Paris en route pour se doter d'une monnaie locale (France)
La mairie de Paris «travaille très sérieusement sur le sujet». La monnaie pourrait voir le jour à l'automne prochain.
«Nous étudions la possibilité de créer une monnaie locale complémentaire à Paris», indique Antoinette Guhl, adjointe à la mairie de Paris chargée de l'économie sociale et solidaire. «C'est un projet ambitieux mais nous travaillons très sérieusement sur le sujet», ajoute la conseillère du 20ème arrondissement de Paris.
La monnaie pourrait voir le jour à l'automne 2017. «Une étude d'impact sur le sujet est en cours et nous attendons ses conclusions pour en préciser la forme - monnaie fiduciaire ou électronique - la fonction, la fiscalité d'une telle monnaie ou encore les mesures d'accompagnement», explique Antoinette Guhl. «Elle pourrait servir à payer les cantines, les services de la ville par exemple. Rien n'est encore fixé mais la réflexion est ouverte», ajoute l'élue.
Réclamée par les élus écologistes, la proposition avait été discutée lors du Conseil de Paris sur le budget de la ville, en décembre. Dans la foulée, une étude d'impact avait été lancée pour en évaluer les avantages et quelle forme cette initiative pourrait prendre.
Plusieurs associations planchent sur le sujet. «Une monnaie pour Paris» a été créée en 2016 et participe à la réflexion menée par la Mairie de Paris. «La création d'une monnaie locale complémentaire permettrait de créer de nouvelles relations économiques entre les acteurs locaux. Elle répond aussi à une demande des citoyens de pouvoir agir sur le tissu économique local», indique Lucas Rochette-Berlon, président d'«Une monnaie pour Paris». Elle pourrait s'appeler «La Seine», le choix de l'appellation sera soumis à un vote collectif en novembre prochain. Dans un premier temps, les citoyens pourraient se la procurer auprès des «comptoirs de change», imagine Lucas Rochette-Berlon. A terme, le président de l'association rêve d'une ville où une partie du salaire de l'équipe de la mairie et des fonctionnaires seraient versée en monnaie locale puis les entreprises pourraient emboîter ce pas jugé vertueux.
Une quarantaine de monnaies locales en circulation en France
«Les monnaies locales complémentaires sont habituellement lancées dans des territoires de plus petite envergure», souligne Jérome Blanc, économiste spécialisé dans les monnaies locales. Ainsi, en France, une quarantaine de monnaies locales complémentaires circulent et autant sont en projet. L'exemple de «l'eusko» au Pays Basque est souvent cité. D'autres comme «SoNantes», le «Sol Violette» de Toulouse, les «Lucioles» en Ardèche ou la «Gonette» de Lyon, ont démarré plus récemment.
«Les objectifs sont de deux ordres. Les monnaie locales complémentaires permettent d'intensifier les relations économiques dans l'espace local, elles concernent en premier lieu les échanges de biens alimentaires. Elles revêtent également un objectif citoyen car la création même de la monnaie entraîne une mobilisation autour du projet», indique l'auteur de «Les monnaies parallèles. Unité et diversité du fait monétaire». La création du système peut prendre plusieurs formes. Dans un premier temps, les acteurs pourront se procurer la monnaie auprès d'un comptoir local de change. «On peut imaginer un système qui inciterait les particuliers à se procurer cette monnaie en bonifiant le taux de change et à l'inverse on peut appliquer une taxe de conversion», explique Jérome Blanc. Puis le système peut se développer avec des entreprises qui rémunéreraient leurs fournisseurs en monnaie locale et les collectivités locales qui accepteraient cette monnaie pour le paiement de services, comme les billets d'entrée dans les piscines, explique Jérome Blanc.
Plusieurs de ces monnaies complémentaires ont connu un succès retentissant. Ainsi la «WIR» en Suisse est aujourd'hui utilisée par plus de 60.000 entreprises et permet aux habitants de s'autogérer financièrement, indépendamment des aléas économiques du pays. Elle est née en Suisse en 1934, en pleine crise économique: une quinzaine de petites entreprises se sont rassemblées pour pouvoir s'échanger leurs produits, alors même que, faute d'argent, le commerce était au point mort. Autre exemple, le Brixton Pound qui circule dans le quartier de Brixton à Londres. À l'effigie de David Bowie, elle est utilisée par quelques centaines de commerces et elle a contribué à dynamiser le commerce local.
Toutefois, ces initiatives sont limitées à des territoires de moindre envergure. «Il n'existe pas de monnaie locale complémentaire à l'échelle d'une capitale», rappelle Jérome Blanc. Celle de Paris sera donc une première mondiale, encore faut-il que le projet aboutisse.
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