mercredi 5 juin 2019

Aux Pays-Bas, polémique autour des soins pour les plus âgés

Les faits 

Une députée écologiste s’est interrogée sur la légitimité de traitements lourds pour les plus de 70 ans, provoquant une vive polémique dans le pays.

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  • Sabine Cessou, correspondante à Amsterdam
  • le 04/06/2019 à 11:21 source : La Croix
Aux Pays-Bas, polémique autour des soins pour les plus âgés
Est-il utile ou non de soigner lourdement les plus de 70 ans ? En posant la question, Corinne Ellemeet, 43 ans, députée du parti écologiste Groenlinks, a jeté un pavé dans la mare, en février 2019. Cette ancienne employée du ministère de la santé a demandé un débat au Parlement sur ce sujet sensible. Son argument : « Les gériatres doivent donner leur avis et être écoutés sur la nécessité de certains traitements lourds, opérations cardiaques, nouvelle hanche ou chimiothérapies… »
La polémique a été instantanée. « C’est une proposition glaçante faite avec une voix chaleureuse », s’est indignée Fleur Agema, députée du parti populiste ultra-conservateur PVV, qui a perdu ses deux parents sexagénaires à la suite d’infections nosocomiales. Un chroniqueur du quotidien conservateur De Telegraaf a critiqué un « projet d’élimination des personnes âgées ». Quant au quotidien EenVandag, il a fustigé cette « analyse coût-bénéfice néolibérale et froide » que suppose l’expression même d’« utilité des soins ».

Vieillissement de la population et de crise des hôpitaux

« Il ne s’agit pas d’une question de coûts, mais des soins les plus appropriés », a insisté Corinne Ellemeet qui se défend de toute considération financière. Pourtant, cette question pèse dans le système de santé néerlandais. Les maisons de retraite ferment les unes après les autres car elles ne sont plus financées par l’État qui veut réduire à toute force les dépenses de santé. Un établissement d’Amersfoort, par exemple, avait proposé des réanimations « facultatives » pour les plus de 70 ans qui en auraient fait la demande dans leur formulaire d’inscription. L’objectif avoué de la direction : « faire de la place ».
Le débat s’inscrit dans un contexte de vieillissement de la population et de crise des hôpitaux. Selon les statistiques du Bureau central du Plan (CPB), le coût des soins de santé est passé de 5 % à 10 % du PIB entre 1990 et 2012. Les dépenses vont augmenter puisque les plus de 75 ans passeront de 1,3 à plus de 2 millions d’ici à 2030, sur une population totale de 17,3 millions de personnes. Les scénarios du CPB, qui prévoyaient une hausse de 4,4 % par an des soins de santé entre 2012 et 2017, se sont toutefois révélés faux : la hausse n’a été que de 0,5 %, en raison des réformes drastiques dans les hôpitaux. Ces derniers ont en effet été privatisés en 2006, et se trouvent aux mains de compagnies d’assurances qui se font concurrence.

Le nombre d’euthanasies est en hausse constante

Mais ces résultats, satisfaisants sur le plan comptable, le sont nettement moins sur le terrain de la prise en charge. Pas moins de 15 services d’urgence ont été fermés ces dernières années, et quatre établissements se trouvent depuis novembre au bord de la faillite. Une autre réforme contraint depuis 2012 les patients à se rendre d’abord dans des hôpitaux de quartier avant d’être envoyés, le cas échéant, dans des hôpitaux plus importants. Ce souci de rationalité aboutit à des situations absurdes.
C’est ainsi que le cas d’un homme de 71 ans, qui a dû attendre une semaine avant d’être opéré pour des fractures multiples, a été évoqué au Parlement. Dans ce contexte, et dans ce pays où le nombre d’euthanasies est en hausse constante, toute tentative d’aller encore plus loin dans les réformes de santé est devenue un sujet ultrasensible.
(Elle a Raison, faut les tuer, la vieillesse est un naufrage. Et, les chômeurs aussi ! note de rené)

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