« Il était encore vivant » : un médecin témoigne sur les prélèvements forcés d’organes en Chine
« Il saignait. Il était encore vivant », a révélé le médecin chinois Enver Tohti à une table ronde d’experts sur la pratique lucrative des prélèvements d’organes sur les prisonniers de conscience en Chine.
Le 6 juillet dernier, le Comité conjoint des Affaires étrangères, du Commerce et de la Défense d’Irlande a tenu une table ronde pour entendre les témoignages présentés par les experts sur le trafic d’organes, dont David Matas et Ethan Gutmann, nominés pour le Prix Nobel de la paix pour leurs enquêtes en Chine.
La table ronde a présenté au comité une série de recommandations, exhortant les gouvernements à interdire le tourisme de transplantation d’organes – une pratique extrêmement lucrative principalement en Chine.
Les principales victimes des prélèvements d’organes pour alimenter ces transplantations sont les pratiquants de Falun Gong – une discipline traditionnelle chinoise d’exercices et de méditation basée sur les principes d’authenticité, de bienveillance et de tolérance. En 1999, le Parti communiste chinois (PCC) a lancé une persécution cruelle contre ces pratiquants, qui se poursuit encore aujourd’hui.
Des centaines de milliers de pratiquants sont retenus dans un vaste réseau de prisons et de camps dans toute la Chine, où ils peuvent être mis sur la liste des donneurs d’organes contre leur volonté.
Le tourisme de transplantation est déjà interdit en Israël, à Taïwan, en Italie et en Espagne. Ethan Gutmann a expliqué que ces pays l’ont interdit par souci « d’intégrité, par sensibilité à la tragédie humaine, par une sagesse ancestrale qui tient compte que les grands acteurs de la scène internationale pourraient ne pas réagir à cette tragédie mondiale ».
M. Gutmann a poursuivi en insistant sur le fait qu’il s’agit d’une période critique et qu’il faut agir aujourd’hui.
Le Dr Tohti a évoqué une opération de prélèvement d’organes qu’il avait effectuée dans les années 1990, pensant qu’il accomplissait son devoir « d’éliminer les ennemis de l’État ».
« Chaque fois que je parle de cela, c’est comme si je faisais une confession », a-t-il fait valoir, avant de se prononcer devant le comité.
Il a décrit comment on devient un esclave complaisant dans la société chinoise sous le régime communiste, un « membre de la société entièrement programmé, prêt à accomplir une tâche sans poser de questions ».
Il a déclaré qu’en 1995, deux chirurgiens en chef lui avaient demandé de constituer une équipe pour effectuer « la plus grande opération possible » le lendemain matin.
Enver Tohti et son équipe ont été amenés à l’extérieur de l’hôpital. On leur a demandé d’attendre que les coups de feu éclatent.
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« Après avoir entendu les coups de feu, nous nous sommes précipités à l’intérieur. Un officier armé nous a dirigé vers un coin, où j’ai aperçu un homme en civil allongé au sol avec une seule blessure par balle du côté droit de la poitrine », a poursuivi le Dr Tohti.
Ensuite, les chirurgiens en chef lui ont donné l’ordre de prélever le foie et les reins de la victime. « L’homme était encore vivant », a-t-il déclaré, expliquant que le blessé essayait de résister mais était trop faible.
Dans la plupart des pays, lorsqu’un patient est mis sur une liste pour obtenir une greffe d’organes, le temps d’attente peut durer des mois ou des années, selon le type d’organe. Toutefois, les chercheurs ont trouvé que pour les patients voyageant pour une greffe en Chine, un organe compatible peut être fourni en seulement quelques jours ou quelques semaines.
L’un des principaux facteurs qui motive le commerce d’organes dans le cadre du tourisme de transplantation est la forte demande.
Le Dr Tohti a décrit la nature odieuse du commerce d’organes en Chine, faisant référence aux termes qui figuraient sur les sites de transplantation chinois, tels que « stock illimité » ou comment « avancer la date de votre transplantation cardiaque ».
« Il est inacceptable que des offres commerciales promotionnelles du genre ‘deux pour le prix d’un’ puissent être pratiqués concernant la transplantation d’organes », a-t-il martelé.
Enver Tohti a également mentionné les récents rapports sur les examens de santé gratuits effectués dans la région du Xinjiang afin « d’améliorer la qualité de vie des Ouïghours ».
« Nous soupçonnons que le Parti communiste chinois est en train d’établir une base de données nationale pour le commerce d’organes », a-t-il précisé. Les Ouïghours sont une minorité ethnique musulmane également réprimée par le PCC. Selon des rapports, ils seraient aussi ciblés pour les prélèvements d’organes.
MM. Gutmann et Matas ont révélé dans leur dernier rapport de 700 pages publié il y a à peine un an, qu’il y aurait « entre 60 000 et 100 000 transplantations effectuées annuellement » en Chine.
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