mardi 7 mars 2017

(attali se permet de donner des leçons de morale à la classe politique française alors qu'il en a été l'un des plus grands profiteurs et en reste l'un des plus grands prédateurs au service de la finance américaine et des multinationales. note de rené)

Le président Jacques Attali contraint à démissionner de la BERD

PATRICK DE JACQUELOT - LES ECHOS | LE 28/06/1993

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Le président de la Banque pour l'Europe de l'Est quitte son poste après les nombreuses révélations sur son train de vie et le mode de gestion, contesté, de son établissement.
De notre correspondant à Londres.

Jacques Attali a annoncé vendredi sa démission de son poste de président de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Cette décision résulte de la campagne menée contre lui dans les milieux anglo-saxons, alimentée par de nombreuses révélations sur les dépenses somptuaires de la BERD et le train de vie de Jacques Attali.

Après plusieurs mois de lutte pour sa survie à la tête de l'institution qu'il a créée voici deux ans, l'ancien conseiller de François Mitterrand a jeté l'éponge à la veille du week-end. Dans une lettre adressée à Anne Wibble, ministre suédois des Finances et actuelle présidente du Conseil des gouverneurs de la banque, Jacques Attali affirme que l'établissement est soumis depuis quelques mois « à une attention négative croissante de la presse. Aucune de mes actions ne pourrait en quelque façon que ce soit mériter un reproche ", poursuit­il, avant de souligner l'effet négatif de cette campagne sur le travail de la banque et sur ses équipes. « C'est en pensant à l'intérêt de la banque que j'ai pris cette décision », conclut Jacques Attali, qui conservera ses fonctions jusqu'au choix de son successeur.

Cette démission brutale met fin à deux années de relations très difficiles entre Jacques Attali et les milieux politiques, financiers et journalistiques anglo-saxons. Choisi comme premier président de la BERD, un établissement créé pour favoriser la transition des pays de l'Est vers l'économie de marché, en raison de l'origine française de cette idée, Jacques Attali avait tout pour déplaire à ses interlocuteurs anglo-saxons.

A une hostilité latente est venue s'ajouter de solides ranceours à l'intérieur de l'établissement, où le style de gestion du président lui a suscité beaucoup d'ennemis, qui ont alimenté la presse britannique en révélations de plus en plus embarrassantes.
La campagne menée contre Jacques Attali depuis avril dernier, dans laquelle le « Financial Times », quotidien des milieux d'affaires britanniques, a joué un rôle prépondérant, s'est focalisée sur le train de vie de la BERD. Les accusations ont porté sur le coût d'installation du siège de la banque (55 millions de livres) et notamment sur la destruction des revêtements de marbre, remplacés par d'autres plus luxueux, pour une facture de 750.000 livres. Le goût de Jacques Attali pour les avions particuliers a été abondamment souligné, de même que le laxisme des procédures et des contrôles budgétaires, qui laissaient apparemment une grande latitude à la direction de l'établissement.
Vendredi matin, les accusations ont pris un tour plus personnel avec un nouvel article du « Financial Times » faisant état de double remboursement de billet d'avion à Jacques Attali et de nouveaux vols privés affrétés par lui pour se rendre à Paris. En outre, le président de la BERD aurait été payé pour prononcer certains discours, en contradiction apparente avec le règlement de la banque, qui précise qu'aucune rémunération extérieure ne peut être acceptée. Jacques Attali aurait récemment entrepris de rembourser le coût de ces trajets en avion à la banque et aurait fait don de ses cachets pour conférences à des organisations charitables. Un audit consacré au train de vie de la banque devrait être terminé le mois prochain. Il permettra d'y voir plus clair sur ces différentes questions, mais Jacques Attali n'a donc pas souhaité en attendre la publication.
Une image dégradée

Quels que soient le bien-fondé ou la gravité de chacune de ces accusations prise isolément, leur impact global a été considérable: l'image qui s'est dégagée est celle d'un établissement plus intéressé par son train de vie que par l'aide concrète aux pays ex-communistes, une banque aux procédures de gestion douteuses, une institution

internationale utilisée par Jacques Attali comme sa chose personnelle et eouvrant autant à la promotion de son président qu'à celle de l'économie de marché en Europe de l'Est.
Exagérée ou pas, cette image n'a pas été améliorée par le plan de réformes hâtif de la BERD élaboré par son président, M. Attali, tout récemment pour tenter de conserver son pouvoir. Le président de la banque a essayé ces quinze derniers jours de faire accepter par les pays actionnaires une refonte de l'institution, qui aurait comporté la création d'un poste de directeur général effectif des opérations, confié à Ernest Stern, actuel numéro deux de la Banque mondiale. Jacques Attali se serait retrouvé dans un rôle non opérationnel, qui aurait pu rendre acceptable, espérait­il, son maintien au poste de président.

Mais un tel projet, qui comportait la fusion des branches de banque de développement et de banque d'affaires, a suscité l'inquiétude de certains actionnaires de la BERD, craignant de voir celle-ci perdre sa spécificité et devenir une simple banque de développement comme les autres. En outre, le projet a déstabilisé l'état-major. Ron Freeman, responsable de la banque d'affaires, qui aurait été « rétrogradé » au quatrième rang au lieu du poste de deuxième qu'il occupe actuellement, s'est élevé contre Jacques Attali, qu'il avait jusqu'ici soutenu.

Le plan de réforme de la BERD devra maintenant sans doute attendre la nomination du nouveau président, un poste pour lequel on avance déjà les noms de l'Américain Ernest Stern et du Hollandais Onno Rudding, qui, en tant qu'Européen, a les meilleures chances. Sans faire de commentaires sur la démission de Jacques Attali, le ministre français des Affaires étrangères a cependant clairement indiqué hier que le choix de son successeur devrait se porter sur un candidat français. « La France a une sorte de crédit moral sur cette institution », a déclaré Alain Juppé devant « Le Grand Jury RTL- Le Monde " ", faisant allusion au partage qui s'était fait entre Londres (qui avait hérité du siège de la BERD) et Paris (à qui avait échu la présidence).
Patrick de Jacquelot


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