Lettre ouverte au Dr Bouet, président du CNOM (France)
Monsieur le Président, cher Confrère,
J’ai lu cette semaine votre interview menaçante titrée “Des médecins ne peuvent pas jeter le trouble, les vaccins sauvent des vies” parue dans Le Généraliste (le fameux leader des News Magazines de la Presse Médicale).
Vous y expliquez que les opinions émises par des médecins et ne reposant pas sur des faits scientifiques pourront être l’objet de poursuites pour infraction déontologique.
Je voudrais d’abord vous parler de la question des faits scientifiques. Contrairement à l’idée qu’on s’en fait, les faits scientifiques peuvent être fragiles et les faits non scientifiques parfois solides.
La médecine est politique, pas seulement scientifique, les fameuses données de la science sont souvent sujettes à caution, manipulées par des intérêts financiers immenses. Par exemple je ne lis jamais Le Généraliste ni les autres journaux du même groupe de presse financés par la publicité pharmaceutique et appartenant aux Mutuelles Nationales Hospitalières : sous des apparences scientifiques, leur information qui doit convenir à leurs annonceurs et à leur actionnaire est bien trop suspecte. Les “faits scientifiques” sont régulièrement remis en cause par de nouvelles études, ce qui était une évidence hier (p. ex. coucher les nourrissons sur le ventre) est une idiotie aujourd’hui. La science change. Je vous invite à ce sujet à lire l’excellent ouvrage Ending Medical Reversal de Vinayak Prasad – malheureusement non traduit en français – vous y trouverez de multiples exemples de faits scientifiques qui s’avèrent finalement être faux. Enfin nombre de faits scientifiques ne sont tout simplement pas disponibles parce qu’il n’y a pas assez de temps, d’argent ou de volonté politique pour étudier tout ce qui devrait l’être de manière scientifique. Un exemple récent, fracassant, avec l’étude ORBITA qui a montré que la pose de stent dans l’angor stable pratiquée depuis des lustres dans le monde entier, reposait non pas sur des faits scientifiques mais sur une “logique” de plomberie.
Et puis il y a des faits non scientifiques qui ont pignon sur rue et que vous tolérez sans mal. Ne reposant sur aucune base scientifique, ne bénéficiant d’aucune étude scientifique démontrant un quelconque effet au delà du placebo, amenant des patients atteints de maladies graves à ne pas se traiter sérieusement, remboursée à prix d’or par la collectivité, l’homéopathie est un des grands scandales médicaux de notre époque. Un très grand nombre de confrères la pratiquent, de nombreux pharmaciens vendent des soi-disant vaccins anti grippaux homéopathiques et tout continue de rouler sans problème, sans intervention des Ordres pour non actions basées sur des faits contre scientifiques..
Dans ce contexte, lire que l’on risque d’être poursuivi pour exprimer des opinions qui ne reposent pas sur des faits scientifiques laisse rêveur (dans le meilleur des cas) et interpelle : comment fixerez-vous les limites des “infractions déontologiques” ? Quels seront les sujets sur lesquels vous serez particulièrement vigilant ?
Mais venons-en au fond.
C’est sans doute l’exercice imposé de l’interview qui vous amène à asséner avec force des messages raccourcis, faisant ainsi passer une idée frappante sans faire dans la dentelle. Je le conçois. Mais n’allez-vous pas un peu loin ?
Vous nous dites : “la vaccination est ce qui protège le mieux l’individu et la collectivité d’un risque majeur”. Est-ce un fait scientifique ?
Je ne sais pas ce que vous entendez par “La vaccination” mais dans le contexte j’imagine que vous faites référence aux futurs 11 vaccins obligatoires et à leur application en France. Sinon on ne sait plus de quoi on parle. Par contre j’ai du mal à comprendre ce que vous entendez par “un risque majeur”. Je ne veux pas m’éloigner du sujet mais à mon sens le risque majeur auquel les individus et la collectivité font face actuellement est celui du réchauffement climatique. Je ne vous ferai pas l’injure de laisser à penser que “La” vaccination nous protège contre cela. Il doit s’agir d’autre chose. Quels sont donc les risques médicaux majeurs qui menacent un individu né en France ? Citons-en quelques uns qui représentent ensemble plusieurs centaines de milliers de morts prématurées par an : le tabac, la malbouffe et l’obésité, l’alcool, la sédentarité, les accidents de la route, les cancers… Voilà des risques médicaux majeurs qui justifient certainement des politiques de santé publique.
