Le gouvernement canadien subit un revers judiciaire majeur dans son projet d’expansion du pipeline Trans Mountain dans l’ouest du pays. L’une des plus hautes instances juridiques du pays, la Cour d’appel fédérale, a annulé le 30 août le décret permettant au projet d’aller de l’avant. Médias et experts canadiens soupèsent la portée de cette victoire des opposants au projet controversé de 7,4 milliards de dollars (4,8 milliards euros), dont l’avenir est désormais incertain.
“Nous gagnons”, confie Rueben George, du peuple autochtone Tsleil-Waututh originaire du sud-ouest canadien, à la chaîneGlobal News“Le tribunal a tenu compte de ce que notre culture enseigne. Le pipeline n’est pas dans l’intérêt du Canada.”
Dans son jugement, la Cour d’appel affirme qu’Ottawa a manqué à ses obligations de consulter de manière adéquate les communautés autochtones avant d’approuver le projet d’expansion du pipeline en novembre 2016. Conséquence : il faut en reprendre l’évaluation, y compris concernant les conséquences sur l’environnement.
Les travaux préliminaires du chantier de l’expansion de l’oléoduc venaient pourtant de commencer en Alberta pour acheminer du pétrole via la province voisine de la Colombie-Britannique vers la côte pacifique canadienne, afin d’alimenter les marchés étrangers. De plus, les Canadiens sont officiellement devenus propriétaires, ce 31 août, du pipeline racheté à la pétrolière américaine Kinder Morgan.
Alors que les partis d’opposition à Ottawa dénoncent un fiasco, le ministre des Finances, Bill Morneau, est déterminé à aller de l’avant dans ce projet. “C’est une bonne décision économique pour les Canadiens”, déclare-t-il dans La Presse.
Heureux, le Premier ministre de la Colombie-Britannique, John Horgan, parle d’un “grand jour” pour les opposants au projet. Son homologue d’Alberta, Rachel Notley, évoque un jugement “mauvais” et annonce le retrait de sa province du programme national de lutte contre les changements climatiques.
Dans son commentaire, le quotidien La Presse voit là un “véritable pavé dans la mare pour le gouvernement Trudeau”. Le Globe and Mail estime que cette “défaite” souligne “l’obligation constitutionnelle d’Ottawa non seulement d’écouter les Premières nations, mais aussi de tenir compte de leurs préoccupations dans les décisions finales”.
Nous entrons dans une période de conflit politique”, estime le professeur George Hoberg, de l’Université de la Colombie-Britannique, qui se dit certain qu’Ottawa portera la cause devant la Cour suprême, un processus qui prendra au moins un an.
Martin Gauthier