Test d'opinion sur le climat dans certains manuels scolaires suisses :(23 août 2024) Un manuel scolaire dans les écoles primaires suisses soumet les élèves à un test d'opinion sur le climat. À mille lieues de tout fondement scientifique.
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Le chapitre porte le titre sans équivoque de « Climate check ». Il ne provient toutefois pas d'une brochure de Greenpeace ou de la fanatique Jeunesse pour le climat, mais d'un manuel officiel d'anglais de la célèbre maison d'édition scolaire Klett und Balmer à Baar, en Suisse. « Young World 4 » s'adresse aux élèves de 6ᵉ année primaire. Sur l'histoire du « Pupil's Book », on peut lire (traduit en français) à côté de l'illustration d'un animal à fourrure en sueur : « Observe l'ours polaire. Lis le texte et discute de ce qui pose un problème. »

Pour que même le dernier des derniers le comprenne, on continue sur cette lancée : « Le réchauffement climatique nous concerne tous. Pour les ours polaires, cela signifie qu'ils ne pourront plus vivre nulle part si la glace du pôle Nord fond. » Ainsi mis dans l'ambiance émotionnelle et sur la bonne voie, les élèves doivent ensuite passer un véritable test d'opinion afin de déterminer leur prétendue « empreinte climatique ». Pour ce faire, loin de toute méthodologie scientifique, des points sont attribués pour les réponses correctes en matière de climat. Les questions correspondantes évaluent non seulement le comportement des élèves, mais également le mode de vie des parents.

Mise en garde contre la consommation de viande

Le « test climatique » aborde différents domaines. Sur le thème « Manger et faire ses courses » (« Eat and shop »), on peut lire : « Je ne vide jamais complètement mon assiette. » Cela donne lieu à quinze points de pénalité. Celui qui « jette parfois de la nourriture » est pénalisé de dix points de malus. Ceux qui adoptent le comportement souhaité et mangent « toujours » tout, reçoivent cinq points. La seule chose qui serait encore mieux pour le climat serait de ne rien manger.

L'évaluation porte également sur ce que l'on mange. Les élèves sont évalués sur leur consommation de fruits et légumes de saison et sur le fait que les aliments sont régionaux et biologiques (« organique »). Ceux qui mangent ce qu'ils aiment sont plafonnés à 25 points. Selon le manuel, les élèves qui mangent de la viande ou du poisson plus ou moins (« more or less ») tous les jours (-30 points) font encore pire que ceux qui s'offrent une banane ou une pomme à la mauvaise saison.

« Je ne vide jamais complètement mon assiette. » Cela vaut quinze points de pénalité.

Bien entendu, les habitudes alimentaires dépendent également dans une large mesure du foyer familial, mais la question du mode de chauffage devient un véritable tribunal pour les parents. Quiconque indique que « notre maison est chauffée à l'énergie solaire ou à une autre forme d'énergie renouvelable » obtient 10 points. En revanche, celui qui vit dans un logement chauffé par une énergie conventionnelle obtient 40 points.

Un pouah ! moyen (20 points) est attribué aux enfants qui prennent un bain une fois par semaine (autrefois, on les aurait félicités pour cela). Ceux qui prennent une douche tous les jours sont tout de même sanctionnés de 10 points. En revanche, ceux qui coupent l'eau pendant qu'ils se savonnent sont récompensés (5 points), sans qu'on leur demande à quelle fréquence et pendant combien de temps, ils ont l'habitude de se doucher de cette manière intermittente.

Les questions concernant la « température ambiante » visent à nouveau directement les parents. Les enfants des ménages qui déclarent : « We never wear pullovers at home in wintertime because they would be too warm », c'est-à-dire qui ne portent pas de gros pulls à la maison en hiver, sont très mal vus (40 points). Les familles qui font sécher leurs vêtements dans le sèche-linge sont également réprimandées (20 points).

Peine maximale pour les voyages en avion

Enfin, le comportement en matière de mobilité est passé au crible : les enfants se rendent-ils « toujours » à l'école à pied ou à vélo (0 point) ? Utilisent-ils parfois (« sometimes ») les transports publics (5 points) ? Ou sont-ils même conduits par leurs parents (10 points) ? Même les vacances sont dénigrées : on dirait presque une incitation à la délation lorsque les élèves doivent indiquer s'ils ont pris l'avion avec leurs parents au cours des cinq dernières années (« in the last 5 years ») (40 points). Les vacances en Suisse ou les voyages en train dans les pays voisins sont semi-autorisés, mais également peu appréciés (10 points). Les personnes qui partent chaque année en vacances avec leur famille reçoivent le plus de coups : ils écopent de 150 points de pénalité.

À la fin, les élèves ont pour consigne de mettre en relation le nombre de points obtenus avec le bien-être de l'ours polaire (« How is your polar bear doing ?»), de se mettre d'accord dans le cadre de discussions de groupe sur un comportement plus respectueux du climat (« Talk about what you can do ») et de s'engager également individuellement à adapter leur propre mode de vie. Au bout d'un mois, les élèves doivent vérifier s'ils ont vraiment adapté leurs actions et leurs activités — et ils doivent comparer cela avec les autres élèves de la classe.

Any questions ? Y a-t-il des questions ?

* Dr. Philipp Gut, né en 1971, est un journaliste suisse et auteur de livres. Il a été chef du service national et rédacteur en chef adjoint de la Weltwoche jusqu'en décembre 2019. Il est éditeur et rédacteur de l'Umwelt Zeitung, écrit des articles pour la Weltwoche et dirige une agence de conseil en communication.

Source: «Weltwoche». https://weltwoche.ch/story/haben-deine-eltern-eine-solarheizung/, 14 août 2024