L'Italie a envisage de rétablir sa monnaie nationale
source : Sputnik
En 2017, l'économie italienne a affiché une croissance économique de seulement 1,5%, alors que la moyenne dans toute la zone euro s'élevait à 2,5%.
Au total, ce seraient plus de 100 milliards d'euros qui manqueraient au budget, sachant que la dette publique de l'Italie s'élève à 131,8% du PIB — l'indicateur le plus élevé en UE après la Grèce. Or selon les règles de l'UE, la dette publique ne doit pas dépasser 60% du PIB.
Les Italiens avaient envisagé de menaceer Bruxelles de quitter la zone euro pour revenir à la lire si l'UE ne se pliait pas à leurs exigencies, Le brouillon d'accord de coalition entre les partis 5 Étoiles et Ligue prévoyait même des procédures techniques concrètes qui permettraient de se séparer de l'euro et de rétablir la souveraineté monétaire.
Ainsi, pour bénéficier du soutien financier de l'UE, la Grèce a-t-elle été contrainte d'augmenter les impôts, de réduire les programmes sociaux et d'organiser des ventes d'actifs nationaux. Au final, le port du Pirée appartient aujourd'hui aux Chinois et les Allemands possèdent une compagnie de communication grecque.
«C'est comme une occupation: ils ont capturé notre pays, s'indigne la professeure d'architecture Eleni Portaliou. Les investisseurs étrangers sont comme des vautours: ils savent que nous sommes forcés de vendre nos richesses nationales, et les créditeurs veulent seulement obtenir de l'argent au plus vite. C'est pourquoi les prix deviennent dérisoires et nous perdons sur tous les fronts. Les investisseurs étrangers paieront seulement 900 millions d'euros pour Hellinikon, tandis que les experts indépendants ont évalué ce terrain à au moins 3 milliards.»
Enfin, en répondant favorablement à la requête de Rome, l'UE créerait un dangereux précédent dont ne manqueraient pas de profiter les autres pays qui éprouvent des problèmes budgétaires — l'Espagne et la France. Par conséquent, Bruxelles ne fera pas de concessions à l'Italie.
source : Sputnik
Dans un document de travail provisoire traitant de son programme économique, le gouvernement italien a caressé le projet de demander à l'UE d'effacer 250 milliards d'euros de dette publique et de libérer le pays de plusieurs restrictions. Sinon, Rome aurait menacé de sortir de la zone euro pour revenir à la lire italienne.
Les chefs des partis Mouvement 5 Étoiles et Ligue, qui ont obtenu le plus grand nombre de voix aux élections du 4 mars, ont convenus des principes fondamentaux de la politique économique du gouvernement de coalition. Ils sont persuadés que ce ne sont pas les recettes libérales qui garantiront la sortie de la stagnation économique, mais les «investissements» et la «stratégie expansionniste».
Les exigences de Rome
Au premier trimestre, la croissance italienne a ralenti jusqu'à 1,4% en glissement annuel, alors qu'au sein de l'UE elle restait stable à 2,5%.
Pour redresser la situation, les dirigeants des partis vainqueurs préconisent le recours à plusieurs stimulations fiscales allant à l'encontre des principes d'austérité de la Banque centrale européenne (BCE). Ces idées révolutionnaires sont très onéreuses.
La baisse des impôts sur le revenu pour les entreprises et les particuliers à 15% augmentera significativement leurs capacités d'investissement, tout en réduisant les revenus budgétaires de 80 milliards d'euros par an. L'abandon de la réforme des retraites diminuerait la tension sociale, mais ferait perdre 15 milliards supplémentaires au budget. Et le refus d'augmenter l'impôt sur les ventes encore 12,5 milliards.
© AFP 2018 MARTTI KAINULAINEN / LEHTIKUVA
Les Italiens sont conscients qu'en transgressant une règle ils en enfreignent une autre — sur le montant du déficit du budget public qui ne doit pas dépasser 3% du PIB. Pour l'instant, la situation est tolérable: d'après l'agence nationale des statistiques Istat, le déficit du budget italien se chiffrait à 2,3% du PIB en 2017. Mais si les plans annoncés étaient mis en œuvre, cet indice dépasserait considérablement la barre des 3%.
C'est pourquoi les leaders des principaux partis ont envisage dans un document de travail provisoire de poser deux exigences à l'UE: premièrement, la BCE devait annuler 250 milliards d'euros de la dette publique italienne; deuxièmement, elle devait lever les restrictions sur le niveau de la dette publique et du déficit budgétaire qui, selon les Italiens, n'existent plus que sur le papier depuis longtemps. «Cela fait dix ans que la France dépasse le plafond du déficit, la dette de la France et de l'Espagne est supérieure à 60% du PIB», rappelle le représentant économique de la Ligue Claudio Borghi.
