Bernie Sanders, l’autre Amérique
3 mai 2016 via Yahoo Actualités
Cela fait longtemps que je cherche à résumer Sanders. Ce qu’il provoque chez ses électeurs qui ne veulent pas se résoudre à la politique qu’on leur propose. Ni révolutionnaire, ni néo-bab, il incarne profondément quelque chose de l’Amérique.
Il y a des choses diffuses qu’on peine à résumer, à faire comprendre à vulgariser. Sanders. C’est quoi le phénomène Sanders ? J’étais quelques jours à New-York. On pourrait se dire que Sanders, c’est le candidat des bobos de Meatpaking, Soho, Greenwich… Mais c’est au contraire Hillary Clinton qui a gagné à Manhattan quand Sanders a lui triomphé au nord de l’Etat de New York dans les quartiers moins riches. Sanders candidat écolo bobo… Trop court. Il manque quelque chose.
L’Amérique de Sanders
Ce mardi matin, j’ai peut-être trouvé quelque chose de plus pertinent et le hasard a été encore une fois étonnant. Comme souvent, j’écoutais sur le chemin un vieux morceau de Simon and Garfunkel “America”. Arrivé à la rédaction, je travaille sur les primaires. Je regarde souvent ce que les campagnes produisent comme clips. Ils sont souvent l’expression de messages profonds qui viennent compléter des discours de campagne souvent rodés et très répétitifs. Croyez-le ou non voilà sur quoi je suis tombé là-dessus :
Tout y est. La campagne où l’on travaille à une échelle raisonnée. L’écologie qui va avec. La famille, mais pas celle des Républicains hyper croyants, celle qui prend le temps d’éduquer l’autre. Les villes américaines, oui, mais avec un sens des solidarités. Des gens fragiles, vieux, noirs, qui gardent une place au milieu des autres. Et surtout un candidat sapé comme un prof de fac et qui s’en fout, avec une feuille sur laquelle il a écrit son discours.
Une Amérique où les armes à feu n’étaient pas une norme (oui, c’était ça avant l’arrivée de Reagan dans les années 80), où l’on se dit qu’une sécurité sociale, même imposée, c’est bien. Celle de la lutte pour l’égalité des droits. Celle de la presse indépendante. Une Amérique patriotique et fière de son modèle mais qui ne se dit pas que ses soldats sont ses meilleurs ambassadeurs.
Une victoire sans doute impossible
Cette Amérique, c’est celle qu’au fond nous aimons et qui nous fait rêver. C’est celle des films de Redford, Pollak, Lumet, Nichols. C’est celle que l’on cherche quand on va aux USA, quitte à ne pas vouloir regarder l’autre : celle de Trump, plus égoïste, nationaliste, fermée et fasciné par l’argent facile des Barons-voleurs (Robber Barons). Ou celle de Clinton : pragmatique, cynique, techno et fascinée par l’argent facile de la finance. C’est cette Amérique qui semble aujourd’hui si loin, comme étrangère, mais que beaucoup n’ont pas oublié. Si vous la cherchez, regardez un autre film Bobby. Bobby Kennedy, le “vrai” démocrate, qui avant d’être assassiné a incarné cette autre Amérique. Les coiffures, les costumes ont changé. Mais elle est toujours là.
Cette Amérique là ne gagnera sans doute pas la primaire des Démocrates. Mais le clivage avec l’Amérique d’Hillary est tel que je ne suis pas sûr qu’on la retrouve derrière madame Clinton, la dame de l’establishment. Une gauche réelle contre une gauche de pouvoir. Comme quoi, les débats des uns sont aussi les débats des autres.
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