L'aviation turque bombarde des groupes kurdes en Irak
Des positions du PKK ont été visées dans le nord du pays. Washington, qui juge ces frappes "inacceptables", a annoncé une rencontre entre Erdogan et Obama dimanche.
SOURCE AFP
Modifié le - Publié le | Le Point.fr
La Turquie a prévenu lundi qu'elle continuerait de frapper les combattants kurdes dans le nord de la Syrie tant qu'ils n'auraient pas reculé à l'est de l'Euphrate, mais Washington a jugé ces affrontements « inacceptables » et a appelé à la fin des combats. « Les YPG [Unités de protection du peuple kurde, NDLR], comme lesÉtats-Unis l'ont promis [...], doivent repasser à l'est de l'Euphrate dès que possible et tant qu'elles ne le feront pas elles [resteront] une cible », a déclaré lundi le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Cavusoglu, au sixième jour de l'offensive de son pays dans le nord de la Syrie.
Washington a annoncé qu'une rencontre aura lieu dimanche entre Barack Obama et Recep Tayyip Erdogan, en marge d'un sommet du G20 en Chine. Il s'agira du premier échange entre les deux présidents depuis le putsch manqué du 15 juillet en Turquie, qui a créé des tensions entre les deux pays.
Des avions de combat turcs ont bombardé lundi des positions du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le nord de l'Irak, dans la région de Gara, a rapporté l'agence de presse pro-gouvernementale Anadolu. En juillet, l'aviation avait effectué des raids contre le PKK dans la région de Hakurk, également dans la partie septentrionale du territoire irakien.
Engagée depuis mercredi dans l'opération Bouclier de l'Euphrate, visant à la fois les combattants kurdes et les djihadistes du groupe État islamique (EI) en Syrie, l'armée turque a annoncé dimanche avoir tué « vingt-cinq terroristes kurdes » dans des frappes aériennes et des tirs d'artillerie, après avoir essuyé la perte d'un premier soldat au sol.
La Turquie, en conflit avec les Kurdes sur son propre territoire, veut éviter que les Kurdes syriens ne forment une ceinture continue le long de sa frontière avec la Syrie voisine, ravagée par un conflit complexe qui a fait plus de 290 000 morts depuis 2011. « Le but de l'opération est de nettoyer la région du groupe djihadiste EI et d'empêcher le PYD [Parti de l'Union démocratique, NDLR] et les YPG de mettre en place un couloir de bout en bout [qui] diviserait la Syrie », a affirmé le vice-Premier ministre turc Numan Kurtulmus, cité par la chaîne de télévision turque NTV.
« Nettoyage ethnique »
De son côté, l'émissaire présidentiel américain auprès de la coalition internationale anti-djihadiste, Brett McGurk, a qualifié les affrontements entre la Turquie et les forces arabo-kurdes d'« inacceptables », appelant toutes les parties à « cesser » les combats. « Nous voulons dire clairement que ces combats sont inacceptables et suscitent notre profonde inquiétude », a fait savoir le Pentagone dans un communiqué.
Ankara considère le PYD et sa branche armée comme des organisations « terroristes », bien qu'elles soient épaulées, en tant que forces combattant efficacement les djihadistes, par Washington, allié traditionnel de la Turquie. En visite à Ankara la semaine dernière, le vice-président américain Joe Biden avait « dit très clairement » que les forces kurdes devaient « retraverser » l'Euphrate vers l'est, faute de quoi elles perdraient le soutien des États-Unis. Mais Ankara assure n'avoir depuis pas vu de changement.
« Dans les endroits où elles se rendent, les YPG forcent tout le monde à migrer, y compris les Kurdes qui ne pensent pas comme elles, et procèdent à un nettoyage ethnique », a déclaré Mevlüt Cavusoglu. Selon lui, la zone autour de la ville de Minbej, à l'ouest de l'Euphrate et récemment reprise par les YPG à l'EI, est majoritairement arabe.
Soixante et une frappes
Le chef de la diplomatie turque a également salué le succès de l'opération éclair dans la localité de Jarablos, reprise à l'organisation EI dès mercredi dernier par des rebelles syriens soutenus par la Turquie. « L'objectif de cette opération [...] est de nettoyer la région du groupe terroriste Daech [acronyme arabe de l'EI, NDLR] », a-t-il déclaré.
L'armée turque a indiqué dans un communiqué avoir ouvert le feu à soixante et une reprises sur vingt cibles dans le nord de la Syrie au cours des 24 dernières heures, sans préciser quels groupes étaient visés. Dimanche, l'Observatoire syrien des droits de l'homme avait affirmé que les bombardements turcs en Syrie avaient provoqué la mort d'au moins quarante civils, des allégations fermement démenties par Ankara, qui assure que l'armée prend « toutes les mesures nécessaires pour éviter de toucher la population civile ».
Le Conseil militaire de Jarablos, lié aux Forces démocratiques syriennes pro-Kurdes, a annoncé dans un communiqué que ses forces s'étaient retirées au sud de la rivière Sajur « pour protéger la vie des civils ». Si cette décision va dans le sens des demandes d'Ankara, elle maintient toutefois les combattants affiliés aux FDS à l'ouest de l'Euphrate.
Sur le front diplomatique, le ministère syrien des Affaires étrangères a condamné « les violations, les agressions et les massacres commis par le régime turc », les qualifiant de « crimes contre l'humanité », dans une lettre adressée à l'ONU et diffusée par l'agence officielle de presse syrienne Sana.
(Ben, alors quoi, les Etats-Unis veulent la division de la Turquie ? note de rené)
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