Bayer perd un quart de sa valeur en un mois
AgrochimieLe raid à 62 milliards sur l’américain Monsanto coûte cher au géant allemand. Son titre s’effondre en Bourse
Par Thomas Thöni source : La Tribune de Genève
24.05.2016
Après des jours de rumeurs, Bayer a finalement rendu publics les détails de l’offre d’achat qu’il a remise le 10 mai à Monsanto, «après qu’un membre du conseil d’administration de Monsanto a vendu la mèche sur ses intentions», a expliqué hier en fin de journée le groupe pharmaceutique et chimique allemand. Le fabricant de l’aspirine est prêt à mettre sur la table 62 milliards de dollars (61,5 milliards de francs) pour racheter la multinationale américaine, leader mondial des OGM et numéro cinq dans les produits phytosanitaires, ce qui a précipité la chute du titre Bayer. Il a perdu un quart de sa valeur en un mois. Monsanto est connu pour avoir produit le défoliant «agent orange» pendant la guerre du Vietnam, ainsi que pour son désherbant non sélectif à base de glyphosate, le Roundup, très discuté en Europe.
Si cette affaire devait aboutir, il s’agirait de la plus importante acquisition jamais réalisée par une entreprise allemande. Bayer-Monsanto serait aussi propulsé leader mondial de l’agrochimie et des OGM où les six plus importants acteurs sont tous en train de se marier les uns avec les autres, à l’exception notable de l’allemand BASF (voir infographie).
Pour l’instant, le groupe américain a simplement confirmé avoir reçu l’offre en question. On se rappelle que le bâlois Syngenta, lui-même leader mondial des produits phytosanitaires et numéro trois mondial des OGM, avait refusé trois offres de rachat formulées par Monsanto au printemps et en été 2015, pour finalement accepter une offre de ChemChina, au prix de 43 milliards de dollars, le montant le plus élevé jamais offert par une entreprise d’Etat chinoise hors de ses frontières.
Bayer a-t-il vu un intérêt dans Monsanto que Syngenta aurait manqué? Michel Demaré, le président de Syngenta, avait à plusieurs reprises expliqué ce refus d’un rapprochement avec la multinationale américaine par un prix offert insuffisant, qui ne reflétait pas la valeur de l’entreprise bâloise. Il avait aussi souligné qu’une fusion Syngenta-Monsanto aurait obligé le groupe bâlois à vendre complètement son activité OGM, où il occupe la troisième place mondiale, avec 8% du marché. Et la volonté de Monsanto de transférer son siège mondial à Bâle n’aurait pas été acceptée par le fisc américain, désormais très attentif à cet aspect.
Rien de tout cela si Bayer rachète bel et bien Monsanto. Le groupe allemand a précisé en fin d’après-midi «que les portefeuilles de produits des deux groupes sont très complémentaires et ne nécessiteront pas d’ajustements». C’est étonnant, car Syngenta et Bayer occupent en fait les mêmes positions: ils sont les deux très forts dans ce qui est appelé la protection des plantes, en occupant respectivement le premier et le deuxième rang mondial, mais en queue de liste pour ce qui est des OGM.
Bayer a aussi indiqué que son importante dépendance aux Etats-Unis, ou Bayer-Monsanto réaliserait 45% de ses recettes, n’est pas un problème puisque c’est le marché des OGM et des produits phytosanitaires le plus important. L’autorité de contrôle américaine des investissements étrangers (CFIUS) «ne devrait non plus pas être un écueil, car nous sommes depuis très longtemps en Amérique où nous y employons davantage de personnes que Mon santo». On est par contre toujours sans nouvelle de cette autorité en ce qui concerne ChemChina (Syngenta est très actif aux Etats-Unis), qui a dû prolonger son offre d’un mois. (TDG)
(Créé: 23.05.2016, 21h58)
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