L’ouest des États-Unis étouffe sous une chaleur durable et extrême
Avec 49 °C mesurés dimanche 20 juin, la Vallée de la mort a rarement aussi bien porté son nom. Près des trois quarts de la Californie et plus de la moitié de l’ouest du pays sont en état de sécheresse exceptionnelle, alors que les jours les plus chauds de l’année sont à venir.
La langue anglaise se prête bien aux expressions emphatiques. Dans les médias américains, il n’est plus question de sécheresse, mais de « Megadrought » (mégasécheresse) car elle s’étale désormais sur plusieurs décennies. Ce n’est pas la première ni la plus forte, mais elle prend des airs de blockbuster estival, que personne n’a envie d’aller voir. Le pays y assiste, impuissant, en espérant chaque année que la suite sera moins mémorable.
À Phoenix, en Arizona, le capitaine Scott Douglas, des pompiers de la ville, affirme sur la radio publique NPR qu’il fait chaud « comme quand on ouvre un four, en train de faire cuire une tarte ». Avec ces vagues de chaleur extrêmes, les grandes retenues d’eau de l’Ouest s’assèchent à vue d’oeil. Le lac Mead, réservoir artificiel créé dans les années 1930 sur le Colorado, à cheval sur le Nevada et l’Arizona, est à son plus bas niveau depuis près d’un siècle.
Chaque année, il baisse de 1,80 mètre à cause de l’évaporation. 25 millions d’habitants sont approvisionnés par son eau, selon la chaîne télévisée CNNet les populations agricoles du centre de l’Arizona sont les premières frappées lorsqu’il s’assèche. D’autres réservoirs sont aussi dans le rouge, et plusieurs villes et États ont imposé des limites pour freiner l’usage de l’eau.
Plus au nord, l’Oregon goûte aussi à un début d’été des plus arides. Phil Chang, conseiller général du comté de Deschutes, évoque sur la radio publique américaine « un effet cumulatif » car 2021 vient s’ajouter à d’autres millésimes difficiles. La dernière année a été la plus sèche pour les États du Sud-Ouest en cent vingt-cinq ans, ce qui engendre des réactions en cascade. Même si la neige est tombée sur les montagnes cet hiver, quand elle a fondu, la sécheresse du sol était trop forte et le niveau des nappes phréatiques, trop bas. L’eau s’est évaporée, explique Phil Chang.
Une « sécheresse exceptionnelle »
Sur la même antenne, la journaliste spécialisée en environnement Lauren Sommer estime que les changements climatiques rendent la gestion actuelle des lacs artificiels obsolète : « Les systèmes hydriques de l’Ouest ont été conçus autour de l’idée que le climat resterait constant. Avec des données sur les précipitations, les ingénieurs ont construit les lacs artificiels et les canaux, elles leur disaient aussi quel volume d’eau partager entre les villes et l’agriculture. [...] Mais les changements climatiques mettent ses systèmes sous une pression grandissante, et diminuent l’approvisionnement en eau pour des millions d’habitants. [...] On ne peut plus regarder le passé en se disant que le volume d’eau que l’on avait auparavant est celui qu’on peut attendre dans le futur. »
Le climatologue de l’université de Californie à Los Angeles, Daniel Swain, interrogé par ABC News, estime que la moitié de la sécheresse actuelle est due au réchauffement climatique. « Sans cela, on ne parlerait pas de mégasécheresse. »
Sur Twitter, le compte de l’Agence de la protection de l’environnement en Californie jongle avec les publications alarmantes. Certaines recensent les records de température qui tombent dans l’État ces derniers jours. D’autres alertent sur les mesures à prendre pour éviter qu’une forêt ne s’embrase. Car la sécheresse qui s’emballe crée les conditions idéales pour que les incendies s’intensifient. Près d’un demi-million d’hectares de forêt sont déjà partis en fumée cette année, soit plus qu’à la même période l’an dernier.
Durant sa campagne présidentielle, Joe Biden pointait le changement climatique comme responsable des feux qui ravagent l’Ouest chaque année. Il promettait d’agir, et des sénateurs lui rappellent qu’il doit notamment faire sa part grâce à une meilleure gestion des forêts, en insistant notamment sur le reboisement.
En attendant, en Utah, quitte à tenter le tout pour le tout, le gouverneur Spencer Cox a déclaré au début du mois un « week-end de prières » pour faire tomber la pluie. Il demande une intervention divine alors que les deux tiers de l’État étaient en « sécheresse exceptionnelle ». Dieu n’a visiblement rien entendu. Les météorologues ne prévoient pas de précipitations sur Salt Lake City pour les dix prochains jours.
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