samedi 25 décembre 2021

 

La France relance la construction de centrales nucléaires

via les moutons enragés

Par Alexandre Lemoine pour Observateur-Continental

Une catastrophe énergétique menace la France. C’est ainsi que l’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden) a décrit la situation sur le marché énergétique du pays dans son communiqué. 

C’est l’arrêt d’un tiers des centrales nucléaires françaises sur fond d’envolée des prix du gaz qui est responsable de la crise énergétique, estiment les spécialistes. 15 des 56 unités de production des centrales nucléaires françaises sont actuellement à l’arrêt. Ce qui affecte l’industrie française la rendant non rentable. Les membres de l’Uniden représentent 70% de la consommation industrielle en France (secteur alimentaire, industrie, construction automobile, production de ciment, de chaux, de papier, de verre, bâtiment, énergie, traitement des métaux, transport). 

L’époque du nucléaire civil en France a été inaugurée par Charles de Gaulle, qui avait créé dans les années 1950 le Commissariat à l’énergie atomique dirigé par le prix Nobel Frédéric Joliot-Curie. Le premier réacteur nucléaire français à eau lourde a été lancé trois ans plus tard, le 15 décembre 1948. 

Après la crise pétrolière de 1973, la mise sur l’énergie nucléaire est devenue déterminante en France. À l’heure actuelle, 19 centrales nucléaires françaises avec leurs 56 unités de production produisent les trois quarts de toute l’électricité du pays et fournissent 40.000 emplois. La France occupe la première place mondiale en termes de part de l’énergie nucléaire dans la balance énergétique du pays et la deuxième place de par la quantité d’électricité absolue produite par les centrales nucléaires. 

Ces dernières années, les partenaires européens de la France, avant tout l’Allemagne, faisaient pression sur Paris exigeant de renoncer à l’énergie nucléaire, qu’ils qualifiaient d’obsolète, chère et dangereuse. Au final, le parlement français a adopté en 2015 une loi sur la croissance verte et la réduction d’ici 2025 de la part de l’énergie nucléaire dans la balance énergétique de 70% à 50%. 

L’une des promesses de campagne de François Hollande était la fermeture de la plus ancienne centrale nucléaire française de Fessenheim. À son arrivée au pouvoir, Emmanuel Macron a maintenu la ligne de son prédécesseur visant à renoncer à l’énergie nucléaire. En 2018, il a annoncé que 14 réacteurs de 900 MW seraient fermés d’ici 2035. 

Au XXIe siècle, aucun nouveau réacteur nucléaire n’a été mis en service en France. Une grande partie des centrales nucléaires françaises en activité a été construite  entre la fin des années 1970 et le début des années 1980. La durée de service initiale des réacteurs était de 30-40 ans, elle a déjà été prolongée deux fois de 10 ans. Tôt ou tard, il sera nécessaire de retirer du service tout le parc de centrales nucléaires, or les capacités de substitution sont absentes en France. 

Le dernier projet de centrale nucléaire en France – deux unités mises en service à la centrale de Flamanville et un en construction – s’accompagnait de graves accidents. Le lancement de la troisième unité du réacteur européen de troisième génération EPR (European Pressurized Reactor) d’une puissance de 1.650 MW est constamment reporté. 

Il y a deux ans, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française a fait état lors d’une vérification des centrales nucléaires françaises de « problèmes sur des soudures sur une vingtaine de générateurs de vapeur », susceptibles de conduire à la destruction du générateur. 

Près d’un tiers des réacteurs français sont actuellement à l’arrêt, ce qui a provoqué une « catastrophe énergétique » sur fond d’envolée du prix du gaz. Le président Macron a appelé, en avril 2021, la Commission européenne à inclure les centrales nucléaires dans la taxonomie écologique, c’est-à-dire reconnaître l’énergie nucléaire comme « verte ». La commission a chargé sa branche scientifique, le Centre commun de recherche (CCR), de présenter un rapport en la matière. 

Le rapport du CCR indique que l’énergie nucléaire mérite une « étiquette verte », car « l’analyse n’a révélé aucune preuve scientifiquement fondée que l’énergie nucléaire inflige un plus grand préjudice à la santé de l’homme ou à l’environnement que d’autres technologies de production d’électricité ». 

Après quoi, le problème de la réduction de la part des centrales nucléaires dans la balance énergétique de la France a été réglé, et Emmanuel Macron a commencé à promouvoir l’idée de maintien et de développement de l’énergie nucléaire. En octobre 2021, il a présenté un plan d’investissement de cinq ans « France 2030 » qui, selon Associated Press, fait partie de son programme de préparation pour la présidentielle de 2022. 

Le programme des innovations parle d’investissements dans l’énergie verte à hydrogène afin de réduire l’accent sur l’énergie nucléaire. Les centrales nucléaires françaises participeront activement à l’élaboration d’hydrogène, alors qu’auparavant l’hydrogène « vert » était considéré comme un secteur d’énergie solaire et éolienne. 

En novembre, M. Macron s’est adressé à la nation annonçant des projets de construction de nouvelles centrales nucléaires dans le pays. Son allocution était due à un sondage jugé alarmant par le président, selon Associated Press. Ne faisant pas confiance aux promesses de campagne du chef de l’État, les représentants des secteurs énergivores de l’industrie française ont exigé du gouvernement des mesures « énergiques pour un rétablissement rapide » des capacités des centrales nucléaires françaises et une « mobilisation totale » afin d’empêcher une rupture des chaînes de livraison.                                                                                                                               

L’UE a déjà « réhabilité » les centrales nucléaires et ne tente même pas d’interdire la génération de gaz. La consommation de charbon a également augmenté en Europe. En d’autres termes, les projets de transition énergétique verte rapide échouent. Il est fort probable que sous la pression des industriels les centrales à charbon à base de technologies « propres » soient reconnues « vertes ». Forbes qualifie l’abandon de la génération de charbon d' »exemple d’un choix prématuré et franchement irrationnel d’énergie; les gouvernements faisaient ce choix tentant d’accélérer la transition énergétique, forçant à remplacer des ressources énergétiques fiables et efficaces ». 

Et si le charbon était également « réhabilité », que resterait-il de la transition énergétique verte tant vantée?

Alexandre Lemoine

Les opinions exprimées par les analystes ne peuvent être considérées comme émanant des éditeurs du portail. Elles n’engagent que la responsabilité des auteurs

Observateur-Continental

Aucun commentaire: