La "guerre du pain" fait rage au Venezuela
source : Romandie.news
Dans une boulangerie expropriée par le gouvernement à Caracas, le 17 mars 2017 / © AFP / JUAN BARRETO
Le gouvernement socialiste, qui monopolise à travers un contrôle des devises l'importation des aliments, veut que 90% de la farine qu'il vend aux boulangeries à un tarif subventionné soit destinée à faire du pain, dont le prix est régulé, plutôt que de la brioche ou des gâteaux, vendus à un prix libre et donc bien plus chers.
Résultat, des étagères pour le "canilla" ou le "francès" souvent vides alors que celles destinées aux pâtisseries sont pleines.
Au Venezuela, la pénurie frappe 68% des produits basiques et l'inflation y est incontrôlable (1.660% fin 2017, prédit le FMI). Les files d'attente, habituelles devant les supermarchés ou les pharmacies, s'étendent désormais aux boulangeries.
Sur le front de la "guerre du pain", comme l'a dénommée le chef de l'Etat, M. Maduro a déployé ses services, dont le Sundde, un organisme chargé de la défense des droits socio-économiques, qui a déjà arrêté quatre personnes et exproprié deux boulangeries de Caracas.
Les deux établissements, accusés d?enfreindre la "loi des prix justes", ont été remis aux comités de citoyens, appelés Clap, qui distribuent des aliments subventionnés dans les zones populaires.
Dimanche, le président avait menacé les boulangers qui "cachent le pain au peuple" et ordonné des inspections avec le concours de la force publique, de l'armée et des milices composées de sympathisants de Nicolas Maduro.
Des membres des forces de sécurité surveillent la vente de pain à Caracas, le 17 mars 2017 / © AFP / JUAN BARRETO
Après avoir trouvé cet aliment de base dans le centre de Caracas, Arilluri Rodriguez, une styliste de 50 ans, applaudit les mesures du gouvernement. "Ce sont les boulangeries qui cachent la farine, qui l'accaparent", assure-t-elle.
- Vent de panique -
D'autres, estiment que ces mesures coercitives ne vont rien changer.
"Ca ne va pas s'arranger. Il ne peut pas y avoir plus de pain si le gouvernement ne fournit pas davantage de farine. Ils montent ces opérations pour passer à la télévision et avoir l'air de résoudre le problème", déclare à l'AFP Alexis Mendez, professeur à la retraite de 68 ans devant une boulangerie du quartier populaire de Catia (ouest).
Selon la fédération du secteur (Fevipan), les 8.000 boulangeries du pays ont besoin de 120.000 tonnes de blé par mois pour répondre à la demande, or le gouvernement n'en distribue que 30.000 tonnes.
Les inspecteurs du gouvernement du Venezuela surveillent les boulangeries, avec l'aide de milices populaires, pour contrôler la production de pain, dans ce que le président Maduro a nommé "la guerre du pain", un présumé complot visant à créer une pénurie de pain. Durée: 00:42 / © AFP / Jesus Olarte
La présidente du Conseil national du commerce Cipriana Ramos estime que l'"on s'attaque aux conséquences et non aux causes: sans matière première, on ne peut pas produire du pain".
Les producteurs dénoncent des prix régulés inférieurs aux coûts de production, selon eux.
Dans une vidéo diffusée par le Sundde, on peut voir le responsable de cet organisme Williams Contreras effectuer un contrôle surprise. "Quelqu'un va être arrêté ici", lance-t-il en constatant qu'il n'y a pas de pain et avant que la police n'emmène les commerçants.
"Ils avaient un panneau où il était écrit +plus de pain jusqu'à nouvel ordre+, mais lorsque nous sommes entrés, il y avait 100 sacs de farine de blé", se justifie M. Contreras.
Un vent de panique s'est emparé des boulangers.
"Derrière, il y a une mauvaise intention, celle de saisir les boulangeries. Ici, la Sundde a effectué un contrôle de manière menaçante. Ils m'ont dit qu'ils allaient me jeter en prison s'il y avait de la farine et pas de pain. Quand ils sont arrivés, nous étions juste en train de le sortir (du four), du coup, ils n'ont rien fait", raconte à l'AFP Mario, un autre boulanger.
(©AFP / 18 mars 2017 15h04)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire