Monsanto : les dessous d’un lobbying ….
via Les Moutons Enragés
L’empoisonneur va-t-il continuer ses méfaits ? En septembre la commission européenne doit statuer sur l’autorisation du glyphosate et, l’Agence européenne des produits chimiques et l’Agence européenne de la sécurité des aliments, ont classé le glyphosate sans danger, en se basant entre autre, sur des études fournies par des entreprises privées. Merci Jean Christophe L.
Les avocats d’agriculteurs américains victimes du Roundup viennent de publier des documents internes qui révèlent les multiples pressions du groupe agro-industriel. Qui cherche depuis des années à discréditer des études scientifiques sur la nocivité de son herbicide.Le Roundup est-il cancérigène ? C’est la question au cœur d’un procès opposant actuellement le géant des pesticides Monsanto à un millier d’Américains ayant été atteints d’un lymphome non-hodgkinien, un cancer touchant le système lymphatique. Les plaignants, des agriculteurs et leurs proches, ont utilisé pendant plusieurs années le Roundup, un herbicide à base de glyphosate, produit phare du groupe Monsanto, qui devrait être racheté 56 milliards d’euros (lire l’encadré) par le géant allemand Bayer.Les cas sont disséminés entre la cour fédérale de San Francisco et des tribunaux dans le Missouri, le Delaware et l’Arizona. Et pas moins de 75 documents relatant des échanges internes de l’entreprise ont été publiés le 1er août sur le site des avocats des parties civiles, le cabinet Baum, Hedlund, Aristei & Goldman (BHAG). Ils révèlent des tentatives d’influencer la communauté scientifique, et viennent relancer une polémique sanitaire vieille de presque quarante ans.Monsanto a rapidement dénoncé la publication de ces mails confidentiels. «Les avocats des plaignants ont décidé de violer les règles du tribunal et de publier des documents, pour faire leur procès auprès de l’opinion publique. C’est malheureux», déplore auprès de Libération Scott Partridge, le vice-président en charge de la stratégie de la firme. Michael L. Baum, associé gérant du cabinet qui défend les plaignants, nous explique : «Nous avons déposé une requête pour demander à ce que les documents produits lors des divulgations deviennent publics. Nous en avons informé Monsanto le 30 juin. Nous les avons rencontrés pour examiner les documents un par un. Ils ont refusé de le faire. Ils avaient trente jours pour contester notre requête.»Entre ces sons de cloche discordants, le juge de la cour fédérale de San Francisco a tenté de trancher. Il a convoqué les deux parties le 9 août et a assuré qu’en n’attendant pas la décision de justice, le cabinet BHAG avait fait preuve de mauvaise foi. Il lui avait laissé jusqu’au 14 août pour déposer des preuves justifiant ses actions. Une nouvelle audience pour déterminer d’éventuelles sanctions se tiendra jeudi.Campagne médiatiqueFlashback. En 1974, Monsanto commence la commercialisation du Roundup. Dès 1996, l’entreprise de biotechnologie développe des variétés de maïs et de soja transgéniques, capables de résister au Roundup. Le brevet d’utilisation du glyphosate tombe dans le domaine public en 2000. Aujourd’hui, c’est l’herbicide le plus utilisé dans le monde. Depuis les années 70, de nombreuses études ont tenté de déterminer s’il était cancérigène ou non, sans tomber d’accord.En 2012, le professeur Gilles-Eric Séralini, un biologiste de l’université de Caen, publie une étude sur le Roundup et le maïs transgénique NK 603, dans la revue scientifique Food and Chemical Toxicology. Elle détermine que ces deux substances provoquent, chez des rats exposés pendant deux ans, de graves perturbations hépatiques, rénales, hormonales et l’apparition de tumeurs mammaires. Les messages internes de Monsanto de l’époque, rendus publics par les avocats de BHAG, montrent une claire volonté de mettre en place une campagne médiatique pour discréditer cette étude. Monsanto a demandé à des experts se revendiquant indépendants d’inonder de lettres le rédacteur en chef de Food and Chemical Toxicology pour demander le retrait du travail de Séralini. Avec succès. David Saltmiras, scientifique employé par Monsanto, s’en vante même dans un mail : «J’ai aidé à l’envoi de nombreuses lettres d’experts indépendants au rédacteur en chef, qui furent ensuite publiées, reflétant les nombreuses défaillances, la mauvaise conception, le rapport biaisé et les statistiques sélectives employées par Séralini.»Monsanto avait même déjà réussi à rallier le rédacteur en chef de la revue, Wallace Hayes. Seulement quelques semaines avant la publication de l’étude, fin août 2012, il est devenu consultant pour la firme agro-industrielle. Dans un autre mail, David Saltmiras avoue : «Durant la période de publication de l’étude Séralini, j’ai mis à profit ma relation avec le rédacteur en chef du journal […], et j’ai fait la liaison entre Monsanto et le journal.» Hayes s’est défendu il y a quelques semaines dans le New York Times : «Monsanto n’a joué aucun rôle dans la décision qui a été faite de retirer [l’étude]. Ce fut basé sur des avis que j’ai reçus de quelques personnes très respectées et aussi de ma propre appréciation.» Même discours du côté de Monsanto : «Plusieurs sources ont fait remarquer au rédacteur en chef que les données scientifiques étaient fausses. Après un examen plus poussé, il a indépendamment décidé de retirer l’étude», explique Scott Partridge. Et d’ajouter, sans se démonter : «Oui, il travaillait pour Monsanto à l’époque, mais cela n’avait aucun lien…»Conclusions orientées…/…Auteur Ariane Debernardi pour Libération
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