jeudi 19 janvier 2017


Xi Jinping, président de la Chine au Forum économique et social de Davos en Suisse, le 17 janvier 2017. (FABRICE COFFRINI / AFP)
Xi Jinping, président de la Chine au Forum économique et social de Davos en Suisse, le 17 janvier 2017. (FABRICE COFFRINI / AFP)
Il s’est passé, mardi 17 janvier, dans la petite station suisse de Davos, un moment absolument incroyable, un retournement historique qui figurera demain dans tous les manuels. Jamais encore un président chinois n’était venu à Davos et ne s’était ainsi adressé au monde. Et mardi, sanglé dans un costume noir impeccable, chemise blanche, cravate rouge éclatante, quasi impérial, le président chinois s’est exprimé d’un ton grave, celui du vieux sage, pour défendre la mondialisation, le libre-échange et l’ouverture au monde.
 
Lui, Xi Jinping, qui dirige d’une main de fer la Chine communiste, a lancé un appel à continuer la mondialisation, à investir dans les nouvelles technologies, à accélérer la transition énergétique et à renforcer le multilatéralisme. Il faut se frotter les yeux pour y croire. Non, ce n’est pas le président américain qui parle, c’est bien le président communiste chinois. "Toute tentative de stopper les échanges de capitaux, de technologie et de produits est impossible et serait à rebours de l’histoire."  "La mondialisation est attaquée, mise en cause ? Elle n’est pas le problème", affirme le président chinois. Les réfugiés ? "C’est la conséquence de conflits locaux." La crise financière ? "Elle est due à l’échec de la régulation." "La mondialisation, ajoute le dirigeant communiste, a favorisé la croissance mondiale, fait progresser la science et la technologie, bien sûr elle a créé des déséquilibres, mais ce n’est pas une raison pour la balayer !"
 
Un message à Donald Trump et à Theresa May
 
Le propos est d’autant plus fort qu’il est prononcé à l'approche de l'investiture de Donald Trump comme président des Etats-Unis et le jour même où la Grande-Bretagne affirme son retrait définitif de l’Union européenne, par la voix de son Premier ministre Theresa May. Les deux puissances qui ont été les plus ouvertes sur le monde et même les fers de lance de la mondialisation font volte face et décrètent le repli sur le terrain national.
 
On est ainsi complètement à fronts renversés et dans l’affirmation de la puissance chinoise. On l’est d’autant plus qu’à Davos, la Chine n’a pas de contradicteurs, l’Amérique est mobilisée par la passation de pouvoir, Angela Merkel par une campagne électorale qui s’annonce plus dure que prévu. Il n’y a donc personne de poids pour rappeler à la Chine qu’elle est loin d’être exemplaire en matière de libre-échange et surtout qu’elle reste un régime autoritaire, où l’Etat policier vient encore d’être renforcé et où les libertés élémentaires sont farouchement combattues.
 
La Chine n'attend plus son heure
 
Jusqu’ici, les présidents chinois avaient toujours défendu l’idée que leur pays devait jouer profil bas, sans se préoccuper, ni menacer le monde extérieur. Il y avait même cette formule, dans la vulgate communiste, "Cacher ses atouts et attendre son heure". Aujourd’hui, avec Xi Jinping, la Chine pense que l’heure est venue, elle veut s’affirmer comme la deuxième puissance économique mondiale qu’elle est désormais, la première au plan démographique et le premier exportateur mondial. Et une puissance militaire, aussi, puisque la Chine dispose désormais du deuxième plus gros budget mondial consacré à la défense, derrière les Etats-Unis.
 
La Chine ne veut plus mettre son drapeau dans sa poche, elle investit d’ailleurs partout dans le monde. Et elle veut se présenter comme une puissance raisonnable sur la mondialisation ou sur le dérèglement climatique, face aux sorties tonitruantes, foutraques et protectionnistes du nouveau président américain. C’est une sacrée partie qui commence entre ces deux là, et l’Europe serait bien avisée, pour défendre ses propres intérêts, de s’inviter, de s’imposer à la table de ces deux géants.
 
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