Un Français crée la carte bancaire « citoyenne et solidaire » pour virer Visa/Mastercard
Pour s’en prendre aux géants Mastercard, Visa et American Express, les trois principales entreprises mondialisées de paiement, et développer un modèle alternatif plus solidaire « au service des populations et de l’environnement », Lucas Duchaine, un jeune français, s’apprête à lancer son alternative aux cartes de paiement classiques. Le projet, intitulé Sylha, applique un modèle comparable à celui du moteur de recherche Lilo et fera ses premiers pas à Grenoble à partir du 13 juin prochain. Interview et explications.
Mr Mondialisation : Sylha est un projet qui veut apporter une alternative aux moyens de paiement classiques que sont la carte de crédit et la carte de débit Visa, MasterCard et American Express. Pourquoi ?
Lucas Duchaine : Sur un paiement par carte bancaire de 10€, le commerçant doit reverser plusieurs centimes à des institutions financières. En France, ces frais de transaction cumulés s’élèvent à plus de 4 milliards d’euros par an. Sylha développe le premier réseau de monétique social et solidaire du monde avec un nouveau moyen de paiement sans contact matérialisé par une pièce de monnaie connectée à un porte-monnaie électronique, des nouveaux terminaux de paiement et une place de marché virtuelle où il est possible de stocker son argent de manière sécurisée. Sylha fait en sorte de reverser ces frais de transactions (4 milliards d’euros) à des associations.
Alors, pourquoi apporter une alternative à la carte bancaire ? Sylha propose un produit et un service à bas coûts où chacun a le choix de participer sans trop d’efforts à rééquilibrer économiquement notre société, réduire les inégalités de richesses de manière automatique, régulière et gratuite en permettant aux acteurs engagés d’avoir plus de moyens financiers et répondre unanimement aux urgences, entre autres, écologiques de notre époque. Si nous ne changeons pas la philosophie politico économique de notre société, nous ne pourrons jamais mobiliser les ressources nécessaires pour sauver l’environnement et la Terre, ainsi que toutes les espèces qui y vivent. Pour changer d’économie, Sylha crée une nouvelle place économique virtuelle, avec de nouveaux outils de paiement où l’argent est au service des populations et de l’environnement.
Mr Mondialisation : Concrètement, quelle forme prendra votre alternative ?
Lucas Duchaine : Concrètement, vous achetez la pièce de monnaie pour 15 € (achat à vie), nous vous créons un porte-monnaie électronique. Vous créditez de l’argent de votre compte bancaire vers ce compte virtuel sécurisé. La pièce possède une puce RFID passive contenant des informations d’identification cryptées qui permettent de la relier à ce porte-monnaie électronique. Quand vous payez chez un commerçant avec Sylha, instantanément, la transaction génère des points que l’on vous reverse. Vous pouvez ensuite vous connecter sur votre espace Sylha pour redistribuer ces points à des organisations à but non lucratif présentes sur notre plateforme de financement démocratique. À chaque fin de mois, nous estimons la valeur financière de chaque point et nous reversons cet argent aux projets que vous avez choisis (même principe que « Lilo » ou « prizle »). Les associations bénéficiaires obtiennent gratuitement, régulièrement et automatiquement des financements tous les mois sans remplir des dossiers interminables de subventions chaque année. Sur data.gouv.fr, un fichier montre que le montant des subventions annuelles de l’État en 2012 pour les associations s’est élevé à 1,8 milliards d’euros. Avec Sylha, nous parlons d’un potentiel de plus de 4 milliards d’euros. Si nous triplons les financements des associations d’écologies, des associations d’aides aux réfugiés et aux SDF, des associations humanitaires, des associations de réinsertion professionnelle, des associations culturelles, bref, de manière générale des petites associations locales qui œuvrent à leur échelle, nous pouvons comprendre l’impact direct économico-social que Sylha et son écosystème pourraient avoir sur les territoires.
Le commerçant lui, peut se munir de notre terminal de paiement en échange d’un chèque de caution de 160€ qui sera encaissé. Il définit le taux des frais de transaction avec un minimum de 0,4%. Nous avons à l’heure actuelle, 70 % de taux d’acceptation chez les commerçants. Le commerçant reçoit son terminal, l’active avec un mot de passe sécurisé et le connecte à son wifi sécurisé. Il appelle son opérateur de caisse enregistreuse pour ajouter le bouton « Paiement Sylha » sur sa machine pour avoir une comptabilité simplifiée. Une carte SIM 4G pourrait être demandé par le commerçant moyennant 20€ par mois dans le cas où il n’y a pas de connexion internet sur place. Le commerçant apparait alors sur notre site internet lui permettant d’avoir une visibilité supplémentaire, et qui plus est, lui procure une image sociale et solidaire.
