie unique européenne. «Je pense que la Chine manipule sa monnaie, absolument. Et je pense que l'euro est aussi manipulé... Et ce qu'ils font, c'est qu'ils compensent le fait qu'ils paient très cher... des centaines de millions de dollars et dans certains cas des milliards de dollars au Trésor public américain et donc ils s'adaptent, et moi non, et je vais quand même gagner», affirme Donald Trump selon un extrait de l'entretien repris sur le «New York Times».
Donald Trump est un critique acharné de la politique monétaire chinoise -il accusait déjà Pékin de manipulation dans un tweet de décembre 2011. L'attaque contre l'euro, en revanche, est une nouveauté. Par le passé, le milliardaire avait dénoncé la monnaie unique européenne comme une tentative de «faire mal aux Etats-Unis» et s'était félicité de la crise grecque. «L'euro va bientôt s'effondrer», prédisait-il en août 2012. En octobre de la même année, il encourageait la Grèce à «sortir de l'euro et retrouver leur propre monnaie -ils perdent juste du temps». Mais dans les tweets du président archivés sur le site TrumpTwitterArchive, on ne trouve pas trace d'une accusation directe de manipulation concernant la zone euro avant le 20 juillet dernier, lorsque Donald Trump avait rangé l'Union européenne aux côtés de la Chine.
L'accusation d'une manipulation de l'euro à des fins politiques se heurte à la réalité : la Banque centrale européenne est indépendante des institutions politiques et sa mission première est de contenir l'inflation, pas de protéger l'emploi ou d'encourager les exportations. La marge de manoeuvre de la BCE est en tout cas sans commune mesure avec celle de la Banque populaire de Chine, qui encadre les taux de change du yuan.

Le dollar dopé par la hausse des taux d'intérêt et la crise turque

Ces dernières semaines, la hausse du dollar a été encouragée par la crise avec la Turquie : les investisseurs, craignant que les monnaies des pays émergeants ne subissent le même sort que la livre turque, utilisent le dollar comme valeur refuge. L'euro, quant à lui, avait reculé ces derniers mois après avoir dépassé le taux de 1,20 dollar pour un euro.
Donald Trump a des idées très arrêtées en matière de politique monétaire. Rompant avec la tradition qui veut que les présidents américains se gardent de critiquer ouvertement la politique de la Réserve fédérale, il a multiplié les attaques contre l'institution et son président, Jerome Powell, nommé par Trump lui-même en novembre 2017. Alors que l'économie américaine tourne à plein régime et que le gouvernement a décidé l'an dernier des réductions d'impôt massives, la «Fed» a entrepris une remontée progressive de ses taux directeurs pour retrouver des niveaux historiquement normaux. Après la crise de 2008, la Réserve fédérale avait en effet maintenu des taux très bas afin de soutenir l'économie. Aujourd'hui, ces mesures ne sont plus nécessaires pour entretenir la croissance, juge la Fed. Mais Donald Trump ne veut pas en entendre parler. «Je ne suis pas ravi des hausses de taux d'intérêt. Non, je ne suis pas ravi. (...) On négocie puissamment avec d'autres nations. On va gagner. Mais pendant cette période, la Fed devrait m'aider», a déclaré Donald Trump à Reuters lundi.
Engagé dans une guerre commerciale sur plusieurs fronts, Donald Trump voudrait que des taux d'intérêt bas maintiennent la faiblesse du dollar, susceptible de doper les exportations américaines alors même que les partenaires commerciaux de Washington ont répliqué aux droits de douane voulus par Trump en ciblant toute une gamme de produits, des motos Harley-Davidson au soja en passant par le bourbon.

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