Yachts, lingots d'or : la réforme de l'ISF sera-t-elle le boulet de Macron? (France)
L'exonération de produits de luxe de la réforme de l'ISF prévue en 2018 provoque des crispations au sein même de la majorité. Edouard Philippe a dit jeudi qu'il "assumait" que les yachts ou jets privés soient sortis de cet impôt.
Agité depuis plusieurs mois par l'opposition de gauche, le sujet commence à crisper les relations au sein de la majorité présidentielle. Le nouvel ISF est-il en train de plomber la rentrée de l'exécutif? Vendredi dans Le Parisien, c'est le député LREM Joël Giraud, rapporteur du projet de loi de finances, qui propose des modifications. La veille, François Bayrou, président du MoDem, principal allié des macronistes à l'Assemblée, tirait lui aussi la sonnette d'alarme... La réforme de l'Impôt sur la fortune, comprise dans le Budget 2018, prévoit de recentrer cet impôt pour les plus grosses fortunes au seul patrimoine immobilier afin de favoriser "l'investissement" sur le territoire. L'ISF sera d'ailleurs renommé Impôt sur la fortune immobilière (IFI). Exit donc par exemple les revenus financiers comme les dividendes mais aussi les biens de luxe, comme les bijoux, objets d'art, yachts et autres jets privés sans oublier les lingots d'or.
Ce geste du gouvernement en faveur des plus aisés - le nombre d'assujettis à l'ISF devrait diminuer de 40% pour une perte de 3,2 milliards d'euros de recettes pour l'Etat - irrite en particulier les parlementaires insoumis et socialistes en particulier, qui citent le plus souvent les exemples des yachts et jets privés, considérés comme des "signes extérieurs de richesse". C'est le sens de la remarque faite jeudi soir à Edouard Philippe, lors de L'Emission politique sur France 2, alors qu'on lui projetait l'image d'un de ces yachts luxueux. Mais le Premier ministre est resté sur sa ligne : "Dès lors qu'on spécialise l'ISF sur les valeurs immobilières, [ces biens] sortent de l'assiette [...] Je l'assume. Notre objectif, c'est de faire en sorte que le capital reste en France et même d'attirer des gens - y compris des gens riches - en France", a-t-il répondu, assurant que cette recherche "d'attractivité" avait un sens.
Vers des ajustements à l'Assemblée?
Peu avant, lors du 20h de TF1, François Bayrou regrettait pourtant les "glissements" de cette réforme, "puisqu’aujourd’hui les lingots d’or vont être exonérés, les yachts de luxe aussi". "L’argent qui s’investit dans les usines, oui. L’argent qui s’investit dans les coffres-forts, non", résumait l'ex-ministre centriste, émettant l'idée de "corriger" ce Budget lors de son examen à l'Assemblée nationale. C'est justement le propos du rapporteur LREM dans Le Parisien. "Les yachts, les jets privés, les chevaux de course, les voitures de luxe ou encore les lingots d'or ne sont plus pris en compte [...] Ce n'est pas possible! Des symboles de ce genre doivent être beaucoup plus taxés. Un yacht, c'est m'as-tu-vu, ce n'est pas productif pour l'économie...", regrette Joël Giraud, issu du Parti radical de gauche.
Le gouvernement ne ferme pas la porte à ces modifications, à condition qu'elle se fassent en dehors du seul sujet de l'ISF. "Que les parlementaires trouvent les moyens de neutraliser une sorte d’organisation fiscale qui ne permettent pas justement de financer l’économie réelle, ils seront parfaitement dans leur rôle. Le gouvernement regardera cela de manière attentive et positive", a ainsi assuré son porte-parole, Christophe Castaner, mercredi. Edouard Philippe lui-même a évoqué jeudi soir d'autres taxations possibles. Une position qui pourrait trouver alors un compromis au sein de l'Assemblée. "Si on réussit franchement à faire en sorte que ce genre de choses puissent ne pas avoir d’avantage, je préfère. Ce sera plus simple et on arrêtera de se focaliser là-dessus", a ainsi appelé la députée LREM ex-EELV, Barbara Pompili, jeudi sur France 2. Sa collègue Bénédicte Peyrol, membre de la commission des Finances, a elle aussi indiqué que les élus de la majorité travaillaient à "trouver un moyen" de re-taxer ces biens de luxe. Et ainsi s'élever une sérieuse épine du pied.
(Voilà, comment gouverne un président de la république qui ne gouverne que pour les riches. note de rené)
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