Pour les associations bénéficiaires, elles remplissent un formulaire en ligne de présentation de leur projet pour que nous puissions les mettre en contact avec un essaim du mouvement « Mÿ generation », proche de leur siège social. Après un premier contact, un accord de principe est passé. Ces structures bénéficiaires auront une liste non exhaustive d’actions possibles à accomplir pour aider le mouvement dans son développement. Les associations motivées, les pépinières ou les mouvements déjà existants pourront animer le mouvement dans leur région. En échange de ces actions, ces structures pourront rentrer dans le capital de Sylha à hauteur minimum de 100 € via une campagne de financement participatif « Lita » que nous mettrons en place courant 2018. Ainsi, tout bon résultat de Sylha permettra de reverser les dividendes aux structures associatives actionnaires et indépendantes. Nous créons une boucle économique où le capital nourrit le social et le solidaire. De cette manière, nous sommes ainsi unis dans la réussite.Les entreprises n’ayant pas de liens directs avec le consommateur peuvent rejoindre le mouvement en réalisant un don à l’association partenaire de Sylha en charge du mouvement. Cette association aura la responsabilité de former les associations bénéficiaires, coordonner les essaims et organiser au niveau national le mouvement dans les différentes régions. Tous citoyens et toutes structures juridiques pourront ainsi participer de près ou de loin à faire évoluer notre système économique vers plus d’éthique et plus de partage pour laisser cette philosophie du « toujours plus » de côté, au moins en partie.
Mr Mondialisation : Dans un secteur dominé par trois multinationales, comment voulez-vous faire pour vous faire une place ?
Lucas Duchaine : Nous avons effectué plusieurs expérimentations à la Belle Electrique, une salle de concert Grenobloise en 2017. Nous avons démarré nos tests en février 2017, lors d’une soirée, puis sur plusieurs dates d’affilées et enfin non-stop sur 2 mois dans des conditions techniques contraignantes. Ces expériences fructueuses et la manière dont elles ont été conduites nous ont permis d’avancer raisonnablement, avec cohérence et patience.
Lucas Duchaine : Nous avons effectué plusieurs expérimentations à la Belle Electrique, une salle de concert Grenobloise en 2017. Nous avons démarré nos tests en février 2017, lors d’une soirée, puis sur plusieurs dates d’affilées et enfin non-stop sur 2 mois dans des conditions techniques contraignantes. Ces expériences fructueuses et la manière dont elles ont été conduites nous ont permis d’avancer raisonnablement, avec cohérence et patience.
Le 13 juin 2018 nous lançons Sylha à Grenoble dans plusieurs dizaines de commerces. À partir de cette date, nous débutons avec une association partenaire un mouvement économico-social pour mobiliser tous les acteurs d’une société (public, privé, associations, citoyens) afin qu’ils participent au développement de ce premier réseau monétique social et solidaire régénérateur de sens. Une poignée de personnes motivées dans chaque ville peut renverser la tendance économique néolibérale en France en créant avec ce mouvement une antenne indépendante dans leur région. Par l’organisation de réunions d’informations, ces groupes de personnes pourront diffuser pédagogiquement les messages, répondre aux questions et dynamiser un tout nouveau réseau d’acteurs sociaux et solidaires. Nous allons créer une communauté autour de Sylha et du mouvement appelé « Mÿ generation ». À partir de 2019, cette communauté sera très régulièrement et numériquement sollicitée sur des sujets sensibles pour amener le citoyen à débattre et prendre conscience des enjeux actuels. Les thématiques porteront par exemple sur les données personnelles, l’intelligence artificielle, le système économique et l’organisation démocratique. Nous voulons devenir la première « Open entreprise » du secteur financier afin de respecter au mieux la transparence sur nos activités et montrer notre représentation des entreprises du futur.
Avec ces éléments, je peux répondre à la question : nous avançons étape par étape pour assurer la cohérence de nos valeurs et la sécurité de notre système. Nous nous déployons grâce à des groupes indépendants formés dans chaque ville et nous créons une communauté qui, par l’utilisation de Sylha, finance des associations à défaut des institutions financières, participe à des débats sur des questions fondamentales basées sur des données récoltées et relatives aux activités de Sylha. Il est clair alors que nous ne voulons pas nous faire une place dans ce secteur, nous nous la créons.
Mr Mondialisation : Vous parlez d’un financement démocratique, pouvez-vous expliquer ?
Lucas Duchaine : Nous devons faire évoluer notre système démocratique. Nous devons changer de régime politique en utilisant les nouveaux outils du numérique. La génération Y et les Millennials ont désormais une conscience du monde bien différente avec les compétences et les expériences professionnelles suffisantes pour créer une société plus stable et équilibrée.
En récupérant les frais de transaction (4 milliards d’euros) pour les reverser à des associations, Sylha met à disposition une somme conséquente d’argent à nos utilisateurs pour qu’ensemble, ils décident de verser un budget qui ne leur appartiennent pas, à un projet qui leur semble nécessaire de mettre en œuvre près de chez eux. Sylha pose la première brique expérimentale d’une toute nouvelle organisation de société. Petit à petit l’état d’esprit de la génération Y et des Millennials se cristallise dans les rouages profonds de notre société. Cet état d’esprit prend constamment en considération l’Homme, la Nature et la Science comme fondement pour construire un équilibre entre ces éléments. C’est en donnant la parole à cette jeunesse et en nous aidant financièrement que nous pourrons nous émanciper. Avec cette plateforme de financement démocratique, Sylha va tout simplement permettre d’accélérer considérablement le déploiement de projets porteurs de sens tout en respectant entièrement le principe de démocratie puisque, ce n’est plus seulement les grandes institutions, l’état, les multinationales ou les grandes entreprises qui auront le monopole d’investir dans les projets mais bien tous les citoyens du mouvement « Mÿ generation » et les utilisateurs de Sylha.
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