mercredi 31 décembre 2025

 


Le gouvernement israélien a placé mon nom en tête d’une liste d’«antisémites»

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par Caitlin Johnstone

Mon nom figure en tête d’une liste dans un document publié ce mois-ci par le gouvernement israélien afin d’établir de faux liens entre la fusillade de Bondi Beach et les critiques en ligne d’Israël et de ses atrocités.

Ce document PowerPoint, publié par le ministère israélien des Affaires de la Diaspora et de la Lutte contre l’antisémitisme, s’intitule «Délégitimation et antisémitisme en Australie – Un aperçu d’octobre à décembre 2025», et ses affirmations ont été relayées par des médias israéliens comme Ynet News.

La page cinq du document, intitulée «Acteurs : Principaux vecteurs d’antisémitisme et de délégitimation en Australie», mentionne le nom de Caitlin Johnstone en tête d’une colonne intitulée «Influenceurs et créateurs de contenu actifs», classés par nombre d’abonnés. La page sept me décrit comme une «blogueuse anti-occidentale, promouvant des théories du complot et prônant la délégitimation totale d’Israël».

Le mot «délégitimation» revient sans cesse dans le document, ce que je trouve personnellement cocasse. Ils savaient pertinemment que l’accusation d’«antisémitisme» ne tenait pas la route, alors ils ont dû y ajouter cette étrange plainte concernant la «délégitimation» de l’État d’Israël – comme si c’était une mauvaise chose. Je nierai toujours nourrir la moindre haine envers les juifs ou le judaïsme, mais j’admets volontiers avoir tenté de délégitimer un État d’apartheid génocidaire qui ne peut exister sans violence et abus incessants.

Le document tente de démontrer que, durant les deux mois précédant l’attentat de Bondi, une vague de «discours de haine» antisémites a déferlé sur Internet, insinuant absurdement que ceux d’entre nous qui critiquions Israël et ses exactions à cette époque auraient incité deux membres de l’EI à commettre un acte terroriste. Comme si l’EI n’était qu’une bande d’adorables oursons jusqu’à ce que des influenceurs australiens publient des tweets haineux à l’encontre d’Israël.

La page 14 du document, intitulée «Exemples de discours de haine récents au cours des deux mois précédant l’attentat : Sélection de tweets antisémites sur X : Caitlin Johnstone», ne contient que deux tweets. Il est évident que la personne qui les a collectés a simplement effectué des recherches avancées par mots-clés parmi les personnes figurant sur sa liste, car le mot «juif» est surligné dans l’une des captures d’écran. Cela signifie qu’elle a dû ignorer les nombreux tweets que j’ai publiés au fil des ans et qui contredisent le discours antisémite qu’elle tente de construire.

Le premier tweet date du 6 août dernier et présente une capture d’écran du journaliste Owen Jones indiquant que seulement 6,7% des juifs israéliens interrogés se disaient «très préoccupés» par les informations faisant état de famine et de souffrances à Gaza. J’ai légendé la capture d’écran ainsi :

«Sondage après sondage, il apparaît que les juifs israéliens sont des gens horribles, bien plus cruels et immoraux que quasiment n’importe quelle autre population. À un moment donné, il faut cesser de croire que les sondages peuvent se tromper et admettre que la seule véritable erreur, c’est Israël».

Notez que je n’ai pas dit «juifs», mais «juifs israéliens». Sondagesondage, après sondage il apparaît clairement que les juifs israéliens sont des gens horribles, qui adoptent des attitudes sociopathiques envers les Palestiniens, car c’est ce qui arrive lorsqu’on est le groupe privilégié dans un État d’apartheid. Les Sud-Africains blancs étaient eux aussi des gens horribles pendant l’apartheid en Afrique du Sud. On ne peut pas instaurer l’apartheid sans endoctriner la population afin qu’elle considère les groupes marginalisés comme inférieurs au groupe dominant. Le fait que ce soit le cas ne dit rien sur les juifs ou le judaïsme ; c’est simplement le fonctionnement de l’apartheid.

Le deuxième tweet date du 6 octobre dernier et se lit comme suit :

«Quiconque est véritablement et sincèrement préoccupé par la montée de l’antisémitisme s’opposera au massacre d’enfants sous l’étoile de David par un État qui prétend représenter tous les juifs, tandis que des milliardaires juifs achètent les médias pour faire taire toute critique de cet État et que des oligarques juifs achètent ouvertement le président du gouvernement le plus puissant du monde pour faciliter les atrocités commises par cet État».

Je suppose que cela pourrait paraître antisémite si vous ignoriez que tout ce qui suit est parfaitement vrai. Israël a bel et bien perpétré des massacres d’enfants et arbore bel et bien une étoile de David sur son drapeau. Israël prétend bel et bien représenter tous les juifs lorsqu’il affirme que toute critique à son égard est haineuse envers tous les juifs. La famille de Larry Ellison a bel et bien racheté des plateformes médiatiques comme CBS, où la sioniste virulente Bari Weiss a été placée à sa tête, et a pris le contrôle de TikTok après que le Congrès a forcé sa vente pour étouffer toute critique d’Israël. Le président Donald Trump a bel et bien admis à plusieurs reprises être manipulé par la méga-donatrice Miriam Adelson, la femme israélienne la plus riche du monde. Ces dynamiques sont très susceptibles d’alimenter l’antisémitisme de manière très concrète. Je n’en suis pas à l’origine. Ce sont les sionistes qui l’ont créé.

Voilà le meilleur argument du gouvernement israélien pour affirmer que des Australiens comme moi ont incité à l’attentat de Bondi. J’ai tweeté sur le génocide et l’apartheid, ce qui a radicalisé violemment un père et son fils à Sydney. Apparemment, ils ont ensuite inventé une sorte de machine à remonter le temps et sont retournés en 2019 pour rejoindre Daech. Voilà leur principal argument.

Si vous vous demandiez pourquoi j’écris autant sur la fusillade de Bondi Beach, voici la raison. Elle sert à justifier une atteinte virulente à la liberté d’expression et de réunion en Australie. Cette atteinte est orchestrée sous la pression intense du lobby pro-israélien australo-israélien et du gouvernement israélien, qui va jusqu’à dresser des listes publiques officielles d’Australiens qu’il juge coupables de pensée dissidente dangereuse.

Le ministère israélien des Affaires de la Diaspora et de la Lutte contre l’antisémitisme a également publié en septembre dernier un article d’une page me concernant, ainsi que mon travail, intitulé «Antisémitisme et antisionisme en Australie : principaux acteurs, incidents, groupes et tendances». Je me permets de le copier-coller ici, car il me met particulièrement en valeur :

«Caitlin Johnstone est une journaliste indépendante et commentatrice politique australienne. Ses écrits décrivent fréquemment Israël comme un «État d’apartheid génocidaire» et un «projet de colonialisme de peuplement» qui perpétue la violence et l’oppression systémiques. Elle soutient que les actions d’Israël ne sont pas des incidents isolés, mais s’inscrivent dans une stratégie plus vaste visant à maintenir sa domination sur les Palestiniens.

Sur ses réseaux sociaux, Caitlin Johnstone partage fréquemment des contenus fortement anti-israéliens dans le contexte de la guerre en cours à Gaza, tout en omettant généralement toute critique du Hamas. Dans une publication datée du 15 avril 2025, elle a balayé d’un revers de main les inquiétudes des Israéliens quant à leur sentiment d’insécurité, suggérant plutôt que leur malaise provenait d’un sentiment de culpabilité face à ce qu’elle a qualifié de «génocide» à Gaza.

Dans une publication Instagram datée du 7 avril 2025, Johnstone a semblé justifier indirectement l’attaque du Hamas du 7 octobre, déclarant que «le Hamas a réussi à révéler le vrai visage de l’empire». Elle a ensuite mis en avant de prétendues actions israéliennes à Gaza depuis l’attaque, tout en omettant de reconnaître le massacre perpétré par le Hamas».

Son profil comprend également quelques tweets percutants que j’ai écrits, comme : «Être un partisan libéral d’Israël ces jours-ci, c’est probablement comme être l’avocat de la défense d’un meurtrier présumé qui ne cesse de clamer son plaisir à tuer».

Je ne vais pas vous mentir, je prends toute cette attention d’Israël comme un compliment. Se retrouver en tête de la liste noire israélienne est certainement une meilleure preuve que je suis sur la bonne voie que de remporter un prix de «journalisme» occidental minable, comme le Pulitzer.

Mais je ne vais pas non plus faire la dure et prétendre que ça ne me fait pas flipper d’être surveillée par cet État ethnique meurtrier. Israël est vraiment flippant.

Bref, j’en profite pour rappeler à tout le monde que je suis une auteure entièrement financée par le public. Alors, si vous aimez me voir agacer le gouvernement israélien, vous pouvez toujours me donner un petit coup de pouce pour soutenir mon petit projet. Petit rappel aussi : pour être sûr de ne rien manquer de mes publications, le mieux est de vous inscrire à ma liste de diffusion gratuite, qui le restera toujours, que vous soyez ou non contributeur.

Merci de m’avoir accompagné dans cette aventure insolite.

source : Caitlin Johnstone via Marie-Claire Tellier

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