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par François Meylan
Une nouvelle initiative guidée par la tendance du moment, par l’émotivité, par une courte vue et qui frappera à côté de la cible. Bref, on se situe, une fois de trop, au niveau de l’effet d’annonce. Ce qui est vraiment regrettable, venant des autorités helvétiques.
Cette semaine, les médias helvétiques l’ont relayé : le Conseil fédéral (Cf) – le gouvernement suisse – a mis en consultation un projet de loi visant à interdire le groupe islamiste et toutes les organisations apparentées. On évoque déjà de lourdes peines d’emprisonnement allant jusqu’à 10 ans et plus dans certains cas d’apologie du Hamas notamment sur les réseaux sociaux. Voir le communiqué complet à la fin de cet article.1
La consultation court jusqu’au 28 mai. Néanmoins, le projet ne devrait rencontrer aucune difficulté à être adopté. Les Chambres fédérales ayant chacune initié deux motions allant dans ce sens, en décembre dernier. «La durée de validité de la loi est limitée à cinq ans, comme le projet a des conséquences majeures pour les organisations, groupements et personnes concernés», note le Conseil fédéral. «Elle peut être prolongée par le Parlement lors d’un processus ordinaire».
Toujours selon le gouvernement suisse, le Hamas et les organisations liées sont pénalement qualifiés de terroristes. Les actes de soutien sont passibles d’une peine privative de liberté de 10 ans au plus et, pour les personnes qui exercent une influence déterminante au sein de ces entités, de 20 ans au plus.
«J’ai des doutes sur la nécessité et l’utilité de cette décision du Conseil fédéral».2
«Ce n’est pas absurde ce que le Conseil fédéral est en train de décider, c’est bien. Mais la question est plutôt de savoir est-ce que c’est nécessaire, est-ce que c’est utile. J’ai des doutes» a déclaré, pour sa part, dans l’émission Forum de la Radio Télévision Suisse (RTS), Tim Guldimann, ancien ambassadeur de Suisse, notamment en Iran et en Allemagne.
Concernant la nécessité, «il faut voir le texte de justification du Conseil fédéral qui dit que cela rend plus facile de poursuivre des actes éventuels du Hamas en Suisse». Pourtant, il existe déjà l’article 260 du Code pénal qui est un instrument suffisant pour agir contre une telle éventualité, relève l’ancien ambassadeur.
«Pour l’utilité, j’ai aussi des doutes car nous avons une tradition de bons offices avec la possibilité d’avoir des contacts tous azimuts. Aujourd’hui, on ne sait pas comment cela va se développer. C’est possible que d’ici quelques mois le Hamas n’existe plus», explique encore Tim Guldimann.
Quant à votre serviteur, il déplore, une fois de plus, que le gouvernement helvétique agisse sur le coup de l’émotion et non de la raison. On peut déplorer l’absence de neutralité totale – tout comme pour le conflit en Ukraine.
Ce qui se passe actuellement dans la bande de Gaza est bel est bien un conflit armé entre une armée étatique contre une organisation de résistance, avec une population civile prise tragiquement entre deux feux nourris. Le Conseil fédéral semble agir sans avoir consulté tous les rapports du front. Sans la moindre vision ; sans la moindre stratégie politique si ce n’est que de suivre de manière grégaire un certain mouvement qui suit aveuglément le ton dicté par le gouvernement israélien actuel qui ne saurait aucunement représenter Israël et encore moins le futur des populations du Proche-Orient. Une fois de trop depuis la crise de la Covid-19, le Cf prend des décisions à l’emporte pièce et trop soucieux du qu’en dira-t-on à la Commission européenne ou à Washington.
Rappelons, qu’il existe au sein du Concert des Nations unies (ONU) plus de deux cent définitions du terrorisme. Cela veut dire qu’à l’heure actuelle il n’existe toujours pas une définition universelle adoptée de ces violences politiques que certains assimilent au terrorisme et d’autres à la résistance et au combat pour sa dignité et pour sa liberté. À suivre.
*
Berne – Le Hamas doit être interdit en Suisse. Lors de sa séance du 21 février 2024, le Conseil fédéral a décidé de mettre en consultation le projet de base légale nécessaire à cet effet. L’interdiction vise aussi les organisations servant de couverture au Hamas, celles qui en émanent, ainsi que les organisations et groupements qui agissent sur son ordre ou en son nom.
Le 7 octobre 2023, le Hamas a attaqué Israël, causant la mort de près de 1200 personnes originaires d’Israël ou d’autres pays, dont deux ressortissants suisses. Lors de cette attaque, il s’en est pris délibérément à la population civile. Il a emmené près de 250 enfants, femmes et hommes en otages. À l’heure actuelle, quelque 130 d’entre eux sont encore entre ses mains.
Cette attaque brutale a incité le Conseil fédéral à qualifier, le 11 octobre 2023, le Hamas d’organisation terroriste. En décembre 2023, le Conseil national et le Conseil des États ont chacun adopté une motion de même teneur demandant l’interdiction du Hamas.
Le projet de «loi fédérale interdisant le Hamas et les organisations apparentées» vise non seulement le Hamas, mais aussi les organisations lui servant de couverture, celles qui en émanent, ainsi que les organisations et groupements qui agissent sur son ordre ou en son nom. Par ailleurs, le Conseil fédéral peut interdire les organisations et groupements considérés comme terroristes qui sont particulièrement proches du Hamas et dont les dirigeants, les buts ou les moyens sont identiques aux siens.
L’interdiction est gage de sécurité juridique et a un effet préventif
L’interdiction a un effet préventif et répressif, qui peut se manifester de la manière suivante :
- L’interdiction réduit le risque que le Hamas et les organisations apparentées utilisent la Suisse comme zone de repli, tout comme elle diminue la menace d’activités terroristes commises sur le territoire suisse.
- Elle permet aux autorités de poursuite pénale de prendre plus facilement et plus efficacement des mesures de police préventive comme les interdictions d’entrée ou les expulsions.
- Elle facilite l’administration des preuves lors de procédures pénales car elle est gage d’une clarté et d’une sécurité juridique plus grandes pour les autorités de poursuite pénale et leur permet de contrer de façon plus ciblée les soutiens du Hamas.
- Elle est aussi gage de sécurité juridique pour les intermédiaires financiers dans la lutte contre le financement du terrorisme. Le Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS) de fedpol peut ainsi échanger plus facilement avec des autorités partenaires étrangères des informations sur les flux financiers en cas de soupçons en la matière.
- Le Hamas et les organisations et groupements apparentés sont qualifiés de terroristes au sens de l’art. 260ter du code pénal (RS 311.0). Les actes de soutien sont passibles d’une peine privative de liberté de 10 ans au plus et, pour les personnes qui exercent une influence déterminante au sein de ces entités, de 20 ans au plus.
Interdiction limitée à cinq ans et prolongeable par le Parlement
L’interdiction du Hamas a des conséquences majeures pour les organisations, groupements et personnes concernés, raison pour laquelle la durée de validité de la loi est limitée à cinq ans. Le Parlement peut la prolonger dans le cadre d’une procédure législative ordinaire.
La consultation court jusqu’au 28 mai 2024.
Adresse pour l’envoi de questions
Office fédéral de la police fedpol, T +41 58 463 13 10
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