Syrie: les Kurdes et les Américains vers une désunion
Dans un nouvel article paru dans le journal Rai al-Youm, l’éditorialiste Abdel Bari Atwan se penche sur les prochains pourparlers de paix, un tournant décisif de la crise en Syrie.
Les chances d’une réussite de ce nouveau tour sont grandes, car un vrai processus politique de sortie de crise s’est mis en marche à Sotchi où la Russie, la Turquie et l’Iran se sont entendus mercredi 22 novembre sur la tenue d’un « congrès national syrien », réunissant en Russie le gouvernement et l’opposition. Une initiative à laquelle Damas a apporté son soutien.
Mais où se situent les États-Unis, l’Arabie saoudite et le Qatar dans ce processus ? Conscients des dégâts considérables que leur présence causait et de l’imminence du danger d’une confrontation avec la Russie, les parties saoudienne et qatarie se sont retirées du circuit syrien. Profondément affectées par la détérioration de leurs relations, elles ne pouvaient pas tenir tête à une Russie devançant haut la main les puissances mondiales en matière politique et militaire. D’autre part, les États-Unis se trouvent dans une situation scabreuse et peinent à avouer leur défaite.
La semaine dernière, James Mattis, secrétaire américain à la Défense, a été interrogé sur le renforcement des troupes américaines et des cadres administratifs en Syrie, alors que Daech est en fin de parcours et que 95% des territoires assiégés en Irak et en Syrie ont été libérés. En guise de réponse, il a eu recours à la langue de bois, soulignant que la présence militaire américaine était indispensable tant que le gouvernement syrien et l’opposition n’auraient pas accédé à une solution politique. Pourtant, le Washington Post avait révélé que la décision de renforcer les troupes américaines au nord de la Syrie faisait partie d’un plan pour contrecarrer l’influence grandissante de l’Iran : là où les Forces démocratiques syriennes (FDS) à majorité kurde sont formées et entraînées par les Américains.
Nous ne pensons pas que l’administration de Donald Trump puisse maintenir sa présence en Syrie, à quelque endroit qui soit, même s’il décuple ses forces, qui seront une proie facile pour les forces alliés en Syrie à savoir la Résistance, le Hezbollah libanais, le CGRI iranien et les Hachd al-Chaabi (Forces de mobilisation populaire d’Irak). D’autant plus que les combattants de la Résistance syrienne ont soif d’une guerre de guérilla avec les États-Unis comme à l’époque de l’invasion de l’Irak, voire une guerre encore plus périlleuse.
Les FDS implantées au nord de la Syrie ont saisi la situation future et réalisé qu’il n’est plus utile de s’en tenir aux promesses de soutien des États-Unis. C’est pourquoi elles envisagent de rallier le camp des vainqueurs. Riad Darar, chef du conseil des FDS, a déclaré dimanche dans une interview avec la chaîne kurde Rudaw que ses forces rejoindraient les rangs de l’armée syrienne dès qu’une solution politique à la crise serait opérationnelle.
Or, les Kurdes syriens se détachent de leurs alliés américains avant même que ces derniers ne les délaissent. L’expérience des Kurdes irakiens dans le courant du référendum sur l’indépendance du Kurdistan irakien et celle du parti des « Unités de protection du peuple » des Kurdes de Syrie, trahis par l’administration Trump, leur a servi de leçon.
Les pourparlers de Genève de mardi ne seront qu’un festival. Les vraies festivités se dérouleront à Sotchi où se réuniront les représentants de plus de 40 partis, groupes et tribus aux côtés de ceux du gouvernement syrien, pour composer la nouvelle Constitution de la Syrie et déterminer la date des prochaines élections présidentielles et législatives.
L’approbation de Damas à la tenue de ce congrès de dialogue national syrien ne peut que présager des résultats tournant en sa faveur.
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