La police indienne tue onze militants écolos
MARIE-NOËLLE BERTRAND
VENDREDI, 25 MAI, 2018
L'HUMANITÉ
Dans le sud du pays, les forces de l’ordre ont tiré sur la foule exigeant la fermeture d’une filiale du géant minier britannique Vedanta accusée de polluer.
Morts pour s’être opposés à une usine polluante : au moins onze personnes ont été tuées par la police dans l’État du Tamil Nadu, au sud de l’Inde, alors qu’elles manifestaient contre les exactions environnementales d’une fonderie de cuivre. Le drame s’est déroulé mardi et mercredi, dans la ville de Tuticorin, où près de 20 000 personnes étaient venues exiger la fermeture de Sterlite Copper, filiale de la multinationale britannique Vedanta. Largement implantée en Inde, celle-ci est depuis longtemps l’objet de polémiques, tant pour la pollution engendrée par ses usines que pour les conditions de sécurité au travail. Le site de Tuticorin, singulièrement, est la cible d’une bataille vieille de plus de vingt ans, laquelle s’est intensifiée récemment, alors que Sterlite tente d’obtenir le droit de doubler ses capacités de production.
Selon la police de Tuticorin, les contestataires rassemblés cette semaine auraient agi tels des émeutiers, ne laissant d’autre choix que le recours à la force.
« Nous avons tiré en l’air à balles réelles pour (les) disperser. Mais (ils) ont continué à lancer des bombes et des engins incendiaires », expliquait, mercredi, un responsable des forces de l’ordre à l’AFP. « Nous avons été forcés de tirer des balles en caoutchouc, qui ont malheureusement touché un homme à la colonne vertébrale, et il est mort. » Dix autres personnes avaient déjà été abattues la veille.
La version de l’enchaînement des faits est loin de faire l’unanimité. S’ils témoignent de leur détermination à venir à bout de l’usine, les militants réfutent toute volonté insurrectionnelle. « Cela fait vingt-trois ans que nous luttons », explique ainsi Fathima Babu, dont les paroles écrites sont relayées par les réseaux citoyens. « Nous devions nous assurer que Sterlite soit sortie de notre ville, à cause de tous ces morts (qui lui sont imputés) partout. Il n’y avait aucune intention de violence. »
Quoi qu’il en soit, le gouvernement du Tamil Nadu a fait suspendre le réseau Internet dans tout le district, relevant, dans le courrier adressé à ses services de communication, que les réseaux sociaux avaient grandement contribué au rassemblement massif de militants.
La police de la ville aura à « répondre à beaucoup de questions », a réagi pour sa part Amnesty International, tandis que plusieurs universitaires, cancérologues ou autres professeurs rappellent l’urgence d’imposer aux industriels le respect des réglementations environnementales en Inde. À elle seule, la mauvaise qualité de l’air y tue prématurément 1,1 million de personnes par an.
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