Les marchés ont pris ces déclarations très au sérieux: le rendement des obligations italiennes sur 10 ans a augmenté de 16 points de base en une journée — un record depuis 14 mois. Le principal indice boursier italien FTSE MIB a chuté de 3,5% en deux jours et continue de baisser: autrement dit, les investisseurs vendent les actions des compagnies italiennes.
Le M5S et La Ligue ont depûis établi un programme commun qui tourne résolument le dos à l’austérité et aux «diktats» de Bruxelles. Dans la version finale de ce programme, validée par 90% des militant des deux partis, ils ont cependant abandonné l’idée d’une sortie de l’Italie de la zone euro, et d’effacer une partie de la dette italienne, ce qui a quelque peu rassuré les marchés financiers.
Que dira l'UE cette fois?
La démarche inattendue des Italiens place Bruxelles dans une position très compliquée. Il est évident que l'UE ne pouvaitpas accepter ces conditions: cette dernière estime que les problèmes budgétaires doivent être réglés par la réduction des dépenses, les réformes libérales et la privatisation des biens publics.
Des ports, des îles, des compagnies d'électricité et de gaz, de grands terrains, y compris la région de l'ancien aéroport près d'Athènes, Hellinikon — avec des plages, des parcs, des forêts et une multitude de monuments antiques — ont été mis en vente.
L'UE est complètement satisfaite du résultat: fin avril, Pierre Moscovici, commissaire européen à l'économie et aux finances a déclaré que le programme d'aide extérieure à la Grèce se terminerait en août 2018. Et d'ajouter: «Finir le programme grec serait un symbole que nous avons mis la crise derrière nous. Et puis, surtout pour les Grecs, ce sera la bonne nouvelle que ce pays est lui aussi sorti de sa crise et est capable de créer de la croissance et de l'emploi.» Mais les Grecs ne s'empressent pas de se réjouir.
Pas étonnant, donc, que les Italiens ne veuillent pas suivre le chemin de la Grèce.
Un trou dans le budget
De plus, même si l'UE se pliait aux exigences de l'Italie, cela ne fonctionnerait pas à cause de ses propres problèmes financiers. Le Brexit prive en effet l'UE de son troisième plus grand donateur: le Royaume-Uni versait 12,76 milliards d'euros au budget européen commun et ne recevait que 7,05 milliards de dotations. En d'autres termes, cela forme dans le budget européen un trou de presque 6 milliards d'euros. Les tentatives de Bruxelles de le combler en faisant augmenter la cotisation des autres membres rencontrent une très forte opposition.
Ainsi, lors d'un récent débat sur le projet de budget de l'UE pour 2021-2027, Stef Blok, le ministre néerlandais des Affaires étrangères a indiqué que la «proposition d'augmenter les cotisations était inadmissible» pour son gouvernement. Il a été soutenu par le Premier ministre danois, Lars Løkke Rasmussen, qui a noté qu'une «UE réduite aura également besoin d'un budget réduit».
Un discours similaire a été tenu par le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, et la ministre suédoise des Finances, Magdalena Andersson, qui a qualifié le nouveau projet de budget européen de «déraisonnable». Si 6 milliards d'euros suscitent de tels litiges, alors on s'imagine facilement quel scandale éclaterait si l'on parlait de 250 milliards…
D'un autre côté, les Italiens auraient pu, eux aussi, ne pas céder: le nouveau gouvernement n'a aucune chance de redresser la situation économique avec la politique budgétaire actuelle. Et l'exemple du Royaume-Uni montre qu'il est possible de réduire à un niveau tolérable les frais de séparation avec l'UE en se débarrassant au final d'une multitude de problèmes, notamment migratoires. De cette manière, le scénario de sortie de l'Italie de la zone euro paraît plausible.
En février, les experts de l'Economist Intelligence Unit, département analytique du magazine The Economist, ont inscrit l'éventuel éclatement de la zone euro dans le top-10 des principaux risques pour l'économie mondiale. «Le risque de sortie de la Grèce de la zone euro à moyen terme persiste, tandis que les problèmes économiques pourraient pousser l'Italie à sortir de la zone euro. La sortie des pays en crise de la zone euro entraînerait une forte dévaluation de leur monnaie et leur incapacité à rembourser leur dette en euros. Tout cela pourrait plonger l'économie mondiale dans la récession», estiment les analystes.
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