mercredi 27 janvier 2016

Le rouble en chute libre, les Russes prisonniers de leur hypothèque

Mise à jour le mercredi 27 janvier 2016 à 13 h 18 HNE
Raymond Saint-Pierre
Radio-Canada
Manifestation dans une banque russe contre la hausse fulgurante de la valeur des hypothèquesManifestation dans une banque russe contre la hausse fulgurante de la valeur des hypothèques  Photo :  Maxim Shemetov / Reuters
Svetlana Ovchinikova est libraire à Moscou. En 2008, elle a réalisé son rêve : acheter un appartement modeste en banlieue. Mais son rêve, happé par la chute du rouble et des prix du pétrole en Russie, est aujourd'hui devenu cauchemar.
Un texte de Raymond Saint-PierreCourriel
La libraire de Moscou n'est pas la seule à souffrir de la crise qui traverse le pays. Plusieurs centaines de milliers de Russes risquent de perdre leur maison en raison de la faiblesse du rouble, qui a perdu plus de la moitié de sa valeur en quelques mois.
Svetlana Ovchinikova, libraireSvetlana Ovchinikova, libraire  Photo :  Radio-Canada/Raymond Saint-Pierre
C'est qu'à l'époque, Svetlana s'est fait convaincre, comme bien d'autres acheteurs, de prendre une hypothèque en devises étrangères dans des banques russes.
Dans son cas, l'emprunt s'est fait en dollars américains, mais dans un contexte économique fort différent. Les Russes pouvaient emprunter de plus grosses sommes, les taux d'intérêt étaient plus bas et le rouble était fort.
Or, depuis, la valeur du rouble a dégringolé et le coût de son hypothèque, lui, a presque doublé. Elle ne peut plus rembourser l'emprunt.
« J'ai peur de perdre mon appartement. Je ne paie pas mon hypothèque depuis des mois. On va me poursuivre et, comme ça arrive, à bien d'autres, je vais me faire expulser. »— Svetlana Ovchinikova
Réforme en vue, mais peu d'espoirs
Entre les mains, Svetlana a une liasse de lettres qu'elle a envoyées à sa banque, au président Vladimir Poutine et à d'autres élus, mais sans succès.
Ces jours-ci, elle participe aux manifestations qui ont lieu devant plusieurs banques à Moscou et dans d'autres grandes villes. Les protestataires réclament des concessions.
La propriétaire d'un salon de beauté, Janna Yagoudinova, est l'une des leaders du mouvement de manifestation. Elle se considère comme esclave de son hypothèque, et a choisi de résister.
« On a de quoi se défendre, et on a décidé de livrer bataille, et nous sommes sérieux. »— Janna Yagoudinova
Le président Vladimir Poutine a récemment mis sur pied un plan de crise pour soutenir l'activité économique du pays. En Russie, le pétrole et le gaz représentent plus de la moitié des revenus. Mais même si Moscou prévoit injecter l'équivalent de 30 milliards de dollars canadiens dans l'économie, des centaines de milliers de Russes risquent, à court terme, de se retrouver sans toit.
Dans le hall de la banque où se trouve Janna, les regards en disent long. Certains ont même vu leur hypothèque augmenter de 300 %. Selon Janna, la moitié des manifestants sont déjà convoqués au tribunal et vont probablement perdre leur appartement.
Dans tout le pays, 250 000 familles auraient le même problème, selon les protestataires. Un drame qui frappe particulièrement la classe moyenne, une tranche de la population où on trouve les appuis les plus solides au président Poutine.
Et malheureusement, aucune embellie du rouble ne point à l'horizon.

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