mercredi 31 mars 2021

 (Une épidémie de pneumonie mortelle a circulé aux Etats-Unis et est arrivé en Europe bien avant l'arrivée du coronavirus en Chine. Mais, le gouvernement américain ne veut pas en parler vu que des accusations ont été portées contre fort detrick, le laboratoire P4 de l'armée américaine. note de rené)


Un SARS-CoV circulait-il bien avant décembre 2019 ? Il y aurait eu deux épidémies

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 a) Une première circulation à bas bruit

 L’agence associated press vient de divulguer quelques conclusions de la mission diligentée par l’OMS pour expliquer comment le SARS-CoV-2 est apparu. Le Dr Anthony Fauci a annoncé un consensus scientifique permettant d’expliquer comment le Covid-19 est apparu chez l'homme. Le virus s’est probablement propagé en Chine en échappant aux radars pendant plusieurs semaines, ce qui lui aurait permis d'être bien adapté au moment où il a été identifié. C’est-à-dire dans la séquence couvrant les premiers cas groupés de pneumonie fin décembre 2019 et la publication de la séquence du virus le 12 janvier 2020. Le rapport complet de 400 pages est attendu prochainement. Mais au fait, est-on certain que la Chine est le seul pays dans lequel « le ou un » virus circulait à bas bruit, produisant des maladies aux signes cliniques proches du Covid mais avec des cas isolés ne permettant pas un signalement par la veille épidémiologique ? 

 b) Le virus était présent en Europe en novembre 2019

 Le professeur Fabrice Carat de l’Inserm a eu l’idée de rechercher la présence d’anticorps dans des échantillons de sérum prélevés sur des volontaires participant à la cohorte Constance dont l’objectif est de créer une banque de bio-données. Parmi les 9000 échantillons analysés, quelque 350 se sont révélés positifs aux anticorps anti-SARS, dont 13 furent prélevés entre novembre 2019 et janvier 2020. Lors d’une enquête clinique, 11 d’entre eux ont témoigné ; 6 n’ont rien signalés d’anormal, mais 5 se sont souvenus d’avoir eu les symptômes d’une maladie respiratoire virale et 8 ont signalé avoir été en contact avec des personnes présentant ce type de symptômes. Les scientifiques de l’INSERM pensent que le SARS-CoV-2 a circulé à très bas bruit en France dès novembre 2019. L’un de ces patients a témoigné pour France Info : « C’était une toux très sèche et très longue, qui durait 20 à 30 secondes. J‘avais l’impression de cracher mes poumons, à tel point que je me suis dit que j’irai voir un médecin ». Un autre témoignage est intéressant : « Une jeune femme de 32 ans qui vit en Bretagne se souvient de plusieurs signes troublants qu’elle avait ressentis à l’époque, et qu'elle n’avait pas su expliquer. "J’avais comme des symptômes de sinusite mais avec une fatigue exceptionnelle au moindre effort, en montant les escaliers par exemple. Ça a duré plusieurs jours." Son mari, lui, toussait beaucoup, "de manière tellement intense que ça l’empêchait de dormir", poursuit-elle » Et pour finir, un troisième signalement : « Une autre jeune femme a présenté un symptôme caractéristique du SARS-CoV-2. "Elle a perdu le goût et l’odorat, explique le professeur Carrat de l’Inserm. Elle avait été en contact avec un membre de sa famille qui avait souffert d’une pneumonie d’origine inconnue entre octobre et décembre, et elle s’était rendue en Espagne en novembre »

 Ces signalements ne sont pas isolés puisque des cas suspects ont été rapportés dans le nord de l’Italie. Les médecins généralistes se souviennent d’avoir suivi des patients âgés ayant les signes d’une pneumonie atypique, « très étrange », pouvant être très grave. Les faits remontent à novembre et décembre 2019. Quelques décès ont été enregistrés.

 c) Diffusion d’un SARS à bas bruit, les jeux militaires de Wuhan

 Les cas signalés en France ne sont pas isolés. L’étude de l’INSEM ne permet pas de calculer l’incidence cumulée pour le mois de novembre mais d’après les chiffres, si un virus respiratoire apparenté au SARS a circulé, il a infecté des milliers de Français, voire des dizaines de mille. Peut-être avez-vous des témoignages dans votre entourage. Je me souviens d’avoir passé une ou deux nuits à avoir ces quintes de toux, en me demandant si je n’allais pas réveiller mes voisins du dessous. Hélas, je ne me rappelle pas la date. Une chose est sûre, c’était avant décembre 2019.

