dimanche 30 septembre 2018

Les pertes subies par les forces afghanes ont atteint un niveau difficilement soutenable


Certes, l’élimination de Saad Arhabin, le nouveau chef de la branche afghano-pakistanaise de l’État islamique (EI-K), le 26 août dernier, lors d’une opération menée conjointement par les forces américaines et afghanes, est un succès. Pour autant, elle n’a pas empêché l’organisation jihadiste de commettre de nouveaux attentats, en particulier contre la communauté chiite. Et elle est loin de compenser les difficultés de Kaboul face au mouvement taleb afghan, en dépit de discours officiels qui se veulent rassurants, alors que, dans 10 jours, cela fera 17 ans que les États-Unis ont engagé leurs troupes en Aghanistan.
Ces dernières semaines, le mouvement taleb a lancé des offensives dans le nord du pays et s’en est pris à la ville de Ghazni, la capitale de la province du même nom, située à seulement deux heures de route de Kaboul. Et les assauts de ses « unités rouges » contre des bases et des postes avancés tenus par l’armée nationale afghane ont été particulièrement meutriers. « Nous devons défendre partout et ils peuvent attaquer n’importe où », a résumé un responsable afghan dans les colonnes du New York Times.
Ainsi, les combats qui ont eu lieu dans les provinces de Sar-e-Pul, Kunduz, Samangan et Jowzjan, durant la semaine du 10 septembre, auraient fait plus de 400 tués dans les rangs des militaires et des policiers afghans. Ce chiffre a été officieusement avancé par le général Austin Scott Miller, le nouveau chef de la mission Resolute Support [conduite par l’Otan, ndlr] et des forces américaines en Afghanistan, lors d’une réunion avec des diplomates à Kaboul.
Les autorités afghanes ne souhaitent plus communiquer au sujet des pertes subies par leurs forces de sécurité, quand elles ne cherchent pas à les minimiser.
Toutefois, le ministre afghan de la Défense, le général Tariq Shah Bahrami, a admis lors d’une séance au Parlement que le mois d’août avait été l’un des pires en terme de pertes parmi les forces de sécurité, avec 513 soldats de l’armée nationale afghane tués, 718 blessés et 43 capturés. Soit 1.274 combattants mis hors de combat. Mais « l’ennemi a souffert trois à quatre fois plus que nous », a-t-il assuré. Seulement, il est impossible de le vérifier de manière indépendante.
D’après l’International Crisis Group (ICG), le conflit afghan est en passe de devenir le plus meurtrier du monde en 2018, avec plus de 20.000 morts, civils compris. Outre les attaques des taliban, il faut aussi considéré les attentats de la branche afghano-pakistanaise, laquelle, a expliqué Gilles Boquérat, de la Fondation pour la recherche stratégique, à l’AFP, bénéficie de « l’apport de certaines troupes étrangères comme les Tchétchènes et les Ouzbeks mais aussi les Ouïgours. » Et d’ajouter : « Il y a aussi des composants étrangers qui étaient avant dans les rangs des talibans et qui sont passés dans ceux de l’EI. »
Quoi qu’il en soit, le niveau des pertes subies par les forces afghanes est difficilement soutenable. Un point que le ministre afghan de la Défense a bien été obligé de reconnaître.
En mai, l’Inspection générale pour la reconstruction de l’Afghanistan [SIGAR], une structure américaine dont la mission est d’évaluer la situation afghane, a indiqué que les effectifs des forces de sécurité du pays avaient perdu environ 18.000 hommes entre janvier 2017 et janvier 2018. Et cela, en raison des pertes subies au combat et les désertions.
Qui plus est, il ne s’agit-là que d’un ordre de grandeur, en raison de déclarations frauduleuses sur l’état des effectifs. Comme l’avait souligné le SIGAR dans un précédent rapport, des chefs militaires ont pris le pli d’empocher les soldes de « dizaine de milliers de soldats fantômes qui n’existent que sur le papier. » Et cela s’était aussi vu en Irak, avec les conséquences que l’on sait…
Quoi qu’il en soit, le défi pour l’armée afghane sera de recruter massivement pour compenser l’attrition. Or, comme l’a dit un officier recruteur au New York Times, « les gens ne veulent plus rejoindre l’armée parce que les pertes sont trop élevées. »
« En raison de l’insécurité croissante et des pertes élevées de victimes, les gens ne rejoignent pas autant l’armée » que par le passé, a confirmé un autre officier afghan. « La plupart des jeunes vont en Turquie pour trouver un emploi à la place », a-t-il ajouté.
Dans le même temps, bénéficiant d’appuis extérieurs et de refuges au Pakistan voisin, les taliban semblent n’avoir pas trop de difficulté pour reconstituer leurs forces. Leurs effectifs seraient de l’ordre de 60.000 à 77.000 combattants. Mais il ne s’agit là que d’estimations… Cela étant, l’on peut toujours avancer que, jusqu’à présent, il n’ont pas réussi à s’emparer d’une grande ville. Mais tel n’est sans doute pas leur objectif : occuper une capitale provinciale pendant quelques jours use une armée afghane au four et au moulin et sert leur propagande.
Cela étant, le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, a admis que les forces afghanes ont « subi de lourdes pertes » au cours de cette année. « Mais elles continué à se battre et nous ajustons les tactiques. Nous apportons plus de soutien dans certains domaines », a-t-il ajouté, sans vouloir donner plus de détails.
(Toujours plus prêt de négociation avec les talibans selon le pentagone. note de rené)

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