Mais de quels risques majeurs parle-t-on quand il s’agit des vaccins obligatoires ? Dix morts de la rougeole (regrettables) en dix ans est-ce un risque majeur ? Craint-on une épidémie majeure d’hépatite B, de coqueluche ou d’oreillons ?
Ce qui protège le mieux nos populations non soignantes contre l’hépatite B n’est-ce pas l’usage du préservatif et de seringues à usage unique (d’autant que ça protège de plein d’autre choses pour lesquelles on n’a pas de vaccin) ?
Ce qui protège le mieux les collectivités contre la grippe ne sont-ce pas les mesures barrières, beaucoup plus qu’un vaccin peu voire pas efficace.
Ce qui protège le mieux contre la méningite n’est-ce pas l’isolement et le traitement du sujet atteint et le traitement antibiotique de ses contacts parce que comme vous le savez, le vaccin est loin d’être 100% efficace.
Et puis vous le savez aussi, on a beau être vacciné on peut quand même attraper la coqueluche ou les oreillons.
Pas de risque majeur donc, pas toujours la meilleure protection ensuite, que reste-t-il de votre assertion ?
Continuons.
Vous nous dites : “Créer l’obligation pour ces vaccins dont nous savons qu’ils protègent et sauvent des vies est une action de santé publique”.
Ceci est faux pour deux raisons très simples que vous connaissez aussi bien que moi : d’une part les maladies contre lesquelles nous protègent (de manière variable) ces vaccins ne posent pas actuellement de problème de santé publique, d’autre part ces vaccins sont largement dispensés et le taux de couverture ne cesse d’augmenter. Il n’y a aucune raison de les rendre obligatoire. C’est pourtant ce que vous souhaitez et, si comme vous le dites (et je veux bien vous croire), vous n’êtes ni “à genoux devant le gouvernement”, ni “à la solde des laboratoires”, d’où vous vient cette étrange position ?
Passé ces généralités vous en venez à la dramatisation, l’argument contre lequel on ne peut rien : le risque d’épidémie d’encéphalite rougeoleuse ! Ah le méchant médecin qui serait contre l’obligation vaccinale et qui déclencherait une épidémie catastrophique chez nos chères petites têtes blondes. Sûr qu’à celui là on doit lui jeter l’opprobre. Mais je m’interroge. Il n’y a eu aucune épidémie d’encéphalite rougeoleuse depuis des temps quasi immémoriaux sans que le vaccin anti rougeoleux ne soit obligatoire. Alors expliquez moi un peu en quoi le rendre obligatoire va améliorer les choses ? Parce que moi je ne vois pas. Je vois juste que l’on essaye de me faire peur.
Je vous passe la loi Kouchner et le consentement du patient. Cela vous ne l’évoquez pas alors qu’il s’agit d’une question centrale et déontologique. Elle ne semble pas vous préoccuper plus que ça. Parce que l’obligation est ce qui vous motive, ce qui vous fait vibrer. Allez rendons également obligatoire la vaccination antigrippale chez tous les soignants nous dites vous. Alors qu’aucune étude (scientifique) n’en démontre l’efficacité, alors que ce vaccin a une efficacité au mieux modeste et qu’en aucun cas c’est ce qui protégera “le mieux” les patients (les mesures barrière par contre si mais à quoi bon en parler…).
Avec quelques confrères nous nous sommes adressés aux députés pour leur faire part de notre opposition à l’extension de l’obligation vaccinale. Vous y retrouverez nombre d’arguments et de “faits scientifiques”, pas de dramatisation, de généralisation ni de slogan choc.
Pour ma part je reste choqué (le mot est faible) que vous nous adressiez un discours aussi simpliste, aussi peu argumenté et aussi menaçant. Vous vous situez dans une époque que l’on avait cru à tort révolue, une époque où tout est bon pour asseoir son pouvoir : mentir, menacer, effrayer, contraindre. Moi le pouvoir ne m’intéresse en aucune manière. Je souhaite juste exercer mon métier avec lucidité, curiosité, empathie et si possible intelligence. Vous ne m’y aidez pas.
Permettez-moi de vous adresser, Monsieur le Président, cher Confrère, l’expression de mes meilleurs sentiments.
(Big Pharma commence à balancer la grosse artillerie. note de rené)
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