La Grèce en grève contre la réforme des retraites, la mobilisation s'étend
AFP le , mis à jour à 19:54 via Boursorama
26Plus de 50.000 personnes ont manifesté en Grèce contre la réforme des retraites jeudi, journée d'une grève générale, émaillée de quelques incidents et ayant paralysé le pays.
Avec des cortèges de quelque 40.000 manifestants à Athènes, et 14.000 à Thessalonique, deuxième ville du pays, selon la police, cette mobilisation est la plus massive depuis l'arrivée au pouvoir de la gauche, en janvier, du Premier ministre Alexis Tsipras qui soutient cette réforme voulue par les créanciers UE-FMI.
"Ils ont massacré ma génération, on ne peut se marier, on ne peut pas avoir d'enfants", a déploré à l'AFP Dina, 32 ans, qui a pour la première fois fermé son magasin de lingerie pour participer à cette manifestation massive.
Un nombre record de corporations est descendu dans la rue, au-delà des traditionnels salariés du secteur d'Etat. Assureurs, vétérinaires, avocats, agriculteurs ou médecins ont défilé aux côtés des fonctionnaires et de nombreux employés du privé.
A Athènes, des incidents ont eu lieu en marge des manifestations: des groupes de jeunes ayant sporadiquement lancé des cocktails molotov avant d'être rapidement dispersés par des tirs de gaz lacrymogènes.
C'est la troisième fois que le Premier ministre Alexis Tsipras, élu il y a un an sur la promesse d'en finir avec les plans de rigueur des créanciers (UE et FMI), essuie une grève générale. Il a dû accepter lui-même en juillet l'un de ces programmes, contre 86 milliards d'euros de prêts.
Les manifestants répartis dans trois cortèges, ceux du PAME proche du parti communiste, le plus important en nombre, des grands syndicats du public et du privé Adedy-GSEE et de la gauche radicale, étaient deux fois plus nombreux qu'en novembre et près de trois fois plus nombreux qu'en décembre.
La capitale était également plongée dans un calme inhabituel par l'absence des milliers de taxis de la ville. Les transports urbains, ferroviaires, aéroportuaires et maritimes étaient également perturbés.
De nombreux commerces étaient fermés pour dénoncer une réforme qui frappe de plein fouet les travailleurs indépendants, ainsi que les agriculteurs. Ces derniers campent depuis le 22 janvier sur les grands axes routiers, et bloquent depuis lundi les postes frontière avec la Bulgarie et la Turquie.
Réclamée par les créanciers, la réforme vise à dégager 1,8 milliard d'euros d'économies pour l'Etat (environ 1% du PIB). Selon le ministère de l'Emploi, 17,5% du PIB est consacré aux retraites contre 11,5% en moyenne en Europe.
- 'il faut que l'Europe nous entende' -
Le projet du gouvernement prévoit notamment de relever les cotisations sociales et d'abaisser le plafond des retraites les plus élevées, de 2.700 à 2.300 euros. Il met en place une retraite minimum de 384 euros, et unifie les régimes jusque là très disparates.
Dina, elle, "n'en peut plus" : "on paye plus de charges qu'on ne gagne, on ne travaille que pour l'Etat, on ne peut même plus dégager de salaire", assure-t-elle à l'AFP.
"Il faut que l'Europe nous entende, parce que nous avons besoin d’un répit pour repartir", plaide Thomas Karachristos, avocat d'affaires. Il admet que le système de cotisations actuel est assez injuste. Mais pour lui, la réforme prévue "ne peut pas rendre le système viable".
Il a ainsi calculé qu'entre impôts et cotisations, il va devoir céder 88% de ses gains l’an prochain, au risque de devoir licencier parmi ses quatre collaborateurs.
Le tout alors que les pensions ont déjà subi une douzaine de coupes depuis le début de la crise.
Alexis Tsipras, accusé par beaucoup de Grecs de les avoir "trahis", défend cette réforme, pour éviter que "le système s'écroule", tout en promettant de tout faire pour épargner les plus faibles.
Il souhaite ainsi obtenir le feu vert des créanciers permettant d'ouvrir de nouvelles négociations tant espérées sur un allègement de la dette grecque (près de 200% du PIB).
Mais les négociations avec les représentants des créanciers, arrivés à Athènes lundi et ayant déjà rencontré de nombreux ministres, "sont difficiles", "toutes les questions restent ouvertes", a avoué jeudi soir Georges Katrougalos, ministre de l'Emploi, à l'issue d'une rencontre avec eux.
Les créanciers contestent l'augmentation des cotisations pour les employeurs et veulent abaisser le montant de la retraite minimum de 384 euros par mois, selon la presse.
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