mercredi 4 janvier 2017

Evasion fiscale : Juncker, ce loup dans la bergerie
















Pays : Union européenne source : Arte tv  | 
Non, Jean-Claude Juncker n’a jamais été en "croisade" contre l’évasion fiscale des multinationales. Ce n’était qu’une façade : voici la conclusion de l’enquête du journal britannique The Guardian, basée sur des notes transmises par la radio allemande NDR. Ces câbles révèlent les coups de freins répétés du président de la Commission européenne aux projets de réformes de la fiscalité en Europe. L’objectif de cette attitude schizophrène ? Lutter en apparence pour l’équité fiscale en Europe tout en tentant de ne pas se tirer une balle dans le pied, en sabotant son bilan flatteur en tant que premier ministre luxembourgeois. 
L’un des câbles divulgués par le Gardian est en ce sens éloquent : "Il est saisissant de constater comment certains Etats membres se présentent comme des fervents partisans [des réformes fiscales internationales] et en même temps de voir comment ils se comportent concrètement dans les discussions à huis clos, protégées par le secret, de l’Union européenne". Parmi ces Etats membres, le Luxembourg figure en première position d’une poignée de pays à avoir utilisé leurs sièges au sein du "Code de conduite sur la fiscalité des entreprises" pour contrecarrer l'action de l'UE et, surtout, pour protéger les particularités de leurs régimes fiscaux.
Le groupe "code de conduite", un groupe fantoche ?
Ce groupe existe depuis 1998. Il n’est pas juridiquement contraignant, mais les Etats membres l’ayant adopté s’engagent à supprimer les mesures fiscales instaurant une concurrence fiscale déloyale et à s’abstenir d’en créer de nouvelles. Les comptes-rendus des réunions sont tenus secrets. 
Les nouveaux câbles révèlent comment le Luxembourg a su faire pression pour que ce groupe n’ait finalement qu’une portée symbolique et qu’il reste quasi-invisible : "Les représentants du Luxembourg ont affirmé qu’ils allaient, par principe, s’opposer à toute proposition visant à publier les arguments présentés par le Luxembourg au sein du comité ", d’après l’un des câbles.
Voici les propositions phares du groupe, qui ont été systématiquement retoquées par le Luxembourg :

Et Juncker dans tout ça ?
Pourquoi ces révélations embarrassent-elles Jean-Claude Juncker ? Tout simplement parce qu’il a été premier ministre du Luxembourg de 1995 à 2013, avant de présider la Commission européenne. Pendant toute cette période, il a été l’artisan de la politique fiscale du pays visant à attirer les multinationales dans son pays. En d’autres termes, il est celui qui a transformé son pays en mine d’or, qui est aujourd’hui -comme le rappelle le Guardian- un des pays les plus riches du monde par habitant
Et, surtout, il est celui qui a mis en place des accords fiscaux ouvrant la voie à une concurrence clairement déloyale avec les autres Etats membres. Aujourd’hui, en tant que président de la Commission européenne, sa position est difficilement tenable. 

Il était une fois Luxleaks...

A lire aussi :
"La crédibilité de Jean-Claude Juncker sérieusement mise à mal", interview de Sven Giegold, député des Verts au Parlement européen
Comment peut-il ne pas perdre de crédibilité ? En novembre 2014, lorsque le scandale des Luxleaks (voir plus bas) était rendu public, il annonca que "la Commission européenne va lutter contre les fraudes et l’évasion fiscale. […] Ce ne sont pas juste des paroles, mais un objectif ferme". Le député des Verts au Parlement européen, Sven Giegold, avait dressé pour THEMA un premier bilan de cette "croisade" pour une harmonisation fiscale dans l'UE. "Jean-Claude Juncker a proposé un certain nombre de mesures correctives. Mais elles étaient assez timides. A y regarder de plus près, on constate que ces mesures étaient déjà en partie prévues dans les traités internationaux..."
Ces nouvelles révélations enfoncent une nouvelle fois le clou et laisse planer un sérieux doute quant à la motivation réelle du président de la Commission européenne à s'attaquer au problème de l'évasion fiscale. Elles remettent surtout Jean-Claude Juncker sous le feu des critiques. Le 2 janvier, Fabio De Masi député européen de Die Linke, qui a aussi co-présidé le groupe "Code de conduite", a dressé ce constat : "C’est absurde. Des millions d'Européens ont souffert des politiques d'austérité qui ont créé la division sociale. Ils ont désormais le parrain du dumping fiscal à la tête de la commission de l'Union européenne".

Luxleaks, tax rulings, évasion fiscale made in Luxembourg : séance de rattrapage
A voir aussi :
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Les ennuis ont vraiment commencé pour Jean-Claude Juncker avec le scandale des Luxleaks révélé en novembre 2014 par l'International Consortium for Investigative Journalism (ICIJ). Des grandes multinationales comme Apple, Amazon, Pepsi ou encore Ikea ont bénéficié d’accords avantageux avec le fisc luxembourgeois. Très avantageux même : ces dernières ont pu profiter d’un taux d’imposition sur les bénéfices d’1%, bien en dessous du taux officiel de 29%... Ces accords sont des rescrits fiscaux ("tax rulings"). Pour comprendre en deux minutes les Luxleaks et les "tax rulings", regardez notre vidéo :

(Le candidat d'angela merkel, c'est elle qui a insisté pour qu'il obtienne le poste en sachant parfaitement ce qu'il allait y faire. note de rené)

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