jeudi 17 décembre 2015

Arbitrage Tapie: Christine Lagarde renvoyée en procès, le FMI lui garde sa confiance

La patronne du FMI Christine Lagarde a été renvoyée jeudi en procès en France pour négligence dans la gestion de l'arbitrage Tapie, une perspective embarrassante pour l'ancienne ministre de l'Economie à qui l'institution internationale a renouvelé sa confiance.
Christine Lagarde a immédiatement annoncé un recours contre cette décision devant la Cour de cassation, ce qui lui concède un sursis alors que son premier mandat à la tête du Fonds monétaire international se termine le 30 juin 2016 et qu'elle s'est dite ouverte à l'idée d'en briguer un second.
Le FMI lui a renouvelé "sa confiance", peu après l'annonce de son renvoi en procès devant la Cour de justice de la République (CJR), seule instance habilitée à juger les délits commis par des membres d'un gouvernement en fonction.
Dans la foulée, le ministre français des Finances, Michel Sapin, a affirmé depuis New York qu'elle était "présumée innocente" et pouvait rester à son poste.
Sept ans après, c'est l'arbitrage rendu en 2008 par un tribunal privé, accordant plus de 400 millions d'euros à l'homme d'affaires Bernard Tapie pour clore son litige avec le Crédit Lyonnais sur la vente d'Adidas en 1994, qui vient rattraper l'ancienne ministre de l'Economie de Nicolas Sarkozy.
Cette sentence arbitrale, au centre d'une enquête pénale pour escroquerie en bande organisée, a été annulée en février 2015, la justice estimant qu'elle était entachée de fraude. Le 3 décembre, la cour d'appel de Paris a condamné Bernard Tapie à rembourser les 404 millions d'euros.
Le choix de tourner le dos à la justice ordinaire et de recourir à cet arbitrage pour résoudre une affaire mettant en jeu des deniers publics avait été vivement contesté à l'époque, alors que la Cour de cassation avait cassé une décision indemnisant Bernard Tapie à hauteur de 135 millions d'euros.
Christine Lagarde avait donné des instructions aux représentants de l'Etat au sein des structures gérant l'héritage de l'ancienne banque publique pour aller à l'arbitrage et pour ne pas contester la sentence rendue en juillet 2008.
- 'L'intérêt de l'Etat' -
Dans un communiqué jeudi, elle réaffirme qu'elle "a toujours agi dans cette affaire dans l'intérêt de l'Etat et dans le respect de la loi" et estime qu''aucune charge [ne peut lui] être imputée".
Lors de sa mise en examen, fin août 2014, les magistrats de la CJR l'avaient pressée de questions: pourquoi n'avait-elle pas approfondi l'étude du litige, pourquoi des notes de l'Agence des participations de l'Etat (APE) déconseillant le recours à l'arbitrage avaient-elles été ignorées, pourquoi ne pas avoir fait confiance à la justice ordinaire?
Christine Lagarde avait répondu que "la solution de l'arbitrage allait dans le sens de l'efficacité". Lors de précédentes auditions, elle avait affirmé que son directeur de cabinet de l'époque, Stéphane Richard, l'avait tenue dans l'ignorance d'une réunion cruciale le 30 juillet 2007 à l'Elysée, en présence de Bernard Tapie lui-même.
Jeudi, Christine Lagarde a rappelé que le ministère public au sein de la CJR avait pris des réquisitions de non-lieu en septembre.
La commission d'instruction de la CJR en a décidé autrement et l'a renvoyée devant la formation de jugement, composée de trois magistrats, six députés et six sénateurs.
Le délit de négligence dans la gestion de fonds publics est puni d'un an de prison et 15.000 euros d'amende.
Dans le volet non ministériel de l'affaire, les juges d'instruction ont mis en examen six personnes pour escroquerie en bande organisée: Bernard Tapie, son avocat Maurice Lantourne, l'un des juges arbitres Pierre Estoup, Stéphane Richard, aujourd'hui patron d'Orange, et deux anciens présidents des structures gérant l'héritage du Lyonnais.
Tous sont soupçonnés d'avoir participé à un "simulacre" d'arbitrage. Les juges visent notamment des relations cachées aux parties entre Bernard Tapie, son avocat Maurice Lantourne et Pierre Estoup, soupçonné d'avoir orienté la sentence en faveur de l'homme d'affaires. Celle-ci lui accordait notamment 45 millions d'euros pour le préjudice moral, un chiffre qui avait fait polémique.
(Responsable, mais, pas coupable, c'est-à-dire complice et de cela, elle ne se reconnaît pas. Pourtant, elle a signé alors que son administration n'était pas d'accord sur la légalité de son acte ! Le FMI est décidément un panier de crabes. note de rené)

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