Par Andre Damon
Quelques heures après le retrait officiel vendredi par les États-Unis du plus important traité nucléaire au monde, le Pentagone a clairement annoncé son intention de cerner la Chine de missiles sur fond d’une course effrénée aux armements nucléaires.
S’adressant à des journalistes lors d’un voyage en Australie, le secrétaire américain à la défense, Mark Esper, a déclaré que le Pentagone déploierait des missiles interdits par le traité «le plus tôt possible».
«Je préférerais d’ici quelques mois», a déclaré Esper.
Le déploiement de missiles à moyenne portée dans le Pacifique transformerait la côte chinoise et les îles du Pacifique environnantes en un front de bataille nucléaire mettant en danger la vie de milliards de personnes en Chine, en Corée, au Japon, à Taïwan et plus largement dans toute la région.
Le traité FNI, qui a été signé en 1987 par le président Ronald Reagan et son homologue soviétique Mikhaïl Gorbatchev, interdisait aux États-Unis et à la Russie de développer des missiles d’une portée de 500 à 5 000 km, ce qui signifiait que la majeure partie de l’ Europe et du Pacifique étaient interdits au stationnement de missiles nucléaires.
Cependant, alors que les tendances technologiques modifiaient les équilibres militaires et que les États-Unis intensifiaient leur conflit avec la Chine, Washington en vint de plus en plus à considérer que ce traité de l’ère de la guerre froide était en contradiction avec son objectif d’encercler militairement Beijing, qui n’en était pas signataire.
Avec le déploiement potentiel des États-Unis des missiles nucléaires à quelques minutes en temps de vol de la partie continentale de Chine, les tensions seront placées sur le fil du rasoir, exposant l’immense population de la région au spectre de l’anéantissement nucléaire.
En réponse au retrait des États-Unis du traité FNI, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a averti que «le monde perdra un frein précieux sur la guerre nucléaire».
Daryl Kimball, directeur exécutif de l’Association du contrôle des armements, a déclaré que Trump «poursuivait une stratégie qui créerait les conditions pour une course aux armements dangereuse». Le Financial Times amis en garde, dans le même sens, contre «la réactivation de la course aux armements nucléaires» par Trump.
En défendant sa décision de placer des missiles dans une région densément peuplée à des milliers de kilomètres de l’Amérique, Esper a accusé la Chine de «transformer en armes les biens communs mondiaux à l’aide d’une économie prédatrice».
En d’autres termes, la Chine, en menant des activités économiques pacifiques, menace les États-Unis, ce qui devrait être contré par la menace de l’annihilation militaire.
«Nous sommes fermement convaincus qu’aucune nation ne peut ni ne devrait dominer l’Indo-Pacifique», a déclaré Esper, un homme qui représente un pays qui a mené une politique de faire «brûler, bouillir et chauffer à mort» (selon les mots du général de l’armée de l’air, Curtis Lemay) des centaines de milliers de civils japonais dans sa guerre pour conquérir le Pacifique.
Dans des commentaires ultérieurs, le secrétaire d’État Mike Pompeo, qui accompagne Esper lors de son voyage en Australie, a déclaré que les États-Unis étaient «endormis au moment du changement» en ce qui concerne le «danger» posé par la Chine.
Puis il a souligné à nouveau la déclaration d’Esper que la croissance économique pacifique de la Chine constituait une menace militaire pour les États-Unis.
«J’entendrai les gens parler des problèmes commerciaux et économiques séparément de la sécurité nationale», a déclaré Pompeo. «Qu’on ne s’y trompe pas, la capacité de la Chine, la capacité de l’Armée populaire de libération de faire exactement ce qu’elle fait est une conséquence directe des relations commerciales qu’ils ont construit.»
«Ils ont développé leur pays par le biais d’un ensemble de règles commerciales iniques. Ils ont donc pu développer leur économie à un rythme élevé», a déclaré Pompeo.
«Ces mêmes outils économiques sur lesquels le président Trump s’est tellement concentré sont ceux qui ont également permis à la Chine de faire tout ce qu’elle fait avec son armée», a-t-il ajouté.
En d’autres termes, il n’y a pas de frontière entre la coexistence pacifique et le conflit militaire. La croissance économique et le commerce sont eux-mêmes perçus comme des menaces militaires par Washington, et doivent être contrecarrés par les moyens allant de l’affrontement commercial aux menaces militaires jusqu’à la guerre totale.
Les propos de Pompeo sont conformes à la doctrine de la rivalité des grandes puissances contre la Russie et la Chine adoptée par le Pentagone l’année dernière, qui déclarait que «la concurrence des grandes puissances – et non le terrorisme – est désormais le principal objectif de la sécurité nationale des États-Unis.»
La conduite de tels conflits nécessitera une approche «pan-gouvernementale», a déclaré le Pentagone, ce que l’on appelle plus familièrement la guerre totale.
Outre la fin du traité sur les FNI vendredi, les États-Unis ont lancé trois défis à l’égard la Chine.
- Mercredi, la Banque centrale américaine (Fed) a abaissé le taux d’intérêt des fonds fédéraux dans une décision largement considéré comme visant à dévaluer le dollar et à améliorer les exportations américaines. Le mois dernier, Trump a déclaré que «les autres devises sont dévaluées par rapport au dollar, ce qui désavantage fortement les États-Unis», exigeant que la Fed prenne des mesures.
- Jeudi, Donald Trump a annoncé une proposition visant à appliquer un droit de douane de 10 pour cent sur tous les produits chinois non encore soumis à des droits d’importation, y compris un large éventail de biens de consommation tels que les téléphones et autres produits électroniques.
- Le même jour, les sénateurs démocrates se sont joints aux républicains pour adopter le budget militaire le plus important de l’histoire des États-Unis, renforçant ainsi considérablement la capacité des États-Unis à mener une guerre contre «une grande puissance».
Si aucune de ces actions n’est sérieusement discutée ou débattue dans les médias, c’est parce qu’il existe une entente entre les démocrates et Trump sur la nécessité de se préparer à la guerre avec la Chine. Comme le disait l’ancien président de la campagne Trump, Steve Bannon, «Celui qui remportera les élections, qu’il soit démocrate ou non, sera un aussi grand sinon plus grand faucon que Donald Trump […] Les démocrates sont aussi sévères [sur cette question] que les républicains.»
À certains égards, les démocrates sont encore plus radicales dans leur langage. Pour ne citer qu’un exemple, en juin, le candidat démocrate à la présidence, Pete Buttigieg, avait déclaré qu’un conflit avec la Chine constituait le fondement de «l’unité nationale».
«Le nouveau défi de la Chine nous offre une occasion de nous unir au-delà du clivage politique», a-t-il déclaré. «Au moins la moitié de la bataille est à l’intérieur du pays.»
Photo: Un missile nucléaire Titan II [source: ministère américain de la défense]
(Comme ils font pour la Russie, donc, positionnés au Japon et en Corée du Sud et après, les autres pays ne voudront pas se mettre la Chine sur le dos. note de rené)
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