La Turquie veut entrer dans l’UE et négocier de l’intérieur
Par : Alfonso Bauluz | Euroefe | translated by Marion Candau via Euractiv
Le ministre turc des Affaires européennes, Ömer Çelik, défend bec et ongles l’élargissement de l’UE par l’adhésion de la Turquie en soutenant que le pays discutera de l’avenir de l’UE et de ses valeurs universelles lorsqu’il sera à l’intérieur du bloc. Un article d’Euroefe.
Selon le ministre turc des Affaires européennes, les valeurs européennes « sont affectées » par la hausse de la xénophobie et la crise de légitimité politique qui traverse la zone euro.
Ömer Çelik soutient que « l’essor du populisme d’extrême droite » est l’une des plus grandes menaces planant sur l’intégration européenne. « L’islamophobie, la xénophobie et la politique de haine sont en train de se développer en Europe », a-t-il déclaré tout en soulignant que face à ce phénomène, « nous avons besoin de réflexion et de souplesse ».
Rapprochement courageux
Le ministre conseille donc à l’UE de se rapprocher plus courageusement de la Turquie, après avoir rappelé que son pays avait accueilli trois millions de réfugiés, ce qui représente la moitié de la population de certains pays européens.
Il a également exigé de l’UE qu’elle honore ses engagements et rappelé que son pays n’avait « pas besoin de l’argent de l’UE » et que les financements accordés par l’UE étaient des ressources destinées « à l’éducation des enfants syriens ». « Nous n’avons reçu que 810 millions d’euros des 5 milliards promis », a-t-il indiqué.
Face à une montée de l’extrême droite dans un climat de terreur et d’insécurité chez les Européens, Ömer Çelik conseille de « remettre en question et réviser les politiques de l’UE ». Selon lui, si les pays européens avaient soutenu la Turquie après le coup d’État, « aujourd’hui l’adhésion à l’UE pourrait compter sur le soutien de 90 % de la population turque ».
Il considère toutefois que l’Europe n’a pas bien compris ce qu’il s’est passé avec la tentative de coup d’État, que le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan attribue au réseau religieux de l’imam Fethullah Gülen, qu’il qualifie de groupe terroriste.
Dans le combat contre le terrorisme, le ministre turc assimile le réseau de l’imam à l’État islamique et au PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) et justifie les détentions massives de militaires, de journalistes, de juges ou de professeurs par leur supposées implications terroristes.
Il attribue par ailleurs ces activités au journaliste turco-suédois Hamza Yalçin, en prison en Espagne depuis son arrestation à la demande de la Turquie le 3 août dernier, et à l’écrivain turco-allemand Dogan Akhanli, en liberté provisoire. Les groupes de défense de la liberté d’expression s’opposent à son extradition.
Référendum au Kurdistan
Faisant référence au plébiscite organisé dimanche au Kurdistan irakien, territoire qu’il appelle « l’Irak du Nord », le ministre soutient que la paix dans le monde sera plus difficile à garantir avec ce genre de référendum.
« Le jeu qui est en train de se jouer est très risqué, il va créer des conflits et il menace la coexistence dans cette région », a affirmé le ministre turc, qui a ajouté que le mandat de Masud Barzani, président de la région autonome du Kurdistan irakien, était épuisé.
Il soutient par ailleurs que « le résultat des élections allemandes menace notre avenir » et affirme qu’un tiers des députés du parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) a un lien direct avec des groupes nazis.
Il a également mis en garde contre le changement de rhétorique des partis centristes européens face au racisme. Ces partis perdent des voix étant donné que les électeurs qui choisissent ces options préfèrent se tourner vers les véritables partis xénophobes.
« Nous devons faire attention », a-t-il insisté avant de se soumettre à une autocritique en disant « nous ne disons pas que nous n’avons commis aucune erreur », mais « le chantage envers la Turquie est inacceptable ».
Dans ce contexte et malgré les plaintes pour persécution et arrestations des membres de l’opposition et le manque de liberté de la presse, il a appelé à ouvrir les chapitres 23 et 24 du processus d’adhésion portant sur le pouvoir judiciaire, les droits fondamentaux, les libertés et la sécurité. « Ouvrons-les et avançons ensemble », a-t-il insisté tout en concluant que « le plus important est de négocier ».
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