(Des princes saoudiens, réfugiés politique en France, trop drôle. Les mêmes qui financent les djihadistes. note de rené)
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Une purge à Riyad fait frémir Genève
CorruptionEn Arabie saoudite, des centaines d’hommes richissimes ont été arrêtés pour corruption. Grosses conséquences dans le canton.
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Plus d’un milliard de dollars. C’est, selon la presse anglo-saxonne, la somme que le prince Miteb aurait versée au Trésor saoudien pour sa libération cette semaine. Le prince Miteb, ancien ministre de la Garde nationale d’Arabie saoudite, a été arrêté au début du mois et enfermé dans une prison cinq étoiles, le Ritz-Carlton de Riyad, en compagnie de plus de 200 autres personnalités de son genre: des richissimes hommes d’affaires, des princes, des grands pontes de l’économie du royaume.
Tous ont été arrêtés dans le cadre d’une gigantesque campagne de lutte contre la corruption, menée par le nouvel homme fort du pays, Mohammed Ben Salman, dit MBS, qui aurait fait arrêter, ou assigné à résidence, plus d’un millier de personnes en tout.
L’actualité saoudienne est très suivie dans le canton, où cette purge fait frémir. «Il n’y a pas un membre de la famille royale ou un grand acteur financier qui n’a pas séjourné à Genève», indique Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam). «Et ils sont nombreux ceux qui entretiennent une relation bancaire avec des établissements en Suisse.» MBS, selon le Financial Times, a d’ailleurs contacté des banques helvétiques pour en savoir davantage sur leur clientèle saoudienne.
Banques au taquet
Par ces mesures chocs, le prince héritier et vice-premier ministre d’Arabie saoudite depuis cet été entendrait lutter contre la corruption endémique au sein du royaume. Le Trésor public saoudien devrait récupérer une centaine de milliards de dollars dans ce cadre. Le New York Times y voit un «Printemps arabe mené par le haut», d’autres craignent un coup pour écarter des prétendants au trône.
La presse anglo-saxonne fait état de plusieurs milliers de comptes bancaires bloqués dans ce cadre – des centaines d’entre eux auraient déjà été débloqués, les négociations avec Riyad avançant vite. «Vu l’importance de la clientèle moyen-orientale pour Genève, les événements en Arabie saoudite constituent un vrai sujet pour nous», note Edouard Cuendet, directeur de Genève Place financière. Cette fondation, dans sa dernière enquête conjoncturelle, indique que la clientèle moyen-orientale est très importante pour les banques genevoises. Et en croissance.
«Si j’avais été encore actif, j’aurais immédiatement fait un listing des clients saoudiens dans ma banque pour voir qui est concerné, on n’est pas dans le business as usual», souligne Nabil Malek, ex-responsable de la clientèle Moyen-Orient chez UBP, retraité et auteur de nombreux livres bancaires.
À l’inverse, face aux arrestations, la bourgeoisie saoudienne, celle qui n’est pas visée par MBS, prendrait peur et chercherait à transférer sa fortune vers des places plus sûres, en Europe et en Asie surtout. L’afflux d’argent saoudien serait ainsi en forte hausse au sein des banques Pictet, UBP, EFG et Julius Bär, selon une source.
Biens immobiliers exposés
À l’hôtel Ritz-Carlton de Riyad, les négociations seraient difficiles. Le Daily Mail a fait état de tortures et les téléphones sont confisqués. Les personnalités ont deux options, a fait savoir MBS au New York Times: une procédure en justice ou un accord. L’écrasante majorité aurait opté pour la seconde et beaucoup auraient déjà versé une grosse partie de leur fortune – jusqu’à 70% de leurs biens – au Trésor public saoudien. Ce qui génère de grosses spéculations.
«Si les personnalités arrêtées doivent payer, vu les montants en jeu, elles seront, c’est sûr, amenées à vendre leurs biens pour trouver du cash», estime Nabil Malek. À Genève, plusieurs grands hôtels ont appartenu – ou appartiennent encore – à des Saoudiens, de l’Hôtel Intercontinental au Crown Plaza en passant par le Kempinski. L’Hôtel des Bergues aurait été vendu par le prince saoudien Alwalid Bin Talal Alsaud, un milliardaire habitué de la Suisse, aujourd’hui retenu dans le Ritz-Carlton de Riyad. Le fils du roi Fahd, dont l’épouse est propriétaire d’un palais à Collonge-Bellerive, a également été arrêté. De nombreux cheikhs ont investi sur les rives du Léman, côté français.
Face aux purges, d’autres pourraient choisir de s’exiler, selon un observateur. Le frère du prince Miteb vient d’ailleurs de faire une demande d’asile à la France. «Les Saoudiens placent souvent leur argent en Europe, une région stable, de même que dans certains pays d’Asie comme Singapour», affirme de son côté Jean-Marc Rickli, chercheur au Geneva Centre for Security Policy. «Les incertitudes immenses en Arabie saoudite ne peuvent que renforcer cette tendance.»
«Un grand point d’interrogation»
On s’interroge aussi sur le front du tourisme. «L’année 2018 sera un grand point d’interrogation car en plus des difficultés conjoncturelles, il y a cette vague d’arrestations en Arabie saoudite et elle pose beaucoup de questions», a remarqué Thierry Lavalley, président des hôteliers genevois, dans un discours tenu à l’assemblée générale d’automne des hôteliers, le 20 novembre, à l’hôtel Président Wilson.
«Pour l’instant, on ne ressent aucun impact, mais heureusement que ces arrestations ont eu lieu en novembre. Si elles avaient eu lieu en mai, avant la saison d’été, on aurait été très inquiet», poursuit un autre hôtelier. L’importante clientèle saoudienne vient en effet surtout durant la saison d’été.
Du côté des loueurs de limousines, qui en dépendent aussi beaucoup, on recense de nombreuses faillites. «Les difficultés ne datent pas de la dernière purge, confie l’un d’eux. Mais de la crise du pétrole, des difficultés avec le Qatar et de l’avènement de MBS au pouvoir (ndlr: il a été nommé vice-premier ministre saoudien le 23 juin). Cet été, il n’y avait aucun Saoudien à Genève.»
Pour les chauffeurs de limousine, les temps sont d’autant plus difficiles que depuis plusieurs années, les touristes saoudiens émanent moins des classes les plus riches et font donc peu appel à leurs services. De janvier à septembre 2017, les nuitées saoudiennes en Suisse ont chuté de 8,3%, selon l’Office fédéral de la statistique. (TDG)
Créé: 01.12.2017, 17h55
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