Pour éradiquer les carpes, l'Australie va répandre un virus dans ses fleuves
L'Australie compte répandre dans ses cours d'eau un virus de l'herpès pour éradiquer la carpe commune, une espèce invasive considérée comme "le pire parasite d'eau douce" de l'île continent.
Les carpes australiennes seront-elles vaincus par l'herpès ? AFP PHOTO / JANEK SKARZYNSKI (c) Afp
INVASIF. Aux grands maux, les grands moyens ? Quinze millions de dollars australiens (9,7 millions d'euros) vont être alloués au plan national pour le contrôle des carpes, un poisson invasif introduit en Australie au milieu du 19e siècle. Barnaby Joyce, ministre australien de l'Agriculture qui s'était rendu célèbre pour avoir mené un combat impitoyable contre les chiens de Johnny Depp entrés illégalement en Australie, a indiqué que les nuisances générées par la carpe commune coûtaient chaque année à l'économie 500 millions de dollars australiens. Sa capacité à survivre dans des eaux chaudes et avec de faibles niveaux d'oxygène a permis à la carpe commune (Cyprinus carpio) de proliférer, notamment dans l'Etat de Victoria et celui limitrophe de l'Australie-Méridionale. Dans certaines zones, des voies navigables sont devenues complètement boueuses à cause de la forte population de carpes, qui déracinent les plantes aquatiques, et près de 90 % des poissons endémiques y ont disparu. Le bassin hydrographique Murray-Darling (sud-est), où le virus doit être en premier libéré vers la fin de 2018, est particulièrement touché par ce fléau, puisque les carpes représentent 80 à 90% de sa biomasse de poissons.
"Au Japon, 70 % des carpes ont disparu en deux semaines"
"Les carpes sont le pire parasite d'eau douce en Australie", a affirmé le ministre australien de l'agriculture dans un communiqué. "Les mesures de contrôle actuelles, les pièges, la pêche commerciale (...) sont coûteuses et globalement inefficaces." Mais une forme de virus de l'herpès,l'Herpesvirose type-3 de la carpe (CyHV-3 ou KHV), s'est révélée efficace. Ce virus s'attaque notamment aux reins, branchies et foie du poisson. Selon l'Agence française nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), la mortalité est observée entre cinq et 24 jours après contamination et peut atteindre 100 % du bassin si la température est favorable. "Nous avons vu dans des lacs au Japon (...) que 70 % de la population de carpe européenne a disparu en deux semaines", a indiqué M. Joyce. Son collègue du ministère des Sciences Christopher Pyne, qui a affublé ce programme du surnom de "Carpageddon", a assuré de son côté que le virus était spécifique à la carpe et n'avait aucun impact sur l'homme. "Soudain, il y aura littéralement des centaines de milliers, si ce ne sont des millions, de tonnes de carpes mortes dans le fleuve Murray", a prédit M. Pyne.
Un moyen radical qui n'est pas sans rappeler l'introduction de la myxomatose pour enrayer la prolifération du lapin européen - également invasif - sur les terres australiennes, dans les années 1950. Une opération de lutte biologique qui avait fait chuter la population de lapins de 900 millions à 100 millions... avant qu'elle ne grimpe à nouveau, les rongeurs étant devenus résistants au virus. Les mêmes problèmes sont aujourd'hui soulevés par cette nouvelle mesure d'éradication de la carpe commune. En témoigne Richard Kingsford, chercheur à l'université de Nouvelle-Galles du Sud (Australie), interrogé par New Scientist : "Je pense que c'est une super idée, mais j'imagine que c'est comme toutes ces approches de lutte biologique : il y a toujours des risques."
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