Le chancelier autrichien, Christian Kern, souhaite une loi contre le dumping social des pays les plus pauvres de l’UE. Le projet de son gouvernement de réduire les allocations familiales pour les travailleurs européens étrangers froisse la Commission européenne.
« En Autriche, personne n’appelle à donner la priorité aux Autrichiens », a-t-il déclaré aux journalistes après la réunion du 13 janvier.
La ministre autrichienne de la Famille s’est opposée à une proposition de la Commission présentée en décembre, qui visait à restructurer le système d’allocations de chômage à travers l’UE. Elle s’est engagée à bloquer le projet de loi tant que celui-ci n’inclurait pas de mesures permettant aux pays européens de payer moins d’allocations familiales aux citoyens dont les enfants vivent dans un État membre plus pauvre.
Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, prépare quant à lui un projet de loi visant à réduire les allocations familiales de moitié pour les travailleurs dont les enfants vivent dans un pays moins riche, où ces allocations sont donc moindres. En Allemagne, la plupart des résidents qui envoient l’argent des allocations familiales à l’étranger ont des enfants habitant en Pologne, en Roumanie, en Bulgarie ou encore en Croatie. Le 10 février, Marianne Thyssen, la commissaire européenne aux affaires sociales, avait fustigé le projet de loi du ministre allemand, en affirmant ne pas croire aux « enfants de deuxième classe ».
À l’heure actuelle, au sein des États membres, les citoyens européens ayant des enfants à l’étranger ne sont pas traités différemment des ressortissants nationaux en matière d’allocations familiales.
Les citoyens européens ont en effet le droit de recevoir des aides sociales dans un autre État que leur pays d’origine s’ils y vivent et y travaillent. Marianne Thyssen a rejeté l’appel de la part de l’Autriche, de l’Allemagne et d’autres pays européens riches à rédiger une proposition législative européenne autorisant ces derniers à réduire les allocations familiales des travailleurs dont les enfants vivent dans un État membre plus pauvre.
Christian Kern ne s’est pas exprimé sur les projets de sa ministre, mais a en revanche saluer le projet de la Commission de réformer les régles pour les travailleurs régulièrement mutés d’un pays membre à l’autre. La directive sur les travailleurs détachés a fait l’objet de plusieurs mois de négociation en raison de la ferme opposition des pays d’Europe de l’Est. D’après eux, le projet de loi discriminerait les entreprises installées dans des pays au coût de la main-d’œuvre moins élevé, qui doivent déjà s’acquitter de frais légaux et administratifs onéreux pour pouvoir envoyer leurs salariés à l’étranger.
Un groupe de pays riches, parmi lesquels la France, l’Allemagne et l’Autriche, a cependant insisté sur la nécessité de changer la réglementation afin de réduire le nombre d’emplois sous-payés. La France est le pays qui accueille le plus de travailleurs détachés au sein de l’UE.
« Il est primordial que la situation progresse à ce sujet », a déclaré le chancelier autrichien aux journalistes. « D’après une étude, les Autrichiens ont particulièrement pâti d’importants écarts salariaux. Cela s’explique par la hausse du taux de chômage au niveau national d’une part, et par le nombre considérable d’emplois créés chaque année d’autre part. »
Les estimations économiques actuelles de la Commission placent l’Autriche parmi les quatre pays de l’UE, avec le Portugal, l’Estonie et le Royaume-Uni, qui connaîtront une montée croissante du taux de chômage dans les deux années à venir. Celui-ci devrait en effet passer de 6 % en 2016 à 6,2 % en 2018 en Autriche.
Selon Christian Kern, « le défi n’est pas d’accueillir des travailleurs provenant d’autres États membres en Autriche, mais de faire en sorte que ceux-ci puissent travailler dans de bonnes conditions ».
Jean-Claude Juncker a assuré que la Commission « se débarrasserait » de tout dumping social, c’est-à-dire de la pratique consistant à exploiter des salariés en les payant moins ou leur offrant de moins bonnes conditions de travail.
« Le marché intérieur n’a pas été créé pour que les travailleurs passant d’un pays A à un pays B soient moins bien traités que les ressortissants du pays A », a-t-il martelé.
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