Du plastique sans pétrole, c'est possible grâce à une algue OGM
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SCIENCE - Chaque année, nous produisons plus de 288 millions de tonnes deplastique. Au-delà du problème du recyclage et de l'abandon de ces déchets dans la nature, un autre défi est encore à relever sur notre consommation de ces produits: leur origine.
Car pour créer du plastique, il faut transformer du pétrole (ou du gaz), ce qui produit beaucoup de dioxyde de carbone (CO2). Enfin, ça, c'est la méthode actuelle. Mais Jianping Yu, lui, propose de produire du plastique grâce à... une simple algue. C'est plus exactement grâce à une "cyanobactéries", connue sous le nom d'algue "bleu vert", que le chercheur et son équipe du NREL (le laboratoire nationale sur les énergies renouvelables des Etats-Unis) ont réussi cette prouesse, rapporte Scientific american.
Comment ça marche? Cette algue (dont le petit nom est Synechocystis sp. PCC 6803, si vous voulez tout savoir) utilise normalement la lumière du soleil et du CO2 pour produire du sucre et de la matière organique. Mais en introduisant un gène spécial, Yu a réussi à court-circuiter la photosynthèse de la cyanobactérie. Ainsi, celle-ci convertit une partie du CO2 absorbé en éthylène, la base même de la majorité des plastiques. Et le tout sans impacter le développement de l'algue, prouesse que les précédentes recherches n'avaient pas réussi à faire.
Le coût de la propreté
En résumé, avec cette algue, on peut fabriquer du plastique non pas en créant du CO2, mais en en consommant. Selon les chercheurs, le vapocraquage, qui permet de passer du pétrole au plastique, rejette entre 1,5 et 3 tonnes de dioxyde de carbone pour une tonne d'éthylène produite. A l'inverse, la cyanobactérie consomme trois tonnes de CO2 pour produire une tonne d'éthylène.
Mais tout n'est pas si rose et cette méthode écologique a, comme souvent, un coût. Alors que la production classique d'une tonne d'éthylène coûte entre 600 et 1300 dollars, l'utilisation de l'algue bleu-vert fait exploser le budget à 3240 dollars, selon Yu.
Le chercheur est malgré tout optimiste. Actuellement, les algues produisent 35 milligrammes d'éthylène par litre de CO2 et par heure. C'est déjà 1000 fois plus qu'au début de ses recherches il y a 5 ans, mais le chercheur voit plus loin. D'ici la fin de l'année, il veut passer à 50 milligrammes de production, et ce n'est qu'une première étape.
"Je ne vois pas comment cela ne pourrait pas continuer à grimper, je n'ai toujours pas rencontré de mur de brique sur ma route. Je ne vois pas ce qui pourrait empêcher cette augmentation, même si c'est bien évidemment possible de rencontrer un obstacle."
"Les industriels sont très intéressés"
En attendant ces progrès, les entreprises sont d'ores et déjà "très intéressées", explique Jianping Yu, qui précise avoir eu des discussions avec de grandes multinationales de l'énergie et de la chimie. Il faut dire que si la production pétrochimique représente une part assez faible de l'utilisation que nous faisons du pétrole (entre 3 et 10%), "l'éthylène est le composé pétrochimique le plus produit au monde".
En attendant, l'autre défi des chercheurs consiste à rendre viable une production à grande échelle. Le NREL veut tenter dans les prochaines années des expériences hors laboratoire. Par exemple en installant une grande tente au dessus d'un étang rempli d'algues bleu-vert afin de récolter l'éthylène. Problème: l'éthylène est un gaz très inflammable. De plus, l'installation d'une telle tente sur des dizaines de mètres carrés aura un coût certain.
Bref, il reste encore du temps avant que nous disposions de plastiques vraiment écologiques.
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