Par pitié, épargnez-nous ce cadeau de 700 millions d’euros
source : Courrier international. Belgique
Publié le Dessin de Lichuan, Chine.
La Belgique a été épinglée par la Commission européenne pour son système d’exonération d’impôts destiné exclusivement aux multinationales. Pour compenser, elle devra leur prélever environ 700 millions d’euros. Et bizarrement, c’est loin d’être une bonne nouvelle pour Bruxelles.
A priori, c’est une sanction de la Commission européenne qui sonne comme une bien bonne nouvelle pour les comptes de l’Etat en ce début d’année : la Belgique, coupable d’avoir accordé des conditions fiscales trop favorables aux multinationales, devra prélever environ 700 millions d’euros à au moins 35 d’entre elles. C’est-à-dire récupérer l’avantage dont elles ont bénéficié au cours des dix dernières années.
En ligne de mire : le tax ruling, un dispositif réservé aux grandes entreprises et qui leur permet de s’exonérer d’impôts sur leurs “profits excédentaires”, ce qui correspond dans les faits à une part située entre 50 et 90 % de leurs bénéfices, comme le détaille le magazineLe Vif-L’Express. Le journal néerlandophone De Morgen explique de son côté que ce système date d’une dizaine d’années :
C’était une époque où les Etats membres de l’UE essayaient de se damer le pion et rivalisaient d’inventivité pour attirer les grandes entreprises. Une musique sur laquelle les multinationales ont dansé à l’envi pendant des années : un petit détour en Irlande par-ci, une petite boîte aux lettres au Luxembourg par là.”
Cette musique s’est arrêtée, poursuit le quotidien de centre gauche, qui en veut pour preuve l’éclosion de scandales comme celui de LuxLeaks ou cette dernière condamnation de la Belgique, obligée par la Commission à remplir ses caisses.
Le ministre en deuil
On penserait que “c’est forcément une bonne nouvelle, en ces temps de disette, d’obtenir 700 millions des grandes entreprises”, commente Bertrand Henne sur les ondes de la RTBF. Mais non, visiblement pas aux yeux du ministre des Finances, Johan Van Overtveldt (du parti nationaliste flamand N-VA, droite), qui se montre “très ennuyé”. “Dans son communiqué de presse, il ne manquait que le bandeau noir du deuil”, renchérit De Morgen.
“Pourquoi ?” reprend le chroniqueur de la RTBF. “Parce qu’il craint tout simplement que les 35 multinationales concernées par les remboursements [quittent] la Belgique ou à tout le moins n’y investissent plus…” De fait, estime-t-il, “si la Commission veut mettre fin au chantage fiscal, il faut qu’elle frappe partout, pas seulement [qu’elle fasse] un exemple avec la Belgique…”
Quant à l’éditorialiste du Morgen, il conclut :
On ne peut pas exiger du gouvernement qu’il se réjouisse de cette correction infligée par l’Europe. Mais pourrait-il tout du moins cesser de faire croire qu’il n’y a que dans notre sécurité sociale qu’on trouve des profiteurs ? Ça semblerait un tout, tout petit peu moins hypocrite.”
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