Le président Trump a de nouveau fait dérailler les négociations avec la Corée du Nord. Il sera difficile de les remettre sur les rails. En raison de son attitude, il est peu probable qu’une entente soit conclue.
Mardi soir, la Corée du Nord a menacé d’annuler le sommet avec le président étatsunien Trump. Les remarques du conseiller étatsunien à la sécurité nationale Bolton selon lesquelles le « modèle libyen » s’appliquerait à la Corée du Nord ont été considérées comme une insulte.
La Libye avait acheté de l’équipement qui aurait pu être utilisé pour commencer l’enrichissement de l’uranium. Mais elle n’a jamais eu de programme coordonné de développement d’armes nucléaires et n’a jamais eu la base industrielle et académique pour poursuivre un tel projet. Pour échapper aux sanctions, la Libye a renoncé au peu de matériel dont elle disposait. Tout a été expédié aux États-Unis avant la levée des sanctions. Bolton n’a probablement fait référence qu’à cette partie du « modèle libyen ».
Mais il y a aussi l’autre partie. Quelques années après que la Libye ait renoncé à ses minuscules armes nucléaires, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis (FUKUS ou FGBUS) ont mené une guerre de changement de régime contre elle. Via l’entremise des États-Unis (et de la France, NdT), Muhammad Kadhafi a été assassiné par des islamistes radicaux et Hillary Clinton s’en est même gaussée (vidéo). La Libye s’est depuis lors transformée en un chaos total et une guerre tribale multiforme avec une ingérence étrangère continue.

La Corée du Nord rejette naturellement les deux parties du modèle libyen. Elle se considère, à juste titre, comme un État nucléaire à part entière. Elle exige des négociations sur un pied d’égalité.
Mercredi, après la menace nord-coréenne d’annuler le sommet, le porte-parole de la Maison-Blanche a désavoué le « modèle libyen » de Bolton :
    Se référant à la comparaison avec la Libye, l’attachée de presse de la Maison-Blanche, Sarah Sanders, a déclaré mercredi qu’elle n’avait pas « vu cela dans le cadre des discussions et je ne suis donc pas au courant que c’est un modèle que nous utilisons. »
    « Je ne le conçois pas comme cela, c’est une chose spécifique. Je sais que ce commentaire a été fait. Il n’y a pas de modèle systématique sur la manière dont cela devrait se passer. »
Le train pour le sommet étatsuno-coréen semblait à nouveau sur ses rails. Puis Donald Trump l’a encore fait déraillé.
Lors d’une conférence de presse hier, il a été interrogé sur la question du « modèle libyen » (vidéo) et, dans une remarque apparemment improvisée, il a réussi à pousser la comparaison qui divise à un nouveau niveau :
    « Le modèle, si vous regardez ce modèle avec Kadhafi, c’était une décimation totale. On y est allé pour le battre. Maintenant, ce modèle aura lieu si nous ne concluons pas d’accord, très probablement. Mais si on fait un marché, je pense que Kim Jong-Un va être très, très heureux. »
On pourrait appeler cela « l’art d’un accord mafieux » : « Signez ici ou je vous tue. »
A mon sens, les propos de « décimation totale » est bien plus qu’un « avertissement ».
Le Guardian britannique avait un point de vue plus réaliste : Donald Trump menace Kim Jong-un : conclure un marché ou subir le même sort que Kadhafi.
La menace de Trump montre que la Corée du Nord a eu raison d’acquérir des armes nucléaires et la capacité de les lancer sur le continent étatsunien. Les abandonner serait suicidaire.
Trump a également marmonné qu’il donnerait de « fortes assurances » à la Corée du Nord et à Kim Jong-un pour leur sécurité s’ils concluaient un accord. Il n’a pas expliqué quelles seraient ces assurances. La façon dont Trump a détruit l’accord nucléaire avec l’Iran, qui a reçu de « fortes assurances » de la part d’un président étatsunien et de l’approbation du Conseil de sécurité de l’ONU, démontre qu’aucune des assurances données par les États-Unis,  même sur le papier, n’a de valeur.
Lorsque le sommet a été annoncé, je lui ai donné peu de chances de réussir parce qu’il y avait trop de fauteurs de trouble potentiels ayant des intérêts pour que le conflit avec la Corée du Nord se poursuive. Il s’agit notamment de John Bolton, de l’armée étatsunienne et du président japonais Abe.
La Corée du Nord répondra certainement à la menace de « décimation totale » de Trump. Elle se retirera probablement du sommet, prévu pour le 12 juin à Singapour.  Elle pourrait revenir si la Maison Blanche revient sur les remarques de Trump. La Chine, qui incite la Corée du Nord et les États-Unis à conclure un accord, fera savoir à la Maison-Blanche ce qu’elle doit faire.
Mais je crois maintenant que le sommet, s’il a lieu, n’a aucune chance de réussir. Trump n’a aucune connaissance des détails politiques et techniques et n’a aucun sens de la culture asiatique. Il soufflera, soufflera et insultera son partenaire de négociation. Il exigera probablement le désarmement nucléaire total de la Corée du Nord. Il n’aura pas d’accord.
Ce n’est qu’après cet échec qu’il apprendra qu’une « décimation totale » de la Corée du Nord n’est pas une option qu’il peut suivre.
Moon of Alabama
Traduction SLT
source:http://le-blog-sam-la-touch.over-blog.com/2018/05/la-recente-menace-de-trump-envers-la-coree-du-nord-rend-un-accord-impossible-moon-of-alabama.html

(Cela peut provoquer une vague d'épuration en Corée du Nord. En tout cas, c'est ce que je ferais par précaution. En fait, c'est comme si, trump, cherchait à saboter les négociations entre les deux Corée qui ne doivent pas plaire aux faucons du pentagone, plus enclins à chercher la confrontation militaire. note de rené)