(Adieu l'Amazonie, fallait bien qu'ils réussissent à la raser un jour. Restera des morceaux au Pérou et en Equateur. Au fait, trump, ils pensent quoi que les multinationales rasent la forêt amazonienne ? note de rené)
Ultra-libéral, pro-pesticides et climatosceptique : le nouveau gouvernement brésilien de Bolsonaro
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Élu avec 55 % des voix le 28 octobre, le nouveau président du Brésil, Jair Bolsonaro entrera officiellement en fonction le 1er janvier prochain. Il a commencé à composer son gouvernement. Des généraux s’occuperont des ministères de la Défense et de l’Intérieur, un ultra-libéral, issu des « Chicago boys », siègera à l’Economie, une pro-pesticide, liée aux intérêts de l’agro-business, héritera de l’agriculture, un climato-sceptique pro-Trump dirigera la diplomatie… Panorama du futur gouvernement d’extrême-droite.
Depuis son élection à la présidence du Brésil, le 28 octobre, Jair Bolsonaro choisit progressivement les ministres qui composeront son futur gouvernement, avant de prendre officiellement les rênes du pays le 1er janvier 2019. L’une des premières nominations est celle du juge Sergio Moro en tant que ministre de la Justice. Sergio Moro est l’un des magistrats qui a mené la vaste opération anti-corruption Lava Jatolancée en 2014. C’est lui qui a ordonné l’emprisonnement de l’ancien président Lula, quelques mois avant les élections et à l’issue d’un procès pour corruption, dont l’impartialité est contestée. La procédure et la mise en détention ont, en tout cas, été bien plus rapides à l’encontre de Lula que pour les nombreuses personnalités politiques de droite impliquées dans ce scandale. Jusqu’au dernier moment, les sondages d’opinion donnaient Lula largement en tête aux élections s’il avait pu y être candidat.
« Moro tombe le masque », titrait le journal El Pais Brasil dans un éditorial quelques jours après cette nomination. « Pendant les quatre ans qu’a duré l’instruction [de l’opération anti-corruption Lava Jato], le juge a montré clairement en des occasions variées qu’il agissait pour des motivations politiques, affectant le processus électoral, principalement contre le parti des travailleurs », le parti de Lula et de l’ancienne présidente destituée en 2016 Dilma Roussef. Selon certains juges fédéraux, le magistrat avait d’ailleurs largement outrepassé ses fonctions, et aurait dû être sanctionné. « Moro a toujours nié avoir des motivations différentes de celle du droit ou de la loi, et toujours dit qu’il ne quitterait pas la magistrature pour faire de la politique », rappelle El Pais. C’était avant l’élection de Bolsonaro.
Un ultra-libéral à l’Économie
Comme ministre de l’Économie, le nouveau président d’extrême-droite a choisi Paulo Guedes, son conseiller économique pendant la campagne. Paulo Guedes est cofondateur d’une banque d’affaires, BTG Pactual, et d’un think tank économique néolibéral, l’institut Millenium. Le banquier ministre a étudié aux côtés des "Chicago Boys" à l’université de Chicago, dont le département d’économie a formé ceux qui ont mené la politique ultra-libérale de Pinochet pendant la dictature chilienne. Paulo Guedes a même travaillé un temps à l’université de Santiago à leurs côtés au début des années 1980 [1].
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Le ministre devrait notamment conduire une réforme des retraites, lancée par le président intérimaire Michel Temer après la destitution de Dilma Roussef et déjà en discussion au Congrès, qui vise à réduire les droits à une pension. Bolsonaro a aussi dévoilé le nom de celui qui dirigera Petrobras, la compagnie pétrolière publique, dont les gisements au large du Brésil sont convoités par les multinationales pétrolières privées. Sans surprise, l’homme, Roberto Castello Branco, est issu de la même école de pensée économique que Paulo Guedes. Il est partisan de la privatisation de la grande entreprise publique.
Une pro-pesticides à l’Agriculture
À l’agriculture, Bolsonaro a choisi une femme, Tereza Cristina. C’est elle qui dirige le groupe des « ruralistes » au Parlement brésilien. Cette association informelle rassemble des députés et sénateurs, issus de différents partis de droite, et porte au sein du pouvoir législatif les intérêts de l’agrobusiness. Les ruralistes avaient annoncé leur soutien à Jair Bolsonaro avant le premier tour de l’élection présidentielle, délaissant le candidat de la droite classique, qu’ils soutiennent en général (lire notre article Élections au Brésil : les marchés, l’industrie et l’agrobusiness soutiennent l’extrême-droite). La députée Tereza Cristina s’est surtout fait remarquer pour sa défense d’un projet de loi qui doit déréglementer l’usage des pesticides dans l’agriculture.
Ce projet prévoit que son futur ministère puisse autoriser l’usage de pesticides jusqu’ici interdits au Brésil, sans en référer aux agences chargées de vérifier leur dangerosité, comme l’institut brésilien de l’environnement et l’agence nationale de vigilance sanitaire. « Tereza Cristina figure aussi parmi les parlementaires qui ont reçu le plus de donations du secteur de l’agrobusiness, souligne le site d’informations The Intercept Brasil. En 2018, des 2,3 millions de reais de dons qu’elle a reçus pour sa campagne de députée, 900 000 viennent d’entreprises du secteur agricole, comme Cosan, groupe spécialisé dans la production de sucre et d’éthanol d’origine végétale. »
Un pro-Trump climatosceptique aux Affaires étrangères
Parmi les autres futurs ministres annoncés, on trouve deux généraux, pour la Défense et la Sécurité institutionnelle, en plus de son vice-président, qui est lui aussi général. Au Affaires étrangères, Bolsonaro a nommé un diplomate, Ernesto Araujo. Cette homme de 51 ans est considéré comme étant un admirateur de Donald Trump. Il dénonce régulièrement un supposé marxisme culturel. Il est par ailleurs un fervent climatosceptique, au point d’écrire sur son blog que le changement climatique est un « dogme » qui viserait notamment à « augmenter le pouvoir de la Chine » [2].
C’est donc lui qui sera le ministre des relations extérieures du plus grand pays d’Amérique latine, qui abrite les trois quarts de la forêt amazonienne, indispensable à l’équilibre de l’atmosphère, à la biodiversité et au renouvellement des ressources en eau douce, au moment où il s’agit de mettre en œuvre les engagements pris lors de l’Accord de Paris de 2015 sur le climat.
Rachel Knaebel
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