La guerre des Papous fait rage en Indonésie
Plusieurs responsables religieux protestent contre l'assassinat, par la police indonésienne, de quatre indépendantistes papous. Une exaction qui s'inscrit dans un contexte de vol de terres ancestrales.
La momie d'un ancien chef est déposée au cœur du village pour une cérémonie dédiée aux esprits (Indonésie - Papouasie occidentale) ©BLANCHE-ANA / ONLY WORLD / ONLY FRANCE
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Le 1er décembre 2015, la torture puis l’assassinat de quatre Papous indépendantistes a soulevé la colère des responsables religieux chrétiens. De plus, le 20 décembre, un Papou était abattu par la police. Le Révérend Sofyan Yoman, président de la Communion des Églises baptistes de Papouasie, dénonce : « Tous ces assassinats font partie du plan des services secrets indonésiens qui veulent faire passer les Papous pour des criminels et des séparatistes »(Église d’Asie).
Le 26 décembre 2015, dans le district de Puncak, ce sont trois policiers indonésiens qui ont été tués par un groupe armé en train de dérober des armes et des munitions au commissariat de police de Sinak, selon Andreas Harsono, de Human Rights Watch.
Le feu couve
En 2002, le documentaire « West Papua » de Damien Faure, avait sorti pour un temps de l’ombre le conflit qui agite cette région. Il dénonçait une politique d’extermination larvée. Bien qu’aucune statistique officielle n’existe sur le sujet, il estimait que des dizaines de milliers de Papous avaient été exécutés en toute impunité par l’armée et la police indonésiennes. Pour l’Indonésie, l’exploitation des ressources minières de la région représente une manne cruciale. La province de Papouasie détient les troisièmes plus importantes réserves de cuivre et les deuxièmes plus importantes réserves d’or au monde. Cette richesse n’apporte aucun bénéfice aux populations autochtones, qui sont au contraire dépossédées de leurs terres et qui subissent les dommages environnementaux liés à l’exploitation de ces gisements.
Terres accaparées en 1969
La partie occidentale de la Nouvelle-Guinée a été cédée à l’Indonésie en 1969, à la suite d’un « vote » pour le moins contestable. Dans cette région de population mélanésienne, qui vivait selon le droit coutumier, l’arrivée des Indonésiens a entraîné une multitude de bouleversement. Les Papous, Mélanésiens, sont devenus minoritaire sur leur territoire ancestral. Les Indonésiens les dominent démographiquement et économiquement. De plus, les Papous originellement animistes se sont massivement convertis au christianisme, alors que les Indonésiens sont musulmans, ce qui aggrave la fracture entre ces deux populations.
Étouffement de l’identité papoue
L’administration coloniale hollandaise avait organisé la migration volontaire d’Indonésiens vers les îles à majorité mélanésienne, peu peuplées. Cette manipulation cynique des mouvements de populations pour étouffer l’identité papoue a atteint son paroxysme sous la présidence du général Suharto, pendant la période de « l’Ordre nouveau ». Mais l’arrivée au pouvoir en 2014, du président Joko Widodo, sonnait comme une bonne nouvelle pour les Mélanésiens. Il a donné plusieurs signes d’apaisement, graciant des prisonniers politiques et promettant d’ouvrir le territoire de la Papouasie aux médias. Il mettait ainsi fin à un blocus qui, pendant 40 ans, a empêché les médias et les organisations de défense des droits de l’homme de se rendre en Papouasie pour enquêter sur les réalités locales.
Pas de paix sans justice
Malgré ces avancées, les éléments du conflit restent en place : les Papous de Nouvelle-Guinée occidentale subissent l’ascendant de l’administration indonésienne. Ils sont considérés comme des êtres inférieurs, comme le dénonce l’association de défense des peuples indigènes (Survival International).
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