À Gorino, les villageois érigent des barricades contre les migrants
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Apprenant que 12 demandeuses d’asile et leurs enfants étaient sur le point d’arriver pour être logés dans leur village, quelques dizaines d’habitants de Gorino ont bloqué la route et obtenu gain de cause. “Une honte” pour certains journaux, la manifestation d’une “Italie à bout de patience” pour d’autres.
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Gorino est une partie du village de Goro, dans la région de Ferrare, delta du Po, décrit le quotidien régional Il Resto del Carlino. “Dans ce coin-là, les villages, les bourgs, et les bourgades sont minuscules et orgueilleux. On ne sait pas exactement combien de personnes vivent à Gorino. Certains disent 200, d’autres 300. Il y a ceux qui comptent les amis et les parents de passage, et ceux qui ne le font pas”.
“C’est le genre d’endroits, poursuit le journal, où il suffit de klaxonner avec insistance” pour ameuter tout le village. Et c’est en quelque sorte ce qu’il s’est produit le 24 octobre, relate La Stampa, quand le bruit a couru que, sur ordre du préfet de Ferrare, 12 demandeuses d’asile et leurs enfants allaient arriver, le jour même pour être logés dans un hôtel. “La suite, on la connaît”, reprend Il Resto del Carlino : quelques dizaines de villageois ont érigé “des barrages routiers et monté la garde pendant la nuit” en protestant : “Jamais ces migrantes n’entreront dans l’hôtel, quoi qu’il nous en coûte.” La médiation des forces de l’ordre a échoué, et le bus a fait demi-tour.
“C’est le genre d’endroits, poursuit le journal, où il suffit de klaxonner avec insistance” pour ameuter tout le village. Et c’est en quelque sorte ce qu’il s’est produit le 24 octobre, relate La Stampa, quand le bruit a couru que, sur ordre du préfet de Ferrare, 12 demandeuses d’asile et leurs enfants allaient arriver, le jour même pour être logés dans un hôtel. “La suite, on la connaît”, reprend Il Resto del Carlino : quelques dizaines de villageois ont érigé “des barrages routiers et monté la garde pendant la nuit” en protestant : “Jamais ces migrantes n’entreront dans l’hôtel, quoi qu’il nous en coûte.” La médiation des forces de l’ordre a échoué, et le bus a fait demi-tour.
“Une honte”, s’emporte le Messaggero Veneto dans son éditorial.
Si, jusqu’à présent, Goro et Gorino étaient surtout associées à leurs délicieuses palourdes, désormais, leur réputation sera liée à l’image misérable des barricades élevées contre douze pauvres femmes qui ont fui l’horreur de la traite humaine pour tomber dans la cruauté de personnes dans lesquelles il nous est impossible de reconnaître nos concitoyens”.
“Ce n’est pas ça, l’Italie”
Pour Il Resto del Carlino, l’“incident” aurait pu être évité si les autorités avaient pris la peine d’informer correctement les habitants à propos des nouveaux arrivants, empêchant ainsi que “l’imagination [ne] parte au galop”. Le journal relève néanmoins que “sagement, le préfet de Ferrare a trouvé une autre solution” pour les loger ailleurs. Mais, indigné par l’affaire, le ministre de l’Intérieur a déclaré : “Ce n’est pas ça, l’Italie.”
“Vous plaisantez ?” lui rétorque Libero. “Si Goro et Gorino, sur le delta du Po, où l’eau coule mêlée de doutes et de craintes, de difficultés liées à la crise, et toutes ces choses que vous devriez connaître, depuis votre palais, si ça n’est pas l’Italie, quel est, de grâce, le vrai pays ?”
Au contraire, martèle le quotidien : “C’est ça, la véritable Italie, qui a peur aujourd’hui. L’Italie aux prises avec une vague migratoire sans précédent.” Fin octobre, le pays comptait 153 000 arrivées depuis le début de l’année, un record absolu.
En une, le journal populiste annonce le “premier succès d’un soulèvement populaire contre l’invasion”. Il observe que “l’onde de choc” est en train de se propager “et promet de devenir un tsunami, parce que l’exemple de Gorino pourrait être imité par d’autres en Italie”.
Un monde hors de contrôle
C’est aussi la crise, et “l’appauvrissement moral qu’elle induit”, que l’éditorialiste de La Repubblica invoque pour analyser, plutôt que justifier, la colère de Gorino.
La crise la plus longue de l’après-guerre, le manque de travail, l’érosion de l’épargne, le chômage des jeunes, le terrorisme djihadiste : ensemble, ces phénomènes donnent la sensation d’un monde hors de contrôle, sans gouvernance, avec une mondialisation qui devient une menace.”
“Ce mélange de perte de repères, de solitude, de panique face au présent et d’angoisse face à l’avenir se décharge facilement et immédiatement sur l’immigré, estime le journal de centre gauche, particulièrement dans des petites communautés” où l’on craint de perdre ce qui constitue l’identité du lieu, de finir “‘globalisés’, chez soi, tandis que le monde tourne autour de nous sans qu’on ne soit plus capable de le maîtriser”.
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