 Un autre fait étrange s’est produit à Wuhan lors des jeux militaires d’octobre 2019. Des dizaines d’athlètes parmi les quelque 9000 participants ont déclaré avoir eu des signes de maladie respiratoire virale, constaté sur place ou bien après le retour à domicile, avec parfois une possible contamination virale d’un proche. Parmi eux un couple de Français, des Suisses, des Belges, des Italiens. La délégation américaine comptait plus de 300 participants dont quelque 200 athlètes. Une corrélation a été établie entre des cas de Covid-19 dans les bases militaires dont sont issus les participants revenus de Wuhan après un transit par l’aéroport de Seattle, capitale de l’Etat de Washington où fut observé l’un des premiers pics épidémique au printemps 2019 (détails supplémentaire sur cet épisode en annexe plus bas)

 Si tous ces faits concordent en faveur d’une circulation à bas bruit du coronavirus dès octobre 2019, on ne comprend pas pourquoi la vague pandémique n’a pas commencé dès novembre. L’hypothèse de deux virus SARS pourrait l’expliquer (cf. mon article sur les deux gains de fonction). Il y aurait eu en fait deux séquences épidémiologiques. D’abord une circulation à très bas bruit avec un virus SARS-X peu contagieux mais transmissible entre humain, puis une mutation adaptative conduisant vers la souche que l’on connaît actuellement. Cette mutation serait apparue à Wuhan, la ville qui organisa les jeux militaires avec en plus des 9000 participants quelque 200 000 bénévoles. La virologie explique comment cela est possible.

 d) Le coronavirus est un virus généraliste

 Parmi les virus, les uns sont considérés comme des spécialistes car ils n’infectent qu’un seul hôte plus quelques espèces apparentées ; en revanche, les virus dits « généralistes » sont capables d’infecter des espèces assez éloignées sur l’arbre phylogénétique. C’est le cas des coronavirus dont les souches gamma et delta parviennent à transiter de leur réservoir d’origine, les oiseaux, vers quelques espèces de mammifères. Les souches alpha et bêta sont hébergées par les chauves-souris mais elles peuvent infecter des espèces assez éloignées, chats, chiens, civettes palmés, chien viverrin, vison et bien entendu les humains.

 Lorsqu’un virus passe de son réservoir habituel vers un spécimen d’une autre espèce, il se réplique en rencontrant des obstacles liés notamment à l’immunité du nouveau hébergeur. En règle générale, le virus n’est pas adapté à son nouvel hôte mais il arrive parfois qu’à la faveur d’un gain de fonction avantageux, il puisse s’adapter et de ce fait, se transformer en une souche contagieuse sans pour autant générer une explosion épidémique. C’est ce qui s’est produit avec les coronavirus SARS en 2002, le MERS en 2012, sans oublier des virus d’autres types. Les virus Nipah, Hendra ou Ebola sont issus de chauves-souris et ont chacun causé des décès par centaines au cours des dernières décennies.

 Les virus généralistes ont deux caractéristiques déterminantes. D’abord ils sont capables de saisir les opportunités pour acquérir du matériel génétique et se transformer en une souche ou un variant. C’est le cas du virus grippal sont le génome segmenté permet les réassortiments (cf. H1N1 en 2009). C’est aussi le cas des coronavirus dont les mutations décisives s’expliqueraient par l’intervention des ARN subgénomiques et la transcription discontinue. Des études ont observé des mutations conduisant à des échanges de « cassettes », un peu à la manière d’un couper coller, engendrant notamment des modifications dans la protéine S dont on connaît l’importance dans l’infectivité du virus. L’autre caractère important du virus généraliste, c’est son évolution en fonction du milieu dans lequel il diffuse. Un virus généraliste est désavantagé dans un environnement stable alors que dans un milieu instable, il trouve des solutions adaptatives, saisissant alors les opportunités pour diversifier son réservoir, avec parfois des mutations avantageuses (Kumar, 2020). En fait, il faudrait renverser l’énoncé en suggérant qu’un environnement instable ou déstabilisé est un facteur favorisant l’émergence de nouvelles souches pour les virus généralistes. L’émergence des virus obéit sans doute à la théorie des équilibres ponctués de Gould et Eldredge que l’on peut concevoir ainsi ; un environnement stable est marqué par des fixations génétiques, une permanence des espèces, de petites variations, alors que les explosions évolutives se produisent lorsqu’une instabilité du biotope devient excessive. Si nous savons une chose en écologie, c’est bien que l’homme est une espèce capable de perturber l’environnement et de déséquilibrer les biotopes. En plus, la circulation des humains dans le monde engendre un terrain favorable aux virus généralistes. Sans compter le commerce des animaux sauvage, l’altération des forêts et en Chine, un colossal bond en avant ayant causé un brassage des populations sans précédent. Rien qu’à Wuhan, onze lignes de métro fonctionnent, transportant chaque jour des millions de passagers.

 La thèse d’une succession de deux épidémies est donc plausible. Entre octobre et décembre 2019, il s’est produit une mutation avantageuse pour le virus SARS diffusé dans le monde à bas bruit et faiblement transmissible. Une recombinaison au sein des humains n’est pas un événement virologique très documenté selon les dires de Dieter Ebert (professeur à l’Université de Bâle) que j’ai interrogé sur ce sujet. En revanche, une série de mutations générant un variant hautement contagieux est possible. Le processus de modification génomique du SARS-CoV-2 répond objectivement au concept de sélection co-évolutive par balayage (sweep), autrement dit, les mutations finissent par produire un variant devenant dominant en se répliquant et en diffusant plus rapidement (Ebert, 2020). C’est ce qui s’est passé pour le variant britannique. Et sans doute, un premier variant dominant a émergé à Wuhan, se dotant d’une protéine S particulièrement performante pour infecter les humains. Si d’aucuns ont déclaré abusivement qu’avec le variant britannique une nouvelle épidémie est arrivé, en revanche, si une nouvelle épidémie s’est déclarée, c’est bien celle qui a émergé à Wuhan après la diffusion à bas bruit d’un variant en octobre 2019.

 e) Les questions en suspens

 Si l’origine naturelle semble la plus plausible, quelques questions subsistent. Quelle est l’origine zoonotique du SARS ? La chauve-souris, un animal intermédiaire, chien viverrin, civette, vison… vivant ou alors congelé si cet animal est consommé ? Par ailleurs, en supposant que le virus ait circulé en octobre à bas bruit en étant transmis par les humains, peut-on retrouver la trace d’un sarbecovirus dans un prélèvement effectué sur des patients ? La signature d’un SARS-related coronavirus est facile à repérer, ne serait-ce qu’en observant quelques séquences protéiques sur S, ORF6, N et E. Finalement, la question posée aux autorités chinoises ne porterait pas tant sur la piste du laboratoire que sur un éventuel défaut de surveillance des maladies respiratoires pressenties comme ayant une origine virale. Ce n'est qu'une possibilité, laissons planer le doute en attendant la publication du rapport définitif ainsi que d'autres invstigations.

Références

Mayank Kumar, Ruchika Bharti, Tushar Ranjan ; The Evolutionary Significance of Generalist Viruses with Special Emphasis on Plant Viruses and their Hosts ; Open Virology Journal, 2020, Vol 14, p.22. http://dx.doi.org/10.2174/1874357902014010022

Ebert, D., Fields, P.D. ; Host–parasite co-evolution and its genomic signature ; Nat Rev Genet 21, 754–768 (2020). https://doi.org/10.1038/s41576-020-0269-1 

https://presse.inserm.fr/le-sars-cov2-circulait-probablement-en-france-des-novembre-2019/42169/

https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/samedi-investigation/covid-19-des-francais-contamines-bien-avant-les-premiers-cas-officiels-temoignent-pour-la-premiere-fois_4348403.html

 

https://www.agoravox.fr/actualites/technologies/article/les-origines-du-sars-cov-2-la-231772

ANNEXE

Observations annexes sur les jeux militaires de Wuhan

Recension sommaire sur l’épidémie des jeux militaires de Wuhan

https://prospect.org/coronavirus/did-the-military-world-games-spread-covid-